La direction du Polisario est aujourd'hui plus que jamais isolée. Confrontée à une vague de défections parmi ses cadres, elle doit également faire face à la colère d'une population exaspérée par un régime corrompu et dictatorial. de l'indéboulonnable Mohamed Abdelaziz. «Mohamed Abdelaziz a partout des villas en Europe, et plus particulièrement en Espagne. Il a envoyé ses enfants étudier en Amérique, alors que ceux des Sahraouis séquestrés sont, ou déportés vers Cuba, ou confinés dans les camps de la mort, à Tindouf». Le propos est d'un ex-dirigeant du Polisario, surnommé «le philosophe de la Révolution sahraouie», Yahdyih Daïfallah, qui a rejoint, il y a quelques mois, la mère-patrie : le Maroc. Ce propos résume un sentiment de colère largement partagé dans les camps de Lahmada, traduit, tantôt par des défections d'anciens cadres qui ont échappé à l'étau pour rejoindre le pays d'origine, tantôt par des soulèvements populaires qui se sont multipliés ces dernières années. Dans les 15 dernières années, plus du tiers de la direction du Polisario est rentré dans le Royaume du Maroc, sans compter évidemment bien d'autres centaines d'anonymes et des sans-grade qui n'en pouvaient plus supporter l'immobilisme entretenu, à dessein, par Mohamed Abdelaziz, resté cramponné à ses prérogatives de président et SG du Front Polisario depuis 1976. Il faut dire que Mohamed Abdelaziz a su jouer la carte des rivalités fratricides au sein de sa direction pour se maintenir à la tête du pouvoir. Le duel qui a éclaté au début 1990 entre Omar Hadrami, qui a rallié le Maroc plus tard, et Bachir Mustapha Sayed, le frère d'El Ouali, fondateur du Polisario, offre ici une preuve éclatante. Mohamed Abdelaziz a fait sien le credo inquisitorial : «Avec moi ou contre moi». Ce n'est surtout pas un hasard si les membres du secrétariat national d'aujourd'hui sont les mêmes membres de l'ex-comité exécutif et de l'ex-bureau politique du Front Polisario. Le droit à la différence ne fait pas partie du champ lexical de Mohamed Abdelaziz. Tous les moyens sont bons pour réduire à néant les opposants. Le cas d'Ould Fuedal Boussaoula, qui vient d'être libéré par Alger, après avoir été arrêté en décembre 2006, puis condamné en février 2007 à 4 ans de prison pour une fausse affaire de contrebande, est très parlant. Ould Fuedal a, semble-t-il, commis un grave «délit» en s'opposant à la corruption effective du régime de Mohamed Abdelaziz, au clientélisme et au favoritisme qu'il a cultivés dans les camps de Lahmada. Ce constat est partagé par l'ensemble de la population sahraouie qui ne peut plus supporter une situation de pourrissement, de blocage, d'injustice et de laisser-aller qui ne profite qu'à une poignée de personnes assoiffées de pouvoir. Pour une opération médicale à l'étranger, des études, ou même le droit de sortir des camps, les habitants sont obligés de «quémander» les faveurs des dirigeants. Tout le monde comprend évidemment pourquoi les soulèvements populaires se sont multipliés ces derniers temps dans les camps de l'horreur. Des soulèvements réprimés à huis clos, et souvent avec une violence inouïe.