Conséquence du tour de vis marocain, l'immigration clandestine se rapporte de plus en plus sur l'axe reliant la ville mauritanienne de Nouadhibou aux Iles Canaries. La cinquantaine de cadavres de Subsahariens repêchés ces derniers jours au large des côtes mauritaniennes, a sonné le tocsin. Le drame de l'immigration clandestine s'est bien déplacé au Sud, fuyant la surveillance policière de plus en plus technologique des polices espagnole et marocaine, et les caméras de détection qui rendent Algésiras quasiment infranchissable. Bref, face à ces dispositifs, Nouadhibou, ville presqu'île, ouverte sur les Canaries, attire de plus en plus d'immigrés. Les morts ne se comptent plus. Plus de 1000 depuis le mois de novembre dernier, selon les ONG. Face à cet afflux, Nouakchott vient de se doter d'un plan d'action contre l'immigration clandestine et contre la pêche illégale. Sous l'ancien régime, ces deux phénomènes étaient quasi liés. Les bateaux chinois, russes et coréens sans licence pour la plupart et les embarcations de fortune utilisés par des pêcheurs traditionnels depuis la ville sénégalaise de Saint Louis (700 km plus au Sud) offraient un coktail flou où se mêlaient les trafics de tout genre. D'où cette stratégie ventilée entre plusieurs responsables, du chef d'etat-major de l'Armée national, au Directeur général de la sûreté, en passant par le ministre des Pêches et de l'Economie maritime, le Secrétaire général du ministère de la Défense et la direction de la Douane. Le plan prévoit le renforcement des points de contrôle aux frontières, dans les eaux territoriales , les ports et les aéroports, des procédures de suivi et de démantèlement des réseaux de passeurs dans le pays et de la coopération sous-régionale, régionale et internationale pour identifier les éléments de ces réseaux opérant à l'étranger. Un état-major régional de coordination, dirigé par des militaires et basé à Nouadhibou pilotera l'ensemble du réseau. Le plan a été rendu public ce vendredi 10 mars, à la fin d'une réunion présidée par le Premier ministre, Sidi Mohamed Ould Boubakar, en présence des principaux chefs des corps militaires, des ministres de l'Intérieur et de la Pêche. Avant d'être refoulés, les immigrés seront placés dans des sites temporaires d'hébergement et de transit. La stratégie est sortie de l'ombre suite à de nombreux incidents recensés depuis la fin 2005. Depuis cette date, les reconduites à la frontière sont monnaie courante. Mercredi dernier, 76 immigrés sénégalais, ont été arrêtés à bord d'une pirogue en bois qui faisait cap vers l'eldorado canarien. A Nouadhibou, durant ces deux dernières semaines, la police a interpellé 500 candidats au départ, ghanéens et nigérians pour la plupart, mais aussi sénégalais maliens, gambiens et bissau guinéens. Cet afflux soudain résulte du tour de vis opéré par le Maroc, et des patrouilles renforcées dans le détroit de Gibraltar. Face à cette fermeté, l'axe Nouadhibou –Iles Canaries, devient privilégié pour les immigrés qui n'hésitent pas à descendre plus au sud, à partir des Iles du Cap Vert par exemple. Actuellement, l'on recense environ 10 000 clandestins à Nouadhibou. Soit, autant de casse-tête pour les gardes-côtes qui n'ont pas encore trouvé pour le moment la solution. Samedi 11 mars, cinquante huit immigrants africains, partis cinq jours auparavant de Nouadhibou, ont été interpellés à leur arrivée à bord d'une embarcation aux côtes de l'île canarienne de Tenerife. Le même jour, dans l'après-midi, une embarcation transportant 34 autres candidats est localisée au large de l'île de Fuerteventura, à plusieurs miles, grâce à des équipements techniques du système intégral de surveillance extérieure (SIVE).