Les différentes manifestations de soutiens aux civils palestiniens ou à l'armée israélienne dans son aventure dans la Bande de Gaza augurent d'une dangereuse radicalisation des comportements en France. Il y a une vraie angoisse française qui ne cache plus son nom, c'est celle de voir les conséquences de la guerre meurtrière que livre l'armée israélienne dans la Bande de Gaza prendre racine dans les banlieues françaises, déstabiliser le vivre ensemble entre différentes communautés et provoquer tensions et affrontements sociaux qui viennent s'ajouter à la déjà insupportable crise économique que vit le pays. Les différents signaux qui ont allumé la lampe rouge ont été suffisamment forts pour créer une alerte sérieuse. Il y a eu d'abord des agressions anonymes contre des lieux de cultes juifs et musulmans suivies d'agressions caractérisées contre des jeunes d'origine maghrébine, victimes de la ligue de défense juive, un groupuscule connu pour sa violence. Mais il y a eu surtout des slogans menaçants qui ont accompagné les différentes manifestations de soutiens aux civils palestiniens ou à l'armée israélienne dans son aventure dans la Bande de Gaza et qui augurent d'une dangereuse radicalisation des comportements. Le gouvernement a vite réagi à la nouvelle donne qui se profile à l'horizon. Après avoir donné consigne à ses ministres de dénoncer l'instrumentalisation éventuelle d'un tel conflit, le Premier ministre François Fillon qui vient d'exprimer le souhait implicite de rester à Matignon jusqu'à 2012, organise ce jeudi un comité interministériel contre le racisme et l'antisémitisme avec ces mots d'ordre : «C'est normal qu'il y ait des manifestations, ce n'est pas normal qu'il y ait des agressions(…) On a décidé de les combattre avec la plus extrême rigueur parce que cela ne fera rien avancer et que c'est totalement contraire aux intérêts de ceux qui sont d'origine palestinienne ou israélienne, de confession juive ou musulmane». La démarche du Premier ministre est portée par la position de nombreuses associations de défense des droits de l'Homme qui viennent de signer un communiqué dans lequel elles appellent à refuser «toute instrumentalisation communautaire» de la situation à Gaza faisant le constat que ce «conflit n'est ni religieux ni ethnique mais bien politique et territorial». Seul hic dans cette affaire la polémique suscitée mais vite étouffée par les propos du porte-parole de l'UMP Dominique Paillé qui avait «mis en cause des responsables politiques qui jouent aux apprentis sorciers en prenant fait et cause pour tel ou tel camp» et d'ajouter cette phrase qui fait polémique : «Il est inadmissible de vouloir (...) saisir l'occasion d'événements dramatiques qui se situent en dehors de notre territoire pour exprimer, à travers de la violence, des sentiments de haine». Patrick Gaubert, président de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme, s'est insurgé contre cette approche qui, selon lui, «met en parallèle actes antisémites et actes islamophobes» et «laisse entendre que les deux seraient liés au conflit du Proche-Orient» tout en rappelant que les «dégradations de cimetières et lieux de cultes musulmans (étaient) antérieures de beaucoup à l'actuel conflit à Gaza et ne sauraient être amalgamées à celui-ci». Deux autres évènements majeurs montrent l'intérêt que portent les autorités françaises à la situation à Gaza et qui sont tous destinés à dégoupiller les frustrations et à éviter l'importation de ce conflit dans le territoire français. Le premier est le débat parlementaire qui s'est tenu hier mercredi à l'Assemblée nationale. A ce sujet et bien avant ce débat, les parlementaires français ont décidé d'envoyer au Proche-Orient, du 1er au 3 février, une délégation de cinq députés représentant les différents groupes politiques et dirigée par le président de la commission des Affaires étrangères, Axel Poniatowski. Cette commission vient d'auditionner sur le sujet et l'ambassadeur d'Israël Daniel Shek et la déléguée générale de la Palestine à Paris Hind Khoury. Le second est la tenue ce jeudi soir, au Quai d'Orsay, siège du ministère des Affaires étrangères, sous la houlette de Bernard Kouchner d'une réunion dîner-débat des organisateurs de la conférence internationale sur l'aide des Palestiniens de décembre 2007 pour examiner la possibilité d'une nouvelle conférence en prenant en considération les dernières et meurtrières accélérations de l'histoire de ce conflit.