L'intervention du chef de l'Etat, même si elle n'a convaincu que ses supporters traditionnels et confirmé ses adversaires ataviques dans leurs oppositions, s'est voulue salutaire. L'image est assez révélatrice du malaise qui traverse la majorité présidentielle. Mardi soir lors du débat sur l'identité nationale demandé à la base par le groupe UMP, Eric Besson, ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale était obligé de délivrer son discours devant un parterre parsemé, les députés UMP et leur leadership, ayant brillé par leur absence. La gauche présente dans l'hémicycle, par la voix du patron du groupe PS, Jean-Marc Ayrault s'est faite un malin plaisir de la faire remarquer au cas où ce cliché révélateur échapperait à la vigilance des observateurs. L'absentéisme des députés UMP, qui par moment confine au boycott, est d'autant plus parlant qu'il intervient le jour où le président de la République, Nicolas Sarkozy, s'était fendu d'une tribune dans le journal «Le Monde», avec l'objectif politique clair de recadrer un débat qui commençait à partir dans tous les sens et à atteindre des buts et des agendas autres que ceux pour lesquels il était programmé. L'image de l'Assemblée nationale révélait un malaise assez perceptible. Eric Besson, ancien socialiste passé en pleine course présidentielle, avec armes et bagages à l'UMP, porteur et médiateur de ce débat sur l'identité nationale, s'est trouvé coincé entre deux antagonismes. Le premier incarné par la gauche qui ne lui a jamais pardonné sa spectaculaire trahison et qui ne rate aucune occasion de lui tendre des croche-pieds les plus mortels. Le second est personnifié par les députés UMP dont le chef même Jean-François Copé ne s'est jamais accommodé de cette ouverture qui cède les plus juteux fromages de la République à des adversaires sous prétexte d'acheter leur allégeance et d'affaiblir leur famille d'origine. Nicolas Sarkozy, dont le soutien des Français à son action tombe à son plus bas niveau depuis son élection en mai 2007 avec seulement 39%, vient sans aucun doute de se rendre compte qu'en plus du côté explosif du débat qu'il soumet aux Français, l'organisateur du débat, en la personne d'Eric Besson, fait plus polémique que le débat lui-même. L'intervention du chef de l'Etat, même si elle n'a convaincu que ses supporters traditionnels et confirmé ses adversaires ataviques dans leurs oppositions, s'est voulue salutaire. Le débat sur l'identité nationale était programmé à la veille des élections régionales pour deux raisons stratégiques ; siphonner les voix de l'extrême droite en tentant de réitérer la performance de la présidentielle à travers une captation d'héritage, et pousser l'opposition de gauche, connue pour être mal à l'aise sur des sujets aussi brûlants que l'identité nationale, dans ses derniers retranchements et contradictions. Le résultat qui se manifeste à vue d'œil est que ce débat a permis de revigorer l'extrême droite. Entre une gauche qui limite son expression politique à une insurrection verbale contre les arrière-pensées électoralistes de cette démarche et une droite qui exhibe son indifférence à ce débat, Nicolas Sarkozy s'est retrouvé brusquement en train d'échanger des arguments et de polémiquer avec Marine Le Pen, trop heureuse de chevaucher le torrent de xénophobie qu'un tel débat organisé dans les préfectures, a pu provoquer.