En apprenant que son père avait été insulté et humilié par un trafiquant de haschich et de kif en tige, Redouane a décidé de se venger. Une tentative de vengeance qui lui a coûté la vie. «Je lui ai asséné, M. le président, plusieurs coups de couteau». C'est un aveu pur et simple de Mohamed. Rares sont les mis en cause qui avouent leurs crimes. La majorité nie les accusations qui lui ont été attribuées par le Parquet général pour être acquittée au bénéfice du doute ou au moins pour bénéficier des circonstances atténuantes. Nous sommes à la chambre criminelle près la Cour d'appel à Salé. Mohamed est au box des accusés. Ce n'était pas la première fois qu'il se tient devant des juges. Il est un repris de justice qui a purgé quelques peines d'emprisonnement pour trafic et consommation de haschich et de kif. Seulement, cette fois-ci, l'accusation est un crime de meurtre qui lui vaudrait un lourd châtiment. En effet, il est accusé de coups et blessures ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner. «Je ne nie pas l'avoir tué, mais sans avoir l'intention de le commettre, M. le président», a-t-il affirmé devant le président de la Cour et ses deux assesseurs. Mohamed, quadragénaire, était un trafiquant de haschich et de kif en tige notoire dans la région de Skhirate. C'est l'activité qui lui avait coûté, à différentes reprises, une partie de sa vie derrière les barreaux. En plus, cette activité illicite lui causait de temps en temps des problèmes avec ses clients au point que, pour certain cas, il est arrivé à user de son couteau. Et c'est ce qui lui est arrivé la dernière fois. «D'abord, M. le président, je ne le connaissais pas. C'est son père qui était mon client…Je ne l'avais jamais vu», a expliqué Mohamed à la Cour. Effectivement, Mohamed n'a jamais rencontré sa victime, Redouane. C'est le père de celui-ci qui était son client depuis belle lurette. Il achetait de chez lui sa dose de kif en tige. Malheureusement, la dernière fois, un malentendu s'est éclaté entre les deux à propos de la quantité de kif en tige qui, selon le client, ne correspond pas à la somme d'argent qu'il lui avait remise. Une protestation du client qui a provoqué Mohamed au point qu'il n'avait pas pu retenir sa langue et l'a insulté et l'a humilié en présence d'autres clients. «Je lui ai remis la quantité de kif qu'il m'avait demandée. Je ne l'avais pas triché, M. le président…Je l'ai insulté après m'avoir traité de voleur et tricheur», a-t-il répondu à la Cour. Le client a pris sa dose en kif et est retourné chez lui. Son fils a remarqué sa nervosité. Il lui a demandé ce qui l'avait rendu très en colère. «Mohamed m'a humilié et m'a insulté devant tout le monde lorsque j'ai protesté contre sa tricherie», avait répondu le père à son fils, Redouane. Hors de lui, Redouane est rentré à la cuisine et s'est armé d'un couteau. Son père s'est contenté de l'empêcher d'aller chez le trafiquant de drogue. Mais en vain. Il semble que Redouane a décidé de se venger pour son père. Pas moins de dix minutes de marche à pied, il est arrivé devant la porte du domicile de Mohamed. Il l'a appelé et l'a sollicité de lui expliquer pourquoi avait-il humilié son père. «Je lui ai demandé de partir et de me laisser tranquille. Mais, il semblait avoir l'intention de se venger. Il a brandi son couteau. Je ne pouvais pas rester les mains croisées. J'ai saisi un couteau qui était sur la table et je suis sorti à sa rencontre», a-t-il précisé à la Cour. Face-à-face, Mohamed sollicitait Redouane de partir sans trop de problème. Mais, Redouane n'avait l'envie que de maltraiter Mohamed. Seulement, celui-ci, en un clin d'œil, a attaqué Redouane et lui a criblé le corps de coups de couteau. Redouane a rendu l'âme et Mohamed a été condamné à vingt ans de réclusion criminelle.