L'ancien ministre d'Etat à l'Intérieur, Driss Basri, est décédé le lundi 27 Août, à Paris où il vivait depuis sept ans. Driss Basri a été inhumé, hier mercredi, après la prière d'Addohr, au cimetière «Achouhada», à Rabat. Les obsèques du défunt se sont déroulées en présence de son fils Taoufiq et des membres de sa famille. Le gouvernement a été représenté par le ministre de l'Intérieur, Chakib Benmoussa. Le cœur de cet ancien ministre de l'Intérieur avait lâché le lundi 27 Août, dans un hôpital, à Paris, après une longue maladie. Il est décédé à l'âge de 69 ans, laissant derrière lui un parcours controversé. Né en 1938 à Settat, la ville principale de la plaine de la Chaouia, cet homme a réussi à gravir tous les échelons de la Sûreté nationale pour devenir ministre de l'Intérieur de 1979 à 1999, date à laquelle il a été remercié par SM le Roi Mohammed VI. Nombreux étaient ceux à s'interroger comment un simple commissaire de police, préposé au service du général Dlimi, à l'ombre duquel il a vécu, ait pu gagner l'estime du regretté souverain Hassan II pour occuper, plus de vingt ans durant, le poste de ministre de l'Intérieur, ou de «super ministre», comme s'amusaient à l'appeler ses adversaires. C'est que Driss Basri a su s'imposer en maître incontesté des postes stratégiques du pays, au point d'avoir tenu sous sa poigne, et pour longtemps, deux portefeuilles très sensibles, à savoir l'Intérieur et l'Information. Cette double posture, Basri ne la doit toutefois pas au hasard. L'homme a été rodé et érodé par tant d'années d'expérience dans les locaux de la Sûreté nationale. En janvier 1973, il est nommé chef de l'unité du contre-espionnage (la Direction générale de la surveillance du territoire-DST) et un an après, il est désigné au secrétariat d'Etat à l'Intérieur. En 1979, il est officiellement nommé ministre de l'Intérieur. Patron de ce que l'on appelait «la mère des ministères», en raison du pouvoir qu'il possédait, Basri était également celui qui tirait les ficelles au ministère de l'Information. Un cumul qui lui a valu une véritable «volée de bois vert» de la part de l'ancienne opposition, pour qui le nom de Basri aurait été lié aux pires maux qui aient frappé les Marocains durant ce que l'on appelle communément «les années de braise», cette chape de plomb qui s'est abattue sur les Marocains, notamment dans les années soixante-dix et la première moitié des années quatre-vingt. C'est sous Basri que les pires violations des droits de l'Homme ont été perpétrées. Disparitions forcées, détentions arbitraires, tortures, humiliations, bref, un noir et long chapitre d'exactions que le Maroc d'aujourd'hui essaie de réparer à la faveur du nouveau règne. L'année 1999, qui marque le départ de Basri, s'inscrit justement en rupture avec ce cortège de violations. Cette année a vu crouler l'un des symboles puissants de l'ancien règne, au gré d'une nouvelle ère respectueuse des droits de l'Homme, acquise aux libertés, individuelles et collectives, à cheval sur la modernité, et intraitable sur la démocratie et les valeurs de progrès. Limogé, Basri s'est choisi un «point de chute» à Paris où il a cru, à tort, pouvoir mener sa «fronde» contre le nouveau règne. Au fond de son «exil» parisien, Basri multiplie les sorties médiatiques contre son propre pays. Curieusement, on lui a trouvé des «affinités» avec l'ancien chef du gouvernement espagnol José Maria Aznar sur l'affaire du terrorisme; ou plus encore avec le président Bouteflika sur le dossier du Sahara, en prônant, ironie du sort, «l'option du référendum» (!) et un «certain droit du peuple sahraoui à l'autodétermination». Sur des chaînes étrangères, l'homme, qui était en charge de la question de l'intégrité territoriale du Royaume, ne parlait plus du «Sahara marocain» mais du «Sahara occidental». Dans le chapitre des droits de l'Homme, et plus particulièrement dans l'affaire Mehdi Ben Barka, il accuse, lors d'une comparution à Paris, le Maroc de ne pas vouloir coopérer avec la France pour faire la lumière sur l'ancien leader de la gauche marocaine. De gesticulation en gesticulation, l'homme avait fini par se décrédibiliser.