Pour Michelle Alliot-Marie, qui est aussi ministre du Culte, il s'agit de la plus aiguë des crises qu'elle aura à gérer. La rébellion menée par deux grands symboles de l'Islam algérien en France a remis Michelle Alliot-Marie dans son statut de négociateur pour tenter de dégoupiller la crise. Il se peut que des semaines entières passent sans que Michelle Alliot-Marie, la discrète ministre de l'intérieur, ne se signale à l'intention des médias et de l'opinion. Sans aucun doute, un mélange d'inefficacité de son service de communication et de volonté de rester à l'ombre pour ne pas attirer le mauvais œil. Elle a brisé son silence récemment en annonçant la dissolution du groupe de supporteurs parisiens des Boulogne Boys, dont certains membres sont poursuivis en justice dans l'affaire de la banderole raciste anti-Ch'ti (les habitants du nord Pas-de-Calais). Elle s'est félicitée bruyamment de la rapidité de l'enquête qui avait abouti à l'arrestation d'un maniaque sexuel multirécidiviste impliqué dans l'assassinat de la jeune Suédoise Susanna Zetterberg. Elle s'est fait remarquée par les échotiers en provoquant une colère froide et des mots très sanguins de Nicolas Sarkozy lorsqu'il apprit que sa ministre de l'intérieur avait préféré aller assister au spectacle du chansonnier satirique Nicolas Canteloup à l'Olympia plutôt que de rester sagement regarder sa grande émission de télévision destinée par les communicateurs de l'Elysée à signer les retrouvailles et la réconciliation d'un président mal aimé des Français. Elle a donné dans la posture rassurante à Alger lorsque devant une presse nerveuse et sourdement inquiète quant il s'agit d'évoquer le rôle qui sera dévolu à l'Algérie dans la nouvelle architecture méditerranéenne en cours de préparation : «L'UPM risque, si le plan de Sarkozy va à son terme, de marginaliser, voire d'exclure, l'Algérie. L'UPM sera ordonnancée de telle sorte (...) qu'à partir du 13 juillet, l'Algérie se verrait isolée dans la nouvelle configuration euro-méditerranéenne», écrit la presse algérienne. «Méfiez vous des rumeurs. Ce grand projet n'est pas encore réalisé», avait lancé MAM. Durant son voyage à Alger et même si le sujet n'a pas été retenu comme un vecteur de communication pour des raisons évidentes de non-reconnaissance officielle d'un quelconque rôle des Etats du Maghreb dans la gestion de l'Islam de France, Michelle Alliot-Marie a certainement évoqué la rébellion menée par deux grands symboles de l'Islam algérien en France que sont la grande mosquée de Paris dirigée par Dalil Boubakeur et la grande mosquée de Lyon dirigée par Kamel Kabtane. Ces deux imminences refusent de participer aux prochaines élections pour renouveler les instance dirigeantes du Conseil français du culte musulmans (CFCM). Le boycott est mû par une seule logique : conserver les acquis et maintenir le statu quo. Pour Michelle Alliot-Marie, qui est aussi ministre du Culte, il s'agit de la plus aiguë des crises qu'elle aura à gérer depuis qu'elle avait quitté le ministère de la Défense pour la Place Beauvau si on exclut la parenthèse des émeutes dramatiques et sanglantes de Villiers-le-Bel. Depuis son retour d'Alger et à la veille de la démonstration de force que compte déployer au Bourget l'Union des organisations islamiques de France que dirige le couple originaire du Maroc Fouad Alaoui et Haj Touhami Briz , Michelle Alliot-Marie à repris son bâton de négociateur pour tenter de dégoupiller la crise. Il s'agit pour elle de dérouler l'argumentaire le plus efficace pour convaincre les réticents de reprendre part au jeu électoral. Les proches de ce dossier décrivent le recteur de la mosquée de Paris comme étant prêt à céder sur toute la ligne pourvu que le ministère de l'intérieur lui promet une présidence d'honneur du CFCM ainsi qu'une vice-présidence effective à son lieutenant Chems-Eddine Hafiz. Si Nicolas Sarkozy avait réussi à imposer à deux reprises Dalil Boubakeur à la tête du CFCM, Michelle Alliot-Marie ne semble avoir ni la volonté politique ni les moyens de réitérer cet exploit, très loin de donner une bonne image de la démocratie représentative. Pendant ce temps , le Rassemblement des musulmans de France ( RMF), présenté comme une force concurrente de la mosquée de Paris continue de tenir ses réunions comme si les élections du 8 juin allaient avoir lieu à la date prévue avec ses animateurs comme Mohamed Moussaoui, Anour Kbibech Lemsibak Abdellatif, … sans doute convaincus que Michelle Alliot-Marie sortira d'ici là victorieuse de la tourmente de l'Islam de France.