Un cessez-le-feu entre le Hamas et Israël est entré en vigueur le 18 juin grâce à la médiation effectuée par l'Egypte entre le mouvement d'Ismaïl Haniyeh et le gouvernement israélien. Celui-ci s'apprête par ailleurs à conclure un échange de prisonniers avec le Hezbollah. Un an après la conquête par le Hamas de la bande de Gaza, un calme précaire est revenu à la frontière entre Israël et ce territoire, le plus densément peuplé au monde. Au terme de longues et difficiles tractations, le chef des services de sécurité égyptiens, le général Omar Soleiman, est parvenu à ses fins. Le Hamas et Israël ont conclu une trêve (Tahadiyeh), en principe valable pour six mois, mettant un terme au blocus économique de Gaza et à la dangereuse poursuite des tirs de roquettes Kassam et de missiles Grad sur les localités israéliennes du Néguev occidental. Bien qu'il se trouve en position difficile, du fait de son implication dans un scandale politico-financier, « l'affaire des enveloppes», le Premier ministre israélien Ehoud Olmert a réussi à faire accepter à son gouvernement, plutôt réticent, et à une opinion publique tétanisée la conclusion de cet accord avec le mouvement de Khaled Meshaal et Ismaïl Haniyeh. Pour ce faire, Ehoud Olmert a largement tablé sur la lassitude des habitants du Néguev occidental tout en laissant croire que son ministre de la Défense, le travailliste Ehoud Barak, et le chef d'état-major, le général Gaby Ashkenazi, ne lui laissaient pas d'autre choix. Les deux hommes ont en effet publiquement affirmé qu'il était hors de question de déclencher une opération terrestre d'envergure contre la bande de Gaza, compte tenu de son éventuel coût trop élevé en vies humaines. Ce ralliement de l'appareil militaro-sécuritaire au choix tactique de la trêve explique les réactions plutôt modérées de la classe politique israélienne, toutes tendances confondues, à l'annonce de cet accord. A droite, les uns feignent de croire que la «Tahadiyeh» ne durera pas et sera vite rompue. Les autres condamnent en public mais reconnaissent, en privé, qu'elle correspond aux attentes des habitants du Néguev occidental. Seul le vice Premier ministre Kadima, Haïm Ramon, pourtant tenu pour une «colombe», a fait entendre une voix divergente en parlant, pour la condamner, d'une «victoire de l'islamisme radical». D'autres observateurs préfèrent parler d'une «alliance des faibles». Durement frappé par les opérations ponctuelles menées par l'armée israélienne, le Hamas chercherait un répit pour reconstituer son arsenal et son appareil militaro-sécuritaire. Il doit aussi tenir compte des souffrances bien réelles endurées par les populations civiles de Gaza, victimes des conséquences dramatiques du blocus économique du territoire. Quant à Israël, qui n'a pu garantir la sécurité de ses citoyens, il doit réviser l'ensemble de sa stratégie et attendre la mise au point du système anti-missiles «Dôme d'acier» dont les premiers essais ont commencé. S'ajoute à cela la pression très forte exercée par les opinions publiques palestinienne et israélienne sur le Hamas et le gouvernement de Ehoud Olmert pour parvenir à la concrétisation d'un échange entre le caporal israélien Gilad Shalit, détenu à Gaza depuis le 25 juin 2006, et 450 Palestiniens incarcérés en Israël. La probable conclusion d'un accord entre le Hezbollah et Israël concernant un autre échange de détenus a joué un rôle de catalyseur. Le Hamas peut difficilement se montrer «plus royaliste que le roi» et pratiquer une surenchère à laquelle la milice chiite, auréolée de ses succès lors de la Seconde Guerre du Liban, a elle-même renoncé. La résolution du « dossier Shalit» lèverait pat ailleurs le dernier obstacle à la reprise du dialogue interpalestinien entre le mouvement de Khaled Meshaal et l'Autorité palestinienne, offrant ainsi à Mahmoud Abbas la possibilité de mettre sur pied un nouveau gouvernement d'union nationale. Cette solution permettrait à Abou Mazen de refaire l'unité autour de lui et de se ménager une porte de sortie en cas d'échec, de plus en plus probable, des discussions israélo-palestiniennes, actuellement au point mort. Or la réunification du camp palestinien est d'autant plus urgente que ses dirigeants, toutes tendances confondues, ne cachent pas leurs inquiétudes quant aux conséquences, à court et moyen termes, d'un possible succès des négociations, menées sous l'égide de la Turquie, entre Israël et la Syrie. Même si aucune rencontre entre Ehoud Olmert et Bachar Al Assad n'est prévue, contrairement à certaines rumeurs, ces discussions créent un nouveau climat et changent considérablement la donne géopolitique au Proche-Orient. Les Palestiniens l'ont compris et tirent d'ores et déjà certaines leçons.