e cas de la RAM est d'autant plus complexe que durant ces dernières années, elle a dû faire face à un environnement extrêmement perturbé et difficile aussi bien au niveau national qu'international. Les compagnies aériennes ont fait preuve d'une bonne résistance face aux zones de turbulences qu'elles traversent ces dernières années. Entre crise économique mondiale, nuages de cendres volcaniques, concurrence rude des compagnies low cost, soulèvements populaires dans plusieurs pays arabes, catastrophe de Fukushima et les prix ascendants du carburant, l'activité du transport aérien mondial a plutôt bien résisté. Aussi, l'Association internationale du transport aérien (Iata) a enregistré une hausse du trafic aérien passagers de 7,6% comparé au même mois de 2011 et une activité fret plutôt stable, en léger recul de 0,3%. Une tendance à la reprise qui n'exclut aucunement les compagnies publiques. Nous citerons à ce titre l'exemple de Iberia qui est la compagnie aérienne nationale espagnole. Iberia a subi de plein fouet la crise européenne depuis 2009. Pourtant, aujourd'hui sa part dans le chiffre d'affaires du secteur en Europe n'est pas des moindres et participe amplement à la reprise économique de l'Espagne, surtout après la remarquable annonce de sa fusion avec British Airways le 12 novembre 2009. En effet, les compagnies aériennes britannique British Airways et espagnole Iberia ont fusionné donnant naissance à un nouveau groupe baptisé Internationals Airlines Group (IAG). Ce groupe s'est hissé dès sa cotation au second rang des groupes de transport aérien en Europe en termes de capitalisation boursière, juste derrière le géant allemand Lufthansa et devant l'incontournable Air France-KLM. Ce dernier, qui n'est plus à présenter, est également un exemple à donner en matière de résilience face aux crises. Aujourd'hui encore, le groupe vient d'annoncer un plan drastique d'économies qui, à terme, redressera la barre en sa faveur, lui permettant d'économiser plus de 2 milliards d'euros sur trois ans (voir encadré page 5). Ou encore la grande success story de Swiss International Air Lines qui a réussi à faire oublier son passé sombre et qui aujourd'hui est prête à affronter un avenir que certains annonçaient incertain. Sur ces mêmes traces, la compagnie aérienne nationale du Maroc est en pleine mutation avançant à pas sûrs vers la pérennisation de sa réputation d'entreprise forte. Le contrat-programme signé avec l'Etat il y a quelques mois est en phase de mise en application dans un climat de sérénité. Les chantiers de ce redressement ne sont certainement pas faciles puisque à plusieurs dimensions. La compagnie ne peut pas, comme le ferait n'importe quelle autre compagnie privée, opérer un recentrage pur et dur sur son activité de base de par ses contraintes de compagnie étatique. Un statut qui induit évidemment une mission de service public qui n'est pas toujours conciliable avec la logique de rentabilité. Le cas de la RAM est d'autant plus complexe que durant ces dernières années, elle a dû faire face à un environnement extrêmement perturbé et difficile aussi bien au niveau national qu'international. Royal Air Maroc a dû d'abord faire face à la crise économique qui dure depuis fin 2008, à la baisse tendancielle de la recette unitaire, au durcissement du cadre fiscal au Maroc depuis 2007 qui lui a fait débourser 1,4 milliard de dirhams, à la fluctuation du prix du baril depuis 2008, en plus des événements politiques dans la région qui ont causé une baisse du trafic aérien. Cependant, le plus gros défi pour la compagnie fut sans doute celui de l'impact de l'Open Sky. À ce titre, la libéralisation brutale, précipitée et non maîtrisée, a fait en sorte que les compagnies low cost ont envahi le ciel marocain, profitant des procédures simplifiées et sans aucune contrainte de régularité des fréquences, ni au niveau spatial ni temporel. Ainsi, elles peuvent s'installer n'importe où choisissant surtout les destinations les plus rentables et à n'importe quel moment préférant les hautes saisons alors qu'elles suspendent leurs activités dans les basses saisons. Par contre la RAM est obligée, par son statut de compagnie nationale, de maintenir toutes les fréquences et à toutes les périodes. Et en dépit de cette conjoncture défavorable, les performances de la RAM sur le marché tant national qu'international s'inscrivent de plus en plus dans un trend haussier. La compagnie a effectivement doublé son trafic qui passe de 3 à plus de 6 millions de passagers. Aussi, elle a réussi à faire du hub Casablanca le 1er hub aérien africain pour les flux de trafic entre le continent et l'Europe, le 3ème hub entre l'Europe et l'Afrique de l'Ouest après le hub de Charles de Gaulle et celui de Londres, assurant à lui seul 40% des correspondances internationales. S'agissant de l'évolution de la compagnie de 2003 à 2010, le chiffre d'affaires est en évolution moyenne d'un milliard de dirhams par an avec un triplement du chiffre d'affaires Internet qui a atteint 2 milliards de dirhams. Parallèlement à tout cela, un travail important a été fait dans l'activité du fret aérien où la RAM continue de dominer les flux entre le Maroc et l'étranger. Au même moment, et au-delà de son activité principale qu'est le transport, la RAM s'est investie dans les industries connexes, notamment dans l'aéronautique avec de nombreux projets menés en partenariat avec de grands industriels mondiaux. Et c'est justement dans l'étendue et la complexité de ses missions que réside la difficulté de l'exercice de redressement que la RAM doit aujourd'hui mener. Se désengager des activités non rentables et celles qui ne sont pas directement liées à son activité principale ne peut pas être envisagé comme pour n'importe quelle autre compagnie aérienne privée. Car à la clé, il y a des emplois, des chantiers structurants pour l'industrie et l'économie et, plus que tout cela, la nécessité pour le Maroc de garder son pavillon national. Car en l'absence d'une compagnie nationale, la destination Maroc peut être sérieusement menacée. C'est là que réside toute la délicatesse du redressement que doit mener le management de la compagnie avec l'aide et le soutien de l'Etat actionnaire.