Le Président syrien Bachar Al Assad a renvoyé l'ascenseur à son hôte Nicolas Sarkozy en décrivant le rôle que pourrait jouer la France dans les processus de paix de la région. Bachar Al Assad sera sans conteste une des attractions politiques les plus scintillantes du sommet de la Méditerranée que Paris s'apprête à organiser. Non seulement sa présence signe la fin d'une longue page glaciale entre Paris et Damas, mais elle illustre à merveille la brise nouvelle qui semble souffler sur le Proche-Orient depuis qu'Israéliens et Syriens ont débuté des pourparlers indirects sous parapluie turc et surtout depuis que l'imbroglio libanais a été déverrouillé par l'élection d'un président de la république. Même si sa présence aux festivités du 14 juillet est encore objet de polémiques plus au moins politiciennes, sa parole était attendue. Le président syrien vient de choisir le journal «Le Figaro», un journal de droite proche de la majorité présidentielle, pour y délivrer son message et sa bonne parole. Bachar Al Assad les débute par un constat qui doit faire hurler de rage l'ancien président Jacques Chirac : «Nous assistons à une rupture entre la politique actuelle de la France et la politique du passé. Cette nouvelle politique est plus réaliste et correspond davantage aux intérêts de nos deux pays. C'est une base solide pour renouer une relation saine». Dans cet entretien, Bachar Al Assad a renvoyé l'ascenseur à son hôte Nicolas Sarkozy en décrivant le rôle que pourrait jouer la France dans les processus de paix de la région. Une volonté claire d'impliquer Paris dans le round des négociation à venir partant de cette certitude «Mon impression est que (M. Sarkozy) est enthousiaste à l'égard de ces négociations et pour que la France y joue un rôle direct. S'il me le confirme, je l'inviterai aussitôt à soutenir directement ce processus de paix». A plusieurs reprises, l'allusion est clairement faite au rôle que pourrait jouer la France dans la nouvelle configuration. Celle qui voit le démarrage prochain de négociations directes entre Israéliens et Syriens alors que la conjoncture politique attend l'arrivée d'une nouvelle administration américaine. Sur ce point, Bachar Al Assad ne semble pas opérer une révolution mais un certain recadrage qui doit remplir d'aise et de fierté la nouvelle diplomatie française «Le plus important dans des négociations directes, c'est leur parrainage. Bien sûr, le rôle des États-Unis est essentiel, mais celui de l'Europe est complémentaire. Et quand nous parlons du rôle politique de l'Europe, la France en est à l'avant-garde». Si Paris et Damas semblent jouer la même symphonie de la paix et de la réconciliation à la veille du sommet de la Méditerranée, les divergences persistent. Nicolas Sarkozy a toujours fait de la prise de distance de la Syrie à l'égard de l'Iran un objectif stratégique publiquement avoué et assumé. Bachar Al Assad lui répond avec délicatesse : «Quand on parle de stabilité et de paix dans la région, l'Iran occupe nécessairement une place importante. Qui plus est, l'Iran soutient la Syrie dans ses différentes causes. Il est tout à fait naturel que nous ayons des relations étroites avec ce pays». Le président syrien n'oublie pas d'enfoncer un clou douloureux dans le scaphandre de la realpolitik suivie par les grandes puissances dans un passé récent : «Quand une bonne partie des pays occidentaux ont soutenu Saddam Hussein dans sa guerre contre l'Iran, la Syrie, elle, a pris position contre lui. C'est aussi une des raisons pour lesquelles nous entretenons de bonnes relations avec l'Iran». Du Japon où il participe au sommet du G8, Nicolas Sarkozy vient de tordre le cou à un préjugé bien établi. Contrairement aux apparences, Bachar Al Assad n'est pas le seul à tirer un bénéfice politique de sa présence à Paris, bien la diplomatie française qui avoue la présence du leader syrien est un indéniable atout de réussite de cette grand-messe méditerranéenne. Avec ses propres mots , Nicolas Sarkozy vient d'en faire la confession éclatante : «Je voudrai dire combien je suis heureux de la quasi-unanimité de nos partenaires sur l'opportunité d'inviter le président syrien. La quasi-totalité des dirigeants israéliens (…) tous m'ont dit c'est une chance d'inviter la Syrie et inutile de préciser que l'invitation de la Syrie a beaucoup compté dans la décision du président Abdelaziz Bouteflika de venir».