La démission de Mohamed Larbi Messari n'a rien changé. Le parti de l'Istiqlal a décidé de reporter son congrès à fin novembre. Une décision stratégique justifiée par des difficultés organisationnelles. Mohamed Larbi Messari a présenté, vendredi 3 octobre, sa démission du comité exécutif du Parti de l'Istiqlal. L'ancien ministre de la Communication justifie cette décision par ce qu'il considère comme une volonté de priver les Istiqlaliens de leur droit à disposer de leur parti à travers le report du congrès. Dans la lettre de démission qu'il a envoyée aux instances compétentes du parti, M. Messari appelle toutes les personnes soucieuses des intérêts de l'Istiqlal à «se pencher sérieusement sur la situation du parti et sur l'avenir du pays». La démission de M. Messari intervient suite à la décision prise par certains leaders istiqlaliens de plaider devant la commission préparatoire du parti le report du congrès national. Cette assemblée, initialement prévue pour le 31 octobre, devait être reportée, hier, au 20 novembre prochain. M. Messari s'y oppose parce qu'il considère qu'il s'agit juste d'une manière de vouloir mieux préparer la reconduction de Abbas El Fassi à la tête du parti. C'est une lecture que partagent aussi Moulay Mhamed El Khalifa et Abdelhamid Aouad. Ces derniers, à l'instar de M. Messari, avaient déjà gelé leur appartenance au comité exécutif depuis plusieurs mois. La lettre de démission de M. Messari n'est donc qu'une manière d'officialiser une démission de fait. Cela ne change rien. Ce qui signifie que le but de la manœuvre est plus politicien que politique. M. Messari veut certainement sonder, au profit du clan se positionnant contre la reconduction de Abbas El Fassi pour un troisième mandat, le taux de représentativité de cette tendance au sein du parti pour avoir une idée sur son ampleur avant le congrès. Plusieurs décisions en dépendent. Pour M. Messari et ceux qui soutiennent sa rébellion – il est le premier à la manifester publiquement – il s'agit d'une tactique visant à contourner la volonté des Istiqlaliens. «Il ne s'agit pas d'un report mais d'un ajournement de trois semaines pour des raisons purement organisationnelles», précise Mohamed Saâd El Alami, ministre istiqlalien, avant d'ajouter : «Nous pensions pouvoir être prêts pour fin octobre, mais il s'est avéré que le rythme des préparations a baissé pendant le mois de Ramadan et nous nous sommes vus dans l'obligation de nous accorder un sursis de trois semaines». Toutefois, le report du congrès peut être plus dicté par des raisons externes qu'internes. Il y a, d'abord, le congrès de l'USFP. La deuxième mi-temps de la grand-messe socialiste est prévue le 7 novembre prochain. Ce congrès pourrait en effet avoir un grand impact sur le paysage politique national. L'éventualité d'un retrait de cette formation de la majorité gouvernementale n'est pas à exclure. Cela dépend, évidemment, de la nature du nouveau leadership qui se dégagera de ce congrès. En tout cas, les voix revendiquant le retour à l'opposition sont de plus en plus nombreuses au sein de la formation socialiste. D'un autre côté, il y a le Parti authenticité et modernité (PAM) dont on ignore encore les projets politiques à court terme. Tiendra-t-il son congrès constitutif comme il était initialement prévu ou va-t-il fusionner dans le RNI ? La réponse à cette question devrait être connue avant fin novembre. Le parti de l'Istiqlal dont le secrétaire général a été nommé Premier ministre dans le cadre du respect de l'usage démocratique se trouve dans une situation difficile puisque les plus grandes décisions stratégiques qui devront être prises lors du congrès dépendent de la tournure que vont prendre les choses au sein de l'USFP et du PAM. Reporter le congrès à fin novembre permet au parti d'y voir plus clair. Cela aidera les Istiqlaliens à prendre les décisions qu'il faut, notamment en ce qui concerne la reconduction de Abbas El Fassi. Un choix qui nécessite un amendement des statuts du parti auquel s'opposent plusieurs membres influents. Face à ces derniers, le clan favorable à la reconduction pense que le fait de perdre la direction du parti présente plusieurs risques dont, éventuellement, la perte de la primature. «Imaginons ne serait-ce qu'un instant, que l'USFP décide de se retirer de la majorité, que Abbas El Fassi n'est plus le dirigeant de l'Istiqlal et rappelons-nous la nouvelle donne constituée par la fusion parlementaire entre le RNI et le PAM. Il y a là toutes les conditions pour faire tomber le gouvernement et revoir la composition de la majorité», alerte un dirigeant istiqlalien. Les difficultés d'ordre organisationnel ne sont donc pas la raison principale du report du congrès. Il s'agit plutôt d'une question de stratégie politique et partisane. Attendre pour voir ce que feront les autres et décider ensuite avec plus de visibilité.