Le gouvernement Jettou est la cible des tirs croisés des syndicats. Ces derniers font volte-face sur le volet social, dans une conjoncture marquée par des élections partielles et une rentrée politique qui démarre sur les chapeaux de roues. L'équipe Jettou est de nouveau montrée du doigt par les centrales syndicales. Toutes obédiences et couleurs confondues, ces dernières ont multiplié les attaques contre l'exécutif et, notamment, suite à une série d'augmentations des prix de quelques produits et services : carburants, sucre, transports, entre autres. Pour les syndicats, le gouvernement ne fait qu'aggraver la dégradation des conditions de vie des employés et grever le pouvoir d'achat des ménages. Cette semaine a été marquée par une vertigineuse diffusion de communiqués particulièrement "coléreux". L'UMT (Union marocaine du travail) fustige, pêle-mêle, et a posteriori, la mise en place de l'horaire continu et l'opération "Départ volontaire". Le syndicat de Mahjoub Benseddik demande l'instauration d'un salaire minimal de 3.000 DH et la baisse de l'IGR. Les autres centrales syndicales suivent le mouvement et condamnent les décisions "impopulaires" du gouvernement. Les syndicats liés aux partis politiques membres de la coalition gouvernementale ne sont pas en reste. Dans un communiqué "enflammé", le 5 septembre 2006, l'UNMT (Union nationale marocaine du travail), dirigée par le PJD Mohamed Yatim, tire à boulets rouges sur le gouvernement qui recourt aux "solutions de facilité" dans le domaine social. Même le CMDH (Centre marocain des droits de l'Homme, dirigé par un autre PJD) prend la défense d'une catégorie d'éléments de la Direction générale de la Sûreté nationale qui n'a pas bénéficié des dernières augmentations salariales et qui "croule sous la masse de travail", autre conséquence de l'opération "Départ volontaire". Pour les observateurs du champ politique national, le scrutin pour le renouvellement du tiers de la Chambre des conseillers n'est pas étranger à cette "soudaine" frénésie qui se saisit et des partis et des syndicats. Selon un responsable syndical, les récentes et multiples protestations font partie intégrante de la campagne électorale pour le scrutin partiel du 8 septembre ; opération pour laquelle toutes les "cartouches" sont bonnes. La CDT n'a-t-elle pas fait de son soutien aux Palestiniens et Libanais un argument de cette même campagne. L'autre lecture possible de cette "fiévreuse campagne" peut être recherchée du côté des crises successives qui secouent le monde syndical. A la CDT, on ne compte plus les scissions. L'UMT ne s'en porte pas mieux. L'UGTM se cherche encore une voie après l'éviction de Abderrazzak Afilal et la FDT est toujours à la quête d'un positionnement sur l'échiquier syndical. Sauf que, plusieurs avis s'accordent là-dessus, les syndicats auraient poussé le bouchon trop loin ; quelques-uns d'entre eux ayant revendiqué un nouveau dialogue social. Pour une source gouvernementale, le bilan social de l'équipe Jettou est plus que positif. Notre interlocuteur rappelle une série de mesures décidées après des réunions marathoniennes supervisées par Driss Jettou notamment avec les syndicats de l'enseignement et de la santé qui ont débouché sur de nouveaux acquis pour ces deux catégories de personnels. Lors du dernier Conseil de gouvernement, le Premier ministre a décliné les lignes directrices de la politique de son équipe pour 2007 avec une priorité pour le social, notamment en ce qui concerne l'élargissement de la couverture médicale. L'une des récentes réussites de Driss Jettou : amener plusieurs collectifs de diplômés-chômeurs à suspendre leurs sempiternelles manifestations à Rabat. Près de 900 d'entre eux vont ainsi être intégrés d'ici septembre 2007 dans la fonction publique ou dans les différents programmes faisant l'objet d'un partenariat Etat-secteur privé. Quelques semaines auparavant, le Premier ministre avait réparti près de 3.000 postes budgétaires sur plusieurs départements pour la titularisation des temporaires-permanents. Le 12 juillet dernier, le Premier ministre avait présenté le bilan social de son équipe et ses perspectives d'action pour 2012. Devant la Chambre des conseillers, il a déclaré, entre autres, qu'une grande importance et des moyens conséquents seront octroyés à l'artisanat, qu'un projet de 3 milliards DH permettra la création de 117.000 emplois d'ici 2015, mais aussi qu'il y aura, à l'horizon 2008, généralisation des TIC aux établissements scolaires et que 10.000 ingénieurs seront annuellement formés d'ici 2010. Driss Jettou s'est également engagé à persévérer dans la réalisation des logements sociaux, mais aussi à ce que le RAMED devienne une réalité dans les plus brefs délais. Le milieu rural, a précisé M. Jettou, bénéficie d'un accès à l'eau potable avec un taux de 73 % alors que le taux d'électrification y a atteint 84 % en plus des 1.500 km de routes rurales construites chaque année. Après son intervention devant une Chambre des conseillers presque vide, certains partis politiques l'ont accusé ouvertement de mener une pré-campagne électorale. Il se retrouve, aujourd'hui, avec son équipe, face à d'autres critiques autrement plus virulentes. A un an des élections, tout est permis.