Dès le début de son calvaire, Sarkozy a pris la défense passionnée de Woerth, un homme, selon son plaidoyer, d'une indiscutable honnêteté. Si Eric Woerth, ministre du Travail de Nicolas Sarkozy, pensait qu'il allait tranquillement se dorer la calvitie en lisant ses bilans comptables favoris et en jouant aux mots fléchés des Bourses qui montent et descendent, il s'est lourdement trompé. Les braises de l'affaire Bettencourt, du nom de cette riche héritière des industries L'Oréal, fument encore que déjà une autre affaire le cloue au pilori. C'est celle du règlement de la succession du sculpteur César dans laquelle le journal «Libération» avait apporté la preuve écrite qu'il était personnellement intervenu pour obtenir à son exécuteur testamentaire Alain Dominique Perrin un dégrèvement fiscal de 27 millions d'euros. Et comme par pur hasard, Alain Dominique Perrin s'est avéré être un généreux donateur de l'UMP, le parti de Nicolas Sarkozy. Comme l'était Liliane Bettencourt. C'est une affaire dans l'affaire. «Libération» apporte la preuve que non seulement Eric Woerth est intervenu mais qu'il avait menti lorsqu'en plein bourrasque de l'affaire Bettencourt, il avait affirmé, la main sur le cœur, qu'il n'était jamais intervenu ni pour encourager un contrôle fiscal, ni pour l'arrêter. Eric Woerth pourra toujours se consoler d'avoir eu quelques jours de répit. Il avait disparu de l'actualité au moment même où, après les événements de Grenoble, Nicolas Sarkozy a eu une poussée de fièvre sécuritaire au point de lier immigration et délinquance et de menacer de déchoir de leur nationalité française tous les criminels d'origine étrangère qui se seraient attaqués à un dépositaire de la loi. Eric Woerth, le héros de ce grand feuilleton qui narre les relations incestueuses et consanguines entre politiques et puissances de l'argent, a eu un moment de répit. Malmené de tous les côtés, entendu par le police qui cherchait à disséquer l'accusation de conflit d'intérêt qui le poursuivait comme une malédiction, il s'apprêtait à souffler en attendant la délivrance avec le remaniement du mois d'octobre et son extraction de cette mare aux affaires. Il n'a pas eu à attendre longtemps que voilà qu'il remonte de nouveau en scène. Pour cause sans doute de vacances politiques, les amis d'Eric Woerth ont observé un silence estival. Et c'est le ministre lui-même qui est monté au créneau pour assurer sa défense et dénoncer «l'acharnement inacceptable» du journal «Libération» et l'accuse de «déformer les faits». Alain Dominique Perrin, exécuteur testamentaire de César qualifie la preuve écrite fournie par le journal de «bidouillée», «un travail de faussaire». Avec cette nouvelle affaire de 27 millions d'euros pour le sculpteur César qui s'ajoutent au chèque de 30 millions rétrocédé à Liliane Bettencourt, Eric Woerth court le risque de voir son nom associé non seulement à une banale affaire de conflit d'intérêt mais à un détournement d'impôts et un abus de biens publics comme l'ont souligné de nombreux éditorialistes français. Dès le début de son calvaire, Nicolas Sarkozy a pris la défense passionnée d'Eric Woerth, un homme, selon son plaidoyer, d'une indiscutable honnêteté. Le faisceau d'accusations et de soupçons qui se nourrit contre Eric Woerth donne à cette prise de position présidentielle un étrange écho que l'opposition ressortira bien un jour au moment où la majorité aura perdu tout espoir de sauver le soldat Eric.