Incité par un influent actionnaire à s'associer avec l'alliance Renault-Nissan, le groupe General Motors va étudier la faisabilité d'une alliance à trois avec le duo franco-japonais. Une aubaine qui pourrait s'ouvrir à GM. Bien qu'il soit encore numéro 1 mondial, General Motors (GM) traverse l'une des pires crises financières de son histoire. Le géant américain qui regroupe les marques (Buick, Cadillac, Chevrolet, GMC, Holden, Hummer, Opel, Pontiac, Saturn, Saab et Vauxhal) a subi en 2005 une perte nette de 10,6 milliards de dollars. Et pour cause. Ses ventes nationales sont en perte de vitesse, alors que les Etats-Unis constituent le plus important marché automobile mondial avec une moyenne de 17 millions de véhicules neufs vendus chaque année. La faute à qui ? A une certaine concurrence japonaise qui continue à gagner du terrain au pays de l'Oncle Sam. Mais GM reste également pénalisé par des coûts salariaux élevés. Aussi et pour s'en sortir, le premier groupe automobile mondial n'avait d'autre choix que de recourir au «dégraissage», méthode courante et solution presque inévitable. La firme, installée à Detroit, s'est donc engagée dans une restructuration prévoyant la fermeture de 12 usines et la suppression de quelque 35.000 emplois. Des ouvriers qui, pour la plupart, auront quitté leur poste d'ici la fin de l'année en cours. Dans ce contexte pour le moins morose, une alliance avec un autre groupe, qui lui, se porte bien, serait la bienvenue. C'est ce qu'a pensé et proposé Kirk Kerkorian, l'un des principaux actionnaires de GM. En effet, le milliardaire américain, qui détient à lui seul 9,9 % du capital de GM et dispose d'un siège au sein de son conseil d'administration, a adressé au P-DG du groupe, Rick Wagoner, une lettre dans laquelle il plaide pour une alliance à trois avec Renault SA et Nissan Motor, ces deux derniers formant depuis 1999 une alliance sous forme de participations croisées (Renault détient 44,4% de Nissan et le japonais possède 15% du français). Plus précisément, la lettre présentée par Tracinda, la holding d'investissement de M. Kerkorian, propose la formation d'un comité chargé d'examiner «immédiatement et complètement» la possibilité d'un partenariat dans le cadre duquel Nissan et Renault prendraient «une participation minoritaire importante» dans le groupe américain. «Nous pensons que participer à un partenariat-alliance mondial avec Renault et Nissan pourrait permettre à General Motors de dégager d'importantes synergies et économies, ce qui profiterait à l'entreprise et créerait de la valeur pour l'actionnaire», écrit Tracinda dans ledit document. Selon l'agence japonaise Kyodo News (soit une source indépendante au duo franco-japonais), Renault et Nissan pourraient envisager de prendre en commun jusqu'à 20% du capital de GM. A l'annonce de cette donne (dont rien n'a encore été décidé), l'action GM s'est envolée à la Bourse de Wall Street, gagnant jusqu'à 10,9% en début de séance, le vendredi dernier. Réagissant à ladite lettre par un bref communiqué, GM a assuré que la proposition en question est «sérieusement prise en considération» et qu'elle sera bientôt soumise au conseil d'administration. De son côté, Carlos Ghosn, le patron de Renault et Nissan, qui a eu des entretiens avec M. Kerkorian et des hauts responsables de Tracinda, s'est refusé à tout commentaire. Cependant, un porte-parole de la marque au losange a fini par préciser : «Nous ne sommes pas dans un schéma de fusion. La proposition de Kirk Kerkorian est que GM puisse rejoindre l'alliance Renault-Nissan». Puis d'ajouter que l'alliance Renault-Nissan est une «alliance ouverte, qui n'a jamais été limitée à deux partenaires (…) Dans des circonstances favorables et avec des partenaires appropriés, l'alliance pourrait être élargie». En gros, Renault-Nissan (n'exclut pas une alliance avec GM, et il semblerait même que M. Ghosn y soit favorable. Si elle se concrétisait, cette alliance aurait -théoriquement- toutes ses chances pour réussir, ne serait-ce que sur le plan industriel, avec à la clé d'intéressantes économies d'échelle de part et d'autres. C'est ce qu'estiment de nombreux analystes financiers à l'image de Himanshu Patel, de la banque JP Morgan, qui a déclaré : «Un tel partenariat pourrait bénéficier aux deux parties sur le front des produits». Actuellement, la forte compétitivité de Renault et Nissan s'illustre dans les segments des petits véhicules et des berlines de taille moyenne, alors que GM compte surtout comme atout sa capacité à produire de grosses voitures. A ne plus en douter, l'alliance Renault-Nissan a non seulement réussi, mais elle suscite désormais l'intérêt des autres groupes automobile, y compris le plus grand d'eux.