Le PS et les centristes de François Bayrou animent une vraie campagne sous le thème du renvoi d'ascenseur entre Nicolas Sarkozy et Bernard Tapie. Pour Nicolas Sarkozy et ses ministres qui viennent de partir en vacances un album de Carla Bruni sous le bras, le repos estival a de fortes chances d'être imprégné d'une affaire qui est en passe de se muer en véritable scandale d'Etat sur lequel la gauche et les centristes sont en train de souffler avec force. C'est celui de Bernard Tapie d'obtenir des indemnités record dans l'affaire qui l'opposait depuis des années à la banque du Crédit Lyonnais. Ces indemnités se comptent par centaines de millions d'euros qui une fois payées les arriérés et les dettes laissent dans l'escarcelle de Bernard Tapie la coquette somme de vingt millions d'euros. Bernard Tapie est ce héros urbain des années 90 qui avait partagé sa vie entre l'entreprise, la télévision, la politique et le sport, allant jusqu'à illustrer à la caricature la dérive des années fric sous l'ère du socialiste François Mitterrand. Ce destin se fracassa avec la même fulgurance de son ascension. Les faillites se succèdent et Bernard Tapie dut effectuer un séjour en prison en 1997 pour un match de football truqué entre son équipe de l'époque l'Olympique de Marseille et Valenciennes. Depuis que l'Etat a renoncé à exercer un recours en annulation contre la sentence de ce tribunal arbitral qui a offert à Bernard Tapie une telle somme d'argent, les soupçons de connivence au sommet de l'Etat fleurissent un peu partout. Le PS et les centristes de François Bayrou animent une vraie campagne sous le thème du renvoi d'ascenseur entre Nicolas Sarkozy et Bernard Tapie. François Bayrou se révèle être un des plus virulents et des plus pertinents critiques de cette affaire : «C'est une décision qui n'a aucun précédent (…) la plus haute juridiction française, la Cour de cassation, réunie dans sa formation la plus solennelle, a jugé, il y a moins de deux ans, que la demande d'indemnisation de M. Tapie n'était pas fondée (…) Il a fallu que cette décision soit prise au plus haut niveau de l'Etat et qu'elle traduise ainsi des ententes et des connivences de toute nature». Les socialistes profitent de cette affaire pour enfoncer un clou supplémentaire entre Nicolas Sarkozy et une opinion française remontée par la dégradation de son pouvoir d'achat : «En pleine crise du pouvoir d'achat, les contribuables français seront «ravis» d'apprendre que le gouvernement accepte sans barguigner de renflouer M. Bernard Tapie de 400 millions d'euros (…) Tout dans cette affaire relève du copinage d'Etat :l'interventionnisme du président de la République et des plus hautes autorités de l'Etat, le dessaisissement de la justice ordinaire au profit d'une justice privée; le refus de faire appel de sa décision éminemment discutable». Les socialistes exigent la mise en place d'une commission d'enquête parlementaire pour faire toute la lumière sur les conditions de la formation d'une tel tribunal arbitral et du jugement rendu au profit de Bernard Tapie. Les détracteurs de Nicolas Sarkozy l'accusent d'avoir traité avec une extrême bienveillance le dossier Tapie à cause du soutien de ce dernier lors de la présidentielle. La stratégie de défense de gouvernement est de nier toute intervention du chef de l'Etat dans cette affaire. Et c'est la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, qui se propose de dégoupiller ce que certains seraient tentés d'appeler et de percevoir comme un «Tapiegate». Christine Lagarde se veut aussi mordante que limpide : «Est-ce que vous croyez que j'ai une tête à être copine avec Bernard Tapie ? Point numéro un. Et est-ce que vous pensez que j'ai reçu des instructions pour le protéger ? Non (…) Je suis avocate de formation, je suis citoyenne et je suis redevable de l'utilisation des deniers de l'Etat». A une question directe du Journal «Libération» : «Mais vous avez aussi reçu des instructions de Nicolas Sarkozy pour choisir cette solution arbitrale…» Christine Lagarde est catégorique : «Non. Je n'ai jamais évoqué cette question avec lui. J'ai donné des instructions et n'en ai reçu aucune». L'affaire Tapie prend de l'ampleur à cause des sommes en jeu, mais surtout parce qu'elle intervient dans un contexte où le président de la République est ouvertement accusé par son opposition d'être un adorateur intrépide de l'argent, d'établir des proximités amicales avec les puissants du Cac 40. Signe de la gêne occasionnée, Nicolas Sarkozy n'a toujours pas brisé son silence pour commenter l'affaire Tapie.