L'audience du prononcé du jugement a été marquée par divers incidents qui ont obligé le président du tribunal à ordonner l'évacuation de la salle. La Chambre criminelle chargée du terrorisme près la Cour d'appel de Salé a condamné à la peine capitale Adil Al Atmani, le principal accusé dans l'attentat du café Argana qui avait fait 17 morts au mois d'avril dernier à Marrakech. Hakim Dah, qui passe pour être le mentor du poseur de bombes, a quant à lui été condamné à la réclusion perpétuelle. Les autres prévenus ont écopé de peines de 4 et de 2 ans. Mohamed Nima, l'un des mis en cause qui a comparu devant la Cour en état de liberté, a été pour sa part acquitté. Curieusement, la peine capitale qui a été prononcée par la Cour n'a pas suscité de réaction parmi les proches des victimes étrangères qui pourtant s'y étaient déclarés opposés d'une manière très médiatique avant son prononcé. Interrogés à ce sujet, certains d'entre eux ont répondu que là n'est pas la question et que ce qui importe aujourd'hui «c'est le laxisme éhonté dont a fait preuve la justice marocaine à l'égard du terrorisme». Ils ont estimé que des peines de quatre ans constituent un encouragement à la récidive et que, de toute manière, en ce qui concerne la peine capitale, tout le monde sait que «le Maroc ne l'applique plus et qu'elle est de fait commuée en réclusion perpétuelle incompressible». L'audience du prononcé du jugement a été marquée par divers incidents qui ont obligé le président du tribunal à ordonner l'évacuation de la salle, ce que le service d'ordre a eu de la peine à obtenir des parents des victimes, révoltés par ce qu'ils ont qualifié de «justice inique et expéditive». Quelques instants seulement après la levée de l'audience, deux des condamnés ont dit leur intention d'interjeter appel des décisions de la justice prises à leur encontre. Me Mohib, l'avocat d'Al Atmani qui s'est dit convaincu de l'innocence de son client, «sinon il aurait demandé simplement la clémence du tribunal», a lui aussi déclaré son intention de se pourvoir en appel d'une «décision injuste et qui n'honore pas particulièrement la justice de notre pays». Il a affirmé qu'il s'opposera par tous les moyens que lui confère la loi à un jugement qui ne peut être qu'injuste tant «le dossier est vide». Car, a-t-il précisé, le tribunal a basé sa décision sur l'aveu, prétendument preuve absolue devant la justice, Or, a-t-il ajouté, l'aveu a valeur de preuve absolue dans les affaires civiles, mais pas au pénal. Selon lui, dès lors que les accusés se sont rétractés devant la Cour, le président aurait dû demander une enquête complémentaire, exiger la présentation des pièces à conviction et appeler les experts à la barre. «Comme il ne l'a pas fait, la conséquence s'impose d'elle-même», a-t-il conclu. Mais, c'est du procureur qu'est venue la surprise puisque, moins de douze heures après la décision du tribunal, il a fait savoir qu'il compte faire appel du jugement qui a condamné à des peines légères six des neuf accusés. Cette décision est susceptible d'en entraîner une autre de la part des avocats des parties civiles. Ces dernières n'ont pas caché leur colère au sujet d'un jugement qu'elles ont estimé laxiste au pénal et inexistant au civil. Elles estiment en effet que la réponse apportée à leurs demandes de dédommagements est ridicule. Si de telles perspectives se précisaient, le procès d'Argana aura fait étonnamment une jurisprudence en restant comme l'un des premiers à avoir fait l'unanimité contre lui.