La forêt de Bouskoura, véritable poumon de Casablanca, est ravagée par la pollution. Les écologistes tirent la sonnette d'alarme. «La forêt de Bouskoura est condamnée à disparaître». Pour Hassan Fougrach, professeur spécialiste en écologie végétale, le constat est sans appel. Le véritable poumon de la métropole économique est menacé dans son existence. Des dizaines d'arbres tombent chaque mois. Une incontestable catastrophe naturelle. Les causes sont multiples, selon Hassan Fougrach qui suit le dossier depuis plusieurs années: «Les arbres sont affaiblis par la pollution de l'air et de la nappe phréatique. L'existence d'un parasite qui ravagerait les plantations n'est pas non plus une hypothèse à exclure». Casablanca risque de se retrouver donc privée de 85 % de son espace vert qui lui fournit plus de 50.000 tonnes d'oxygène annuellement et la débarrasse en même temps de 7 millions de CO2. «Les espèces d'arbres qui se trouvent à Bouskoura ont une durée de vie d'environ une soixantaine d'années. C'est le cas de tous les arbres non autochtones. D'ailleurs, seules les espèces autochtones peuvent se reproduire d'elles-mêmes et permettent à une forêt de régénérer», poursuit le professeur Hassan Fougrach. La forêt de Bouskoura a été initialement plantée en 1948 sur une superficie de 267 hectares. Quelques années après, on a rajouté environ 2.500 hectares. C'est cette zone qui constitue actuellement une réserve de chasse. Les principaux arbres plantés dans la forêt sont le pin, l'eucalyptus (importé d'Australie), la thuya, le cyprès et l'acacia. Abderrahim Ksiri, président de l'Association des enseignants des sciences de la vie et de la terre (AESVT), tire également la sonnette d'alarme : «Casablanca ne dispose que de 1,4 m2 pour chaque habitant alors que la norme internationale oscille entre 10 et 15 m2 par personne.». Si le réservoir d'oxygène que constitue la forêt de Bouskoura venait à disparaître la moyenne descendrait à 0,20 m2 par habitant. Le danger est donc réel d'autant plus que les pouvoirs publics et autorités locales, ont laissé tomber le projet de la ceinture verte prévue déjà en 1944. Pire encore, s'insurge le président de l'AESVT : «même l'Oued Bouskoura, dont les sources sont à quelques encablures de la forêt, et qui pourrait éventuellement faciliter l'établissement de cette ceinture verte est menacé par la pollution». En effet, les unités industrielles sises dans les zones industrielles de Bouskoura et de Oulad Saleh déversent des produits chimiques directement dans l'Oued. De même, le projet immobilier Ennassim érigé sur les bords du lit de l'Oued Bouskoura entravera sérieusement toute tentative d'aménagement des espaces verts autour de Casablanca. Il est à signaler que la métropole connaît une urbanisation rapide puisque chaque année 300 hectares de terres agricoles sont remplacés par des lotissements d'habitat et des zones industrielles. Casablanca se trouve donc menacée d'asphyxie et si rien n'est fait d'ici quelques années, la situation va encore empirer. Les milliers de casablancais qui se rendent chaque semaine à la forêt de Bouskoura, à défaut d'autres espaces verts appropriés à l'intérieur de la ville, seront alors condamnés à ne respirer que des masses d'air polluées.