Elle était fille de joie et il était chauffeur de taxi. Leur relation de «travail» a cédé la place à une relation amoureuse, puis à un mariage qui a fini dans le sang. Quand elle était à son dix-huitième printemps, Meriem s'est retrouvée dans le gouffre de la plus ancienne profession sur terre. Comme toutes femmes, Meriem n'a jamais pensé être une fille de joie. Mais la pauvreté l'a rendue ainsi. Entraîneuse dans les bars et les boîtes de nuit de la capitale spirituelle, Fès, elle était toujours à la disposition de ses clients : de l'ivresse au partage du même lit dans une maison close ou chez le client. Le plus important pour elle c'était de gagner de l'argent. Fidèle cliente d'un chauffeur de taxi, Khaled, elle l'appelait à chaque moment qu'elle désirait aller à son lieu de « travail » ou qu'elle s'apprêtait à retourner chez elle au quartier Essaâda où elle occupait seule une petite maison. Elle était sa cliente durant plus d'une année au point qu'elle a commencé à le considérer comme un ami intime. Elle lui racontait ses problèmes notamment avec ses voisins qui ne cessaient de l'humilier. Elle lui parlait de ses soucis, ses incidents avec les clients, ses rêves qu'elle n'a jamais pu réaliser…Au fil des jours, la relation entre le chauffeur de taxi et sa fidèle cliente a commencé à se développer. Une année et demie plus tard, Meriem était rassurée. Elle avait enfin trouvé une personne à qui elle pouvait faire confiance. Elle a commencé à l'inviter chez elle et à partager avec lui les mêmes verres de vin et le même lit. Bref, une relation d'amour est née entre eux. Âgé de seulement vingt-trois ans, Khaled lui a interdit d'aller aux bars et s'est engagé à lui payer tous ses frais à savoir le loyer, la nourriture, l'habillement…En outre, il lui avait promis de fonder avec elle un foyer conjugal. Sans l'abandonner, il a tenu sa promesse. Tous les deux ont mis le pas vers un nouveau chemin. C'est du moins ce que Meriem pensait puisqu'elle a cessé de boire et de se droguer. Elle a également porté le voile et a commencé à faire la prière. Par contre, Khaled n'a pas pu tourner le dos à l'alcool et au haschich. Il retournait, quotidiennement, chez lui avec un sachet en plastique plein de bières et quelques grammes de haschich dans sa poche. Il ordonnait à sa femme de prendre soin de lui au moment où il s'enivrait et se droguait. Elle s'abstenait et le sollicitait d'abandonner ses vices. En vain. Bien qu'ils aient mis au monde une fille et un garçon, il a continué à s'enivrer et se droguer. La dernière fois, quand il est rentré chez lui avec le vin et la drogue à la main, elle n'a pas pu retenir ses nerfs. Elle a commencé à crier devant ses deux enfants et lui a demandé de s'enivrer en dehors de la maison. Il n'a pas réagi au départ, il s'est contenté de la dévisager. Tout d'un coup, et comme un taureau, il a commencé à lui rappeler qu'elle n'était qu'une fille de joie à la disposition de n'importe quel homme et qu'il l'avait sauvée quand tout le monde ne désirait que sa chair tendre. Khaled n'arrivait pas à se contrôler au point qu'il a mis sa main sur un marteau déposé sur le réfrigérateur, l'a saisi pour lui assener quelques coups sur sa tête. Les deux enfants ont perdu leur mère qui a rendu l'âme et leur père a été traduit devant la justice.