La fusion entre les groupes parlementaires du RNI et du PAM intervient au lendemain de la débâcle électorale du parti de Hassan Benaddi. S'agit-il d'un repli stratégique ou d'une révision des priorités de cette formation ? Analyse. Le Rassemblement national des indépendants (RNI) et le parti Authenticité et Modernité (PAM) ont décidé de fusionner leurs deux groupes parlementaires tant à la première qu'à la deuxième Chambre. Cette décision a été annoncée lors d'un point de presse organisé par les dirigeants des deux formations politiques. Devant une salle comble – plus de personnalités politiques que de journalistes – le président du RNI, Mustapha Mansouri, et le secrétaire général du PAM, Hassan Benaddi, ont expliqué les raisons et les objectifs de la fusion. « C'est une initiative qui est en harmonie avec les Discours royaux appelant à la rationalisation du paysage partisan et qui reflète la philosophie des deux partis basée sur le partenariat et l'union », expliquent les deux intervenants. Il s'agit donc, selon les deux dirigeants, d'une initiative qui vise à participer à la création de pôles politiques forts conformément aux orientations royales. Elle n'est donc pas circonstancielle et ne répond pas à un agenda politique déterminé. Ceux qui estiment que la nouvelle plate-forme d'action parlementaire est une sorte de repositionnement sur l'échiquier parlementaire pour exiger ou préparer un remaniement de la majorité sont d'emblée rassurés. «Cette initiative vise à consolider l'alliance soutenant le gouvernement dirigé par M. Abbas El Fassi et à apporter une contribution qualitative à l'action parlementaire dans ses volets législatif et de contrôle», indique le communiqué conjoint annonçant la fusion des groupes parlementaires des deux partis. La majorité constituée par le Premier ministre n'est pas visée par l'initiative. Un message clair. Mais, au sein du gouvernement, une autre préoccupation se fait sentir : si la constitution d'un groupe conjoint RNI-PAM ne remet pas en cause la composition de la majorité elle-même, elle est de nature à chambouler l'ordre en ce qui concerne le quota de chaque groupe en nombre de portefeuilles. En cas de remaniement ministériel, le fait d'avoir deux groupes parlementaires de 75 députés et 83 conseillers sera certainement pris en considération. D'où la panique qui frappe certains ministres notamment ceux qui se sentent fragiles à cause de la faiblesse de leur rendement. Ce qui n'est pas fondé pour certains analystes. «Cela aurait été le cas, si le PAM n'était pas déjà présent au sein du gouvernement, car il aura fallu y remédier, sachant que la situation du PAM passe de celle d'un parti qui soutient la majorité à un parti qui fait partie de la majorité», estime un observateur. En effet, le gouvernement compte déjà un membre appartenant au PAM à savoir le titulaire de l'Enseignement, Ahmed Akhchichine et d'autres membres qui sont à la fois membres du RNI et sympathisants, parfois malgré eux, du PAM. Réunis, leur nombre correspond parfaitement au quota auquel ils ont droit. La majorité gouvernementale n'est donc pas, en apparence, concernée par cette nouvelle donne. Politiquement, la fusion des deux groupes parlementaires est certainement liée à la débâcle du PAM lors des élections législatives partielles du 19 septembre 2008. La défaite a été lourde et son impact sur l'équipe dirigeante du PAM a été très dur puisqu'elle a révélé la véritable dimension du nouveau-né du paysage partisan marocain. Il fallait une issue politique à la situation pour réduire l'impact de la défaite et baisser la tension dans les rangs du parti. Constitué de plusieurs tendances et d'une multitude de clans hétérogènes, le PAM était au bord de l'éclatement, il ne pouvait survivre à un choc aussi fort. D'autant plus que l'un des éléments essentiels de sa composition politique, à savoir le PND, avait déjà démarré le processus insurrectionnel avant le scrutin. La fissure existait déjà. La défaite électorale ne pouvait que l'élargir davantage. Aussi chercher un refuge partisan politiquement fort et structurellement stable était la seule solution qui se présentait devant la direction du PAM. Pour ce faire, le RNI est le réceptacle idéal. Mais, cette initiative suscite déjà deux préoccupations principales au sein des cadres et des militants du RNI. La première est celle de savoir ce que gagne leur formation de cette main tendue aux naufragés du PAM et la deuxième concerne le risque de déstabilisation que court le parti suite à l'introduction de nouveaux éléments qui auront certainement leurs propres exigences en matière de responsabilités et de pouvoir décisionnel. « Il suffit de voir la sérénité et la quiétude affichées par Mustapha Mansouri lors du point de presse pour se rendre compte que ces détails ont été réglés et que l'opération est plus une absorption qu'une fusion. Une sorte de phagocytose qui ne porte aucun risque pour l'organisme phagocytant », estime un analyste. Cette dernière opération chimique PAM-RNI pourrait heureusement se clore, si les conditions politiques venaient à s'exacerber, par une simple absorption du PAM par le RNI. Cela mettra fin ainsi à une expérience prometteuse mais qui ne s'est pas donnée les moyens notamment humains irréprochables de sa réalisation. Si les troupes du PAM sont finalement logées et cantonnées au RNI, on peut concevoir que les créateurs de cette dynamique, intense mais fugace, retrouvent naturellement — pour ceux qui en avaient — des responsabilités au service de l'état. C'est plus conforme à leur histoire personnelle et à leur profil. Une page serait, alors, tournée.