Au-delà des péripéties de ces faux clowns et véritables incultes, il y a une véritable question sur la création à poser. Le niveau général a regressé sur au moins trois registres : le théâtre, l'humour et la chanson. Ils croient que parce que le pôle public leur offre chaque Ramadan l'opportunité d'incommoder les téléspectateurs marocains, de se faire insulter contre les trois-quart de leur revenu annuel, ils sont artistes. La troupe Fahid-Khiari s'est enrichie cette année de la fille Fadili, après avoir perdu Saïd Naciri tout à la promotion de son dernier navet. Hanane Fadili, entourée de toute la famille, a fait dans le vulgaire, le nivellement par le bas a donc bien fonctionné. Fahid a déclaré à la presse que «les critiques des journaux ne me touchent pas parce que personne ne les lit, par contre le public m'arrête tout le temps dans la rue pour me féliciter». Khiari, lui, a fait dans la théorie et cela donne : «Nous sommes un pays sous-développé, notre administration est sous-développée, notre football aussi, alors je fais de l'art du même niveau». Ces arnaqueurs ne méritent pas un débat. Ceux qui nous les composent chaque année seraient criminels s'ils n'échafaudaient pas un plan B pour le prochain Ramadan. En fait, leurs arguments sont inacceptables. Le premier concerne la production nationale. Il est spécieux, la médiocrité étant à rejeter quelle que soit sa nationalité. Le second concerne le taux d'écoute, il est fallacieux. Ce n'est pas par choix que les Marocains regardent nos deux télés lors du Ftour. Repenser cette grille est un acte de gestionnaire en bon père de famille. Un public captif, pendant une heure et demie, chaque jour, durant un mois par an, même les grandes chaînes n'osent en rêver. Le pactole publicitaire qui en découle est important pour l'équilibre financier de nos deux chaînes. Or, la médiocrité risque de changer les modes de consommation télévisuelle, ceci nonobstant la mission de service public, normalement toujours impartie au service public. Au-delà des péripéties de ces faux clowns et véritables incultes, il y a une véritable question sur la création à poser. Le niveau général a regressé sur au moins 3 registres : le théâtre, l'humour et la chanson. Le cinéma est sauvé par le brassage avec les Marocains d'ailleurs sans que cela n'exclut des catastrophes telles que «Abdou chez les Almohades» ou «Rhésus», voire «La rue du Caire» que son propre metteur en scène a jugé inapte à la projection. L'enseignement arabisé n'a produit que ces machins. Mais réduire toute la problématique de la création à la qualité de l'enseignement de base est réducteur. Il y a lieu de faire de véritables études introspectives sur les blocages d'une société qui connaît un vent de liberté nullement restitué au niveau de la création. Le Maroc des années de plomb a produit Abdellah laroui, Chahramane, El Kaghat, Baz et Bziz, Nass El Ghiouane etc… Celui des espaces de liberté conquis ne produit que des idioties navrantes. L'une des pistes serait que les peuples ne sont créatifs que quand un projet collectif ou alternatif suscite l'adhésion de la majorité. Ceux qui ne pensent qu'à «brûler», qui ne charrient que le mépris d'eux-mêmes et de leur environnement sont incapables d'enfanter un Almodovar ou un Coluche. C'est une piste à explorer avec ses implications politiques et sociales.