Le pôle de la droite libérale, constitué essentiellement des partis du Wifaq, a du mal à manifester son existence politique en tant que prétendant à l'alternance, face à une mouvance social-démocrate mieux armée politiquement et idéologiquement. C'est un fait majeur qui retarde la construction démocratique du pays. À 9 mois environ des prochaines échéances électorales, les partis du Wifak, l'UC, le MP et le PND, renvoient l'image de partis indécis et frileux, qui ne savent pas sur quel pied danser. Quelle serait leur place dans l'échiquier politique à l'issue de ces élections ? Difficile de faire des pronostics. Une chose est néanmoins sûre : la droite, naguère machine à égrener les votes, ayant vocation à être aux affaires, n'est plus ce qu'elle était. Tout se passe comme si sa cote, hier élevée, a fondu petit à petit à la faveur de l'alternance. En un mot, la donne a changé. Ce qui nous amène naturellement à nous poser des questions sur la situation de chacune des composantes de cette alliance. En un mot, ces dernières survivront-elles au défi de 2002 ? En tout cas, les adversaires du Wifak misent sur sa mise au tombeau politique. Ce raisonnement, à défaut d'être sain, n'aide pas à doter le pays d'une vie politique normale et d'une démocratie qui marche sur deux pieds. L'UC, depuis la disparition de son fondateur Maâti Bouabid, donne l'impression d'avoir perdu ses repères, ne sachant à quel saint se vouer pour demeurer partie prenante dans la dynamique du pays. Le parti avait perdu beaucoup de temps en mettant en place une présidence tournante alors qu'il aurait été judicieux de choisir un successeur à même de repositionner le parti. Cette solution provisoire, qui a fini par brouiller l'image du parti, permettait à ses dirigeants de ne pas trancher le problème de la succession en mettant un bémol aux querelles de personnes et aux appétits des uns et des autres. Aujourd'hui, c'est encore le statu quo qui prévaut avec Mohamed Abied à la tête du parti suite au décès de Abdellatif Semlali. En attendant que le prochain congrès national prévu pour les mois à venir adoube officiellement l'actuel secrétaire général, l'UC semble vivre dans l'espoir de lendemains qui chantent sans vraiment y croire. Seul avantage de taille, l'UC a su sauvegarder, en ces temps d'émiettement de la carte partisane, sa cohésion interne en évitant que le parti ne parte en quenouille. Le MP, lui, s'efforce par contre de montrer un visage moins inquiet. Le parti de Mohand Laenser, longtemps à l'abri des dissensions internes, traverse actuellement une zone de turbulence. Un groupe de dissidents, qui se sont constitués pour le moment en comité de redressement au sein du parti, menace en effet de faire scission en guise de protestation contre l'absence de démocratie à l'intérieur des instances du mouvement. Ce dernier a réussi tout de même à tenir récemment son congrès national sans trop de dégâts en sauvegardant un semblant d'unité grâce au renouvellement partiel des membres du bureau politique. Champion du consensus que certains de ses compagnons trouvent excessif, homme prudent qui sait tempérer les ardeurs des siens, M. Laenser, réélu à la tête du parti, saura-t-il épargner à son parti le syndrome de la désunion ? Le PND de Abdallah Kadiri, quant à lui, se présente comme le parti qui a souffert le plus des agissements de l'administration, notamment lors des dernières législatives. Le « parti des ruraux », lui-même produit de scission d'avec le RNI, n'a pas échappé non plus à des velléités de rupture. Ahmed Alami, ex-ministre de la Santé, a tenté, à plusieurs reprises, d'être un calife à la place du calife. Sans résultat. Cette menace écartée, le PND tente tant que bien que mal d'exister en attendant son prochain congrès national. “Les trois partis du Wifak ont ceci de commun qu'ils sont de moins en moins attrayants, explique un député de gauche. La politique de rajeunissement chez ces partis est en panne“. En fait, on peut dire la même chose de la plupart des partis politiques marocains qui ont joué plutôt la carte du clientélisme et des baronnies locales, négligeant d'encadrer la population et d'écrémer l'élite du pays . La droite a vocation d'être un pôle libéral, organisé et cohérent. La place naturelle du RNI, actuellement au gouvernement, n'est-elle pas dans le camp de droite ? Forces Citoyennes de Abderrahim Lahjouji, formation d'extraction libérale, ne serait-elle pas mieux inspirée en se rapprochant de cette même droite au lieu de chercher des alliances à gauche ? une telle stratégie de rassemblement ne peut être que bénéfique aux uns et aux autres, puisqu'elle permettrait au jeu politique national de gagner en lisibilité et en cohérence.