Le sit-in annoncé par l'AMDH a eu lieu. Les manifestants ont exigé que les tortionnaires soient jugés. Ils ont aussi appelé à l'adoption d'une «constitution démocratique». Pour les militants des droits de l'Homme, ce 10 décembre 2001 est à marquer, à coup sûr, d'une pierre blanche. En effet, après l'annonce par le Souverain de la création de l'institution de «Diwan Al Madhalim», vieille revendication des organisations des droits de l'Homme, les yeux étaient tournés vers l'avenue Mohammed V de Rabat où l'AMDH avait appelé à observer un Sit-in. A 20 heurs 30, sous une pluie fine, ils étaient près de 400 militants de l'Association Marocaine des Droits Humains (AMDH, indépendante) à se rassembler sous l'œil vigilant mais néanmoins discret des éléments des forces de l'ordre, tapis dans leurs estafettes bleues flambants neuves. Ce rassemblement effectué à la place de la poste en plein centre de la capitale a vu également la participation de représentants des diplômés chômeurs et des familles de détenus islamistes et de disparus. Les manifestants qui arboraient des pancartes et des banderoles réclamant un véritable Etat de droit, ont scandé des slogans appelant notamment à faire la lumière sur les graves atteintes aux droits de l'Homme dans les années 1960-1980 et à adopter une « constitution démocratique». Les militants de l'AMDH ont également allumé 53 bougies en référence au 53ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme célébré dans le monde. L'ambiance était bon enfant et la satisfaction se lisait sur les visages des membres du bureau de l'AMDH. «Nous ne pouvons que nous féliciter parce qu'il n'y a pas eu d'intervention de force ni d'acte de violence de la part de la police», nous a déclaré Fouad Moumni, vice-président de l'AMDH. L'attitude des autorités a tranché cette année avec celle de l'année dernière où le sit-in a été dispersé violemment et plusieurs membres de l'AMDH poursuivis pour trouble à l'ordre public. «Je pense que les responsables des ministères de l'Intérieur et la Justice ont pris acte de la faute qui a été commise l'année dernière», nous a confié Fouad Moumni. De son côté, Abdelhamid Amine, président de l'AMDH, a insisté dans une déclaration à la presse sur la poursuite de la lutte «contre l'impunité pour faire éclater la vérité sur les violations gravissimes des droits humains. Les personnes sur lesquelles pèsent de fortes présomptions dans les crimes économiques et politiques doivent rendre compte à la justice». Encore une fois un pas est franchi vers la construction de l'Etat de droit. En effet, ce n'est pas tous les jours que des militants des droits de l'Homme, exigent, en plein centre de la capitale, que de hauts responsables militaires et policiers, toujours en activité, soient jugés pour atteinte aux droits de l'Homme. Sur ce point, l'AMDH a manifestement gagné son pari.