Reprochant à sa mère et à sa sœur d'avoir aménagé leur domicile en maison close, Ahmed les frappait. Sa mère porte plainte. Casablanca. La salle d'audience n° 2, à la chambre correctionnelle près le tribunal de première instance est, comme à l'accoutumée, archicomble. Nous sommes un après-midi de ce jour du mois de mars. Le magistrat suivi du substitut de procureur du Roi et du greffier sont retournés à la salle d'audience. Ils ont pris leur place avant que le magistrat appelle Ahmed. Un jeune homme de vingt-trois ans en tenue sport s'est approché pour se tenir à la barre. Célibataire et sans profession, il gardait le silence devant le magistrat. Ce dernier a appelé une femme, une sexagénaire qui se tenait parmi l'assistance juste à côté d'une jeune femme, la trentaine. Paisiblement, la sexagénaire a quitté sa place pour répondre à l'appel du tribunal. «C'est ta mère ? », s'est adressé le juge à Ahmed qui s'est contenté de hocher la tête. Il n'avait pas osé répondre. Par pudeur ou par regret ? Peu importe. Mais, le juge lui a ordonné de répondre. «Oui», a-t-il balbutié sans oser la regarder. La mère, diabétique n'a pas pu rester debout très longtemps. C'est pourquoi, elle a sollicité le juge de lui permettre de s'asseoir. Par pitié, il le lui a permis. Une pitié qu'elle n'avait pas trouvée chez son enfant. C'est pourquoi, elle a décidé de porter plainte contre lui. «Je ne supporte plus sa brutalité contre moi et contre sa sœur», a-t-elle déclaré les larmes aux yeux. Après le décès de son père, selon la plainte de la mère, Ahmed n'était plus ce garçon sans problèmes. Il insultait sa mère et sa sœur, les maltraitait et les frappait de temps en temps à coups de poing. Pourquoi ? «Il nous surveille, moi et sa sœur. Je lui demande à chaque fois de nous laisser tranquille. Mais en vain. Il nous frappe», a affirmé la mère qui n'arrivait pas à tenir ses larmes. Pourquoi te comportes-tu ainsi? «Non, M. le juge, je ne les ai pas frappées», s'est-il disculpé en expliquant qu'un malentendu avait éclaté entre lui, sa mère et sa sœur sans qu'il ne les touche. «Et pourtant, elle a commencé à crier et à demander secours tout en se réfugiant chez les voisins», a-t-il ajouté. Pourquoi ce malentendu ? «Je leur interdisais de recevoir des hommes à la maison… », a-t-il confié au tribunal. Selon Ahmed, sa mère a aménagé sa demeure en maison close où des clients passaient des moments de plaisir. «Non, M. le juge, je n'ai jamais accueilli d'hommes ni de femmes chez moi. Je n'ai plus qu'une seule fille et il ne veut pas que je lui cherche un homme pour le mariage», a-t-elle déclaré. Une déclaration qui a fait rire l'assistance. Tout d'un coup, Ahmed s'est jeté sur la tête de sa mère et l'a baisée avec les larmes aux yeux. La mère l'a excusé devant le tribunal. Et pourtant, il a été condamné à trois mois de prison ferme.