Fès est en train de se transformer en plate-forme du trafic de drogue tant à l'échelle nationale qu'internationale. Il y a quelques jours, une source douanière annonçait «la saisie de 30.000 comprimés psychotropes au niveau du centre Douiet près de Fès». Le communiqué des services douaniers précisait que la drogue saisie, qui a « une valeur marchande de près de 300.000 DH», a été découverte «à bord d'un véhicule léger par une brigade relevant de la direction douanière de Fès» et que «le conducteur du véhicule a réussi à prendre la fuite». L'information qui, à première vue, relèverait du fait-divers ordinaire, est, en fait, une nouvelle preuve de la transformation de la ville de Fès en une plate-forme principale pour les opérations mafieuses de trafic de drogue d'envergure nationale et internationale. Qu'il s'agisse de drogues dures, de cannabis ou de comprimés psychotropes, Fès est devenue une sorte de base-arrière de dépôt, de stockage et d'exportation vers les autres villes du Royaume ou vers l'Europe. Selon les spécialistes, cette situation s'explique, entre autres, par la situation dégradée de la sécurité dans la capitale spirituelle du Royaume. Une situation qui ne fait que s'empirer obéissant à une équation fondamentale connue des experts du crime organisé: «insécurité = moins d'investissement» et «moins d'investissement = plus de chômeurs» et «plus de chômeurs = plus d'insécurité». Cette situation, quand elle s'installe dans une ville, conduit à une aggravation permanente et continuelle de la situation sécuritaire dans son sens le plus large. Il s'agit d'un trou noir qui absorbe tout autour de lui et qui finit par faire d'un espace urbain une sorte de forteresse du crime organisé où finissent par disparaître tous les aspects civilisés et modernes de la vie urbaine comme les activités culturelles, les manifestations sportives, l'exercice honnête de la politique, l'expression libre des opinions, etc. Car, dès que les organisations mafieuses investissent un espace urbain, elles étendent leurs tentacules à tous les aspects de la vie quotidienne des citoyens afin de maîtriser et monopoliser l'espace dans lequel elles évoluent. Et les statistiques publiées par les services douaniers de la capitale spirituelle révèlent que l'activité est en train de croître dans cette région. Ainsi, si la douane a saisi 15,649 tonnes de stupéfiants en 2009, elle en a saisi 32,6 tonnes en 2010. Sans oublier, évidemment, les quantités de drogue saisies dans les différents ports du Royaume et qui, après enquête, s'avèrent avoir été emballées à Fès. Cette situation est de nature à sonner l'alarme quant au risque de voir la capitale spirituelle se transformer en forteresse des réseaux mafieux opérant entre le nord et le Sud pour le cannabis, entre l'est et l'ouest du pays pour le trafic des psychotropes émanant de l'Algérie, et entre le sud et le nord, comme plate-forme d'escale du trafic des drogues dures acheminées depuis les pays sahélo-sahariens à destination de l'Europe.