Les partis politiques expriment des réserves à propos de la date annoncée, lundi dernier, par le ministère de l'intérieur. Le ministère de l'intérieur a enfin tranché. Les élections législatives anticipées auront lieu officiellement le vendredi 25 novembre 2011. C'est ce qu'a annoncé, lundi 15 août, le département de Taib Cherkaoui suite à une énième réunion de consultation tenue avec les partis politiques. Ainsi, les dates du vendredi 7 octobre et du vendredi 11 novembre qui ont été annoncées auparavant ont été finalement abandonnées. La première parce que trop proche et étant donné le retard pris en matière d'élaboration des lois électorales et la deuxième, le 11 novembre, parce que trop proche de d'Aïd Al Adha très souvent précédé et suivi de jours de congés ce qui risque de compromettre la participation au scrutin. Aujourd'hui, la question est tranchée : le scrutin aura lieu dans un peu plus de trois mois même si les partis ne semblent pas tous d'accord. Il ressort des réactions recueillies par ALM auprès des partis, en effet, qu'à l'image de la date du 9 octobre et celle du 11 novembre, le 25 novembre ne fait pas, lui-aussi, l'unanimité. Et chaque parti avance ses arguments. Pour le RNI, par exemple, la date du 11 novembre semble poser un gros problème dans le sens où son président, Salaheddine Mezouar, également ministre des finances, se trouvera en pleins débats au Parlement sur la loi de Finances 2012. «Je regrette une telle date parce qu'elle va m'empêcher de me présenter aux prochaines élections puisque je serai obligé d'être au Parlement pour défendre la loi de Finances», souligne Salaheddine Mezouar, président du RNI. «Normalement, la loi de Finances est déposée le 20 octobre, et la discussion se poursuit au Parlement jusqu'au 20 novembre. Je suis obligé d'être présent au Parlement pour la discuter et la défendre», précise M. Mezouar, et d'ajouter que «cette date va porter également préjudice au RNI dans la mesure où elle va empêcher son président d'aller faire campagne auprès de ses candidats pour les prochaines élections. Le RNI avait demandé la tenue des élections le 4 novembre. Et pratiquement rien n'empêchait la tenue des élections à cette date». Le PJD relève, lui aussi, les points négatifs de cette date. «La date du 25 novembre est une contrainte et pas un choix. C'est une date qui s'impose. A cause de cette date, il y aura un retard énorme en matière d'adoption de la loi de Finances. Aussi, cette date coïncide avec le début de l'hiver. Donc, les conditions climatiques risquent de perturber la campagne électorale», souligne Lahcen Daoudi, secrétaire général-adjoint du PJD. «Le retard qu'il y a aujourd'hui s'explique par le retard en matière d'établissement des listes électorales. Si l'Intérieur avait voulu adopter la procédure proposée par le PJD, à savoir l'établissement de ces listes sur la base des listes de la CIN on aurait pu organiser les élections en octobre», s'indigne M. Daoudi. Le parti de l'Istiqlal, qui a été le premier parti à appeler à des élections anticipées, a, pour sa part, critiqué la méthodologie adoptée par le département de Taib Cherkaoui pour fixer la date des élections. «L'attachement du ministère de l'intérieur à fixer la date des élections et à élaborer les lois électorales en vertu d'un consensus est une méthodologie classique. La recherche de l'unanimité relève de l'héritage du passé. C'est cette méthodologie qui a causé ce retard», fait observer Abdelkader El Kihel, membre du comité exécutif du parti de l'Istiqlal. «La date du 25 novembre présente quelques inconvénients. Elle coïncide pratiquement avec le démarrage des travaux agricoles et les électeurs en milieu rural risquent d'être plutôt préoccupés par la campagne que pour aller voter», ajoute-t-il. Et de préciser que «le parti de l'Istiqlal admet, par ailleurs, qu'il est difficile de trouver une autre date. D'ailleurs, nous sommes fin prêts même pour la date du 7 octobre». Le PAM rappelle, quant à lui, qu'il avait appelé à tenir les élections dans les plus brefs délais. «Le PAM avait appelé à accélérer le rythme de la réforme en organisant les élections dans les plus brefs délais. La mise en œuvre des dispositions de la nouvelle Constitution exige de nous de dépasser l'étape actuelle», souligne Milouda Hazib, membre du bureau national du PAM. «Nous voulions que ces élections aient lieu au plus tard vers la fin du mois d'octobre. Le 25 novembre ce n'est pas trop tard, mais c'est déjà tard. C'est une bonne chose de tenter de trouver un consensus, mais on pouvait aussi recourir à la méthode démocratique», explique Mme Hazib. «Certes, nous appelons à tenir les élections dans les plus brefs délais, mais il a fallu décaler la date du 11 novembre en raison de sa coïncidence avec la fête du Sacrifice. La date du 25 novembre a été décidée en vertu d'un consensus entre les partis politiques lors de la réunion avec le ministère de l'intérieur», fait savoir, pour sa part, Mohamed Abied, secrétaire général de l'UC. A noter que lors de la réunion de lundi 15 août, le ministère de l'intérieur a poursuivi la concertation avec les partis au sujet des projets de textes électoraux. Les partis politiques continuent d'exprimer des points de vue contradictoires à propos de la liste nationale, le seuil des élections et le découpage électoral. C'est ce qui explique le retard en matière d'adoption des lois électorales. A noter que le ministère de l'intérieur a assuré que les consultations avec les partis politiques se poursuivront sur tout ce qui se rapporte à la préparation des prochaines échéances électorales. Trois scénarios pour la prochaine session parlementaire Le ministère de l'intérieur a annoncé la date du vendredi 25 novembre pour les prochaines élections. A partir du moment où la Constitution prévoit l'ouverture de la session parlementaire hivernale le deuxième vendredi du mois d'octobre, la question qui se pose aujourd'hui est celle de savoir si l'actuelle composition du Parlement sera maintenue jusqu'à la veille des élections ou si cette ouverture n'aura lieu qu'après l'opération électorale. Contacté par ALM, Mohamed Zine-Eddine, professeur du Droit constitutionnel à l'Université Hassan II à Mohammedia, évoque trois scénarios possibles. «Il existe, en réalité, trois scénarios. Il se peut que la prochaine session parlementaire d'octobre soit ouverte, conformément à la Constitution, c'est-à-dire dans le deuxième vendredi du mois d'octobre. Elle s'inscrira, ainsi, dans la continuité du Parlement actuel. On continuera ainsi à travailler avec les mêmes parlementaires jusqu'aux élections. Il se peut également que la prochaine session soit reportée au mois de novembre pour coïncider avec les élections. Je trouve que ce scénario est peu probable car il faut respecter les délais fixés par la Constitution. Le troisième scénario se rapporte, quant à lui, à la dissolution du Parlement avant les élections. Ce scénario est également improbable. Car il n'existe absolument pas de raisons objectives qui justifieraient cette dissolution. Même la déclaration de l'état d'exception ne justifie pas la dissolution. En plus, une telle opération a un coût politique considérable. Je pense, ainsi, que le premier scénario sera retenu fort probablement», explique M. Zine-Eddine. «En raison de la tenue des élections de façon anticipée, la prochaine législature aura lieu de l'année 2011 à l'année 2016 au lieu du 2012 à 2017. Cela n'a aucun impact juridique. Car le Conseil constitutionnel commence à compter la législature à partir de la date des élections», ajoute-t-il.