Sous la pression de la guerre israélienne contre Gaza et ses habitants et les nombreuses manifestations pour la dénoncer, les responsables français ont tenté chacun à sa manière d'exprimer l'approche française. à lire les déclarations des responsables français pour qualifier les drames qui se jouent dans la bande de Gaza, la forte impression est donnée que le langage est contenu, que l'expression est contrainte et que chaque commentaire prononcé doit contenir ses rubriques obligatoires de critiques contre le Hamas pour en faire un commentaire politiquement correct. Tous semblent appliquer une consigne : s'indigner de la grave détérioration humanitaire que vivent les Palestiniens de Gaza, mettre la responsabilité première sur le dos des islamistes du Hamas et, pour les plus téméraires, s'interroger sur l'usage excessif et disproportionné de la force par l'armée israélienne. Lors de sa récente tournée au Proche-Orient à la recherche d'impraticables chemins de la paix, Nicolas Sarkozy avait donné le ton en indiquant que le Hamas portait une lourde responsabilité dans ce qui se passe à Gaza. Et depuis, sous la pression de la guerre israélienne contre Gaza et ses habitants et les nombreuses manifestations pour la dénoncer, les responsables français ont tenté chacun à sa manière d'exprimer cette approche française. Rama Yade, la secrétaire d'Etat aux droits de l'Homme, est parmi les voix qui ont élargi le plus loin le cercle de la critique : «La deuxième semaine de guerre vient de s'achever. Le Hamas est en grande partie responsable de cette situation, mais Israël n'est pas tout à fait innocent et je crois qu'il est normal qu'on demande que la martyrisation de Gaza cesse». Les propos des Rama Yade faisaient vaguement écho à ceux du Premier ministre François Fillon qui a été parmi les premiers responsables français à oser évoquer la souffrance des Palestiniens : «Si la France a condamné dès le début les tirs de roquettes effectués à partir de Gaza sur le territoire israélien, comme elle condamne les tirs de roquettes qui ont été effectués à partir du territoire libanais, nous pensons aussi que rien ne justifie les souffrances qui sont aujourd'hui imposées aux populations civiles qui vivent enfermées dans la bande de Gaza». La classe politique française dans son ensemble justifie ces prises de postions par des craintes de devoir importer ce conflit à domicile. Pour Fadela Amara, secrétaire d'Etat à la politique de la ville, ce conflit n'est ni «ethnique» ni « religieux» mais «politique». Pour elle : «La réaction d'Israël est disproportionnée par rapport à ce qui s'est passé mais en même temps je crois qu'il faut faire très attention au fait qu'on ne doit pas justifier au bout de la chaîne des actes antisémites dans notre pays sous prétexte qu'il se passe des choses terribles là-bas». Ce même constat a été brandi par le socialiste Arnaud Montebourg pour justifier l'absence de son parti aux manifestations de soutien aux Palestiniens. Il affirme que l'absentéisme du PS du pavé parisien au profit des communistes et de l'extrême gauche, c'était dans le but de ne pas «risquer de cautionner des mots d'ordre communautaristes (...) Il y a eu des propos, des slogans antisémites. Il y a eu aussi des expressions islamophobes». Même si le parti socialiste n'a pas jugé politiquement utile de se joindre à la vague de manifestations pour dénoncer la politique israélienne à Gaza, sa toute nouvelle première secrétaire avait tenté de rattraper le coup en formulant une des critiques les plus acides à l'égard du gouvernement israélien : «Nous devons ici dire au gouvernement d'Israël qu'il est scandaleux de ne pas suivre les résolutions de l'Onu, qu'il est scandaleux d'affamer Gaza comme il le fait aujourd'hui et que son attitude ne peut être acceptée par aucun démocrate porteur de paix dans le monde». Le discours gouvernemental et aussi celui d'une partie de l'opposition sur Gaza semble obsédé par une seule réalité : ne pas tomber dans le piège de devoir défendre ou justifier les actions du Hamas que la France et l'UE considèrent comme un mouvement terroriste. Quitte à justifier l'injustifiable. Cette situation lie les mains et rétrécit la marge de manœuvre de la diplomatie française. Après avoir été contraint de sous-traiter la négociation pour une trêve humanitaire à l'Egypte, la diplomatie française semble réduite, comme tout le monde, à attendre la formation de l'équipe de Barack Obama et sa nouvelle politique au Proche-Orient pour voir le bout du tunnel.