Des membres de la police italienne ont été pris en flagrant délit de passage à tabac d'un jeune Marocain près de Bologne. Une vidéo de la scène, diffusée sur Internet, suscite une indignation générale. Amnesty demande enquête et poursuites. Trois membres des forces de l'ordre italiennes (deux carabinieri et un policier) ont été pris en flagrant délit de passage à tabac d'un jeune Marocain. Cela se passait de bon matin, dimanche 19 février 2006, au quartier "Braida" à Sassuolo, une paisible localité de 40.000 âmes dans la région de Bologne. Moulay Amer Oulkadi Idrissi, visiblement éméché et proférant des insultes, est abordé par ses trois tortionnaires à bord d'une Alfa bleu foncé. Quelques mètres plus loin, se tenait un groupe d'immigrés dont l'un aura la présence d'esprit de filmer la scène grâce à son téléphone portable muni d'une caméra vidéo. Le résultat est des plus terribles: de longues et insupportables minutes où trois policiers s'acharnent sur un homme ne pouvant visiblement pas tenir sur ses jambes. Déjà à moitié dénudé, à force d'être traîné par terre, il finira par ne garder que le strict minimum : un caleçon et des chaussettes. Cela ne constituera nullement des circonstances atténuantes pour lui aux yeux des policiers italiens. Les coups de pieds continueront. Les policiers semblent redoubler d'ardeur à force de multiplier les coups. Les cris de Moulay Amer Oulkadi Idrissi n'y changeront rien. Son calvaire cessera au moment où, ayant perdu connaissance, il est finalement embarqué par ses tortionnaires qui ne semblent pas avoir conscience que leur "exploit" avait été consigné et qu'il finira par éclater à la figure de tout le corps de police et des carabinieri. L'état de santé de Moulay Amer Oulkadi Idrissi, hospitalisé, nécessitera des soins sur une période de plus d'une semaine. Plusieurs jours plus tard, la vidéo en question est diffusée, sur Internet, à large échelle. Et c'est l'indignation générale du sort réservé à cet homme que les autorités italiennes présentent comme étant en situation irrégulière et à antécédents judiciaires. Comme si cela pouvait justifier l'ignoble sort qui lui avait été réservé. Des chaînes de télévision rechigneront à exploiter ladite vidéo alors que la presse, de gauche notamment, se saisira de l'affaire pour dénoncer l'ignominie. La seule réaction du Maroc pour le moment est celle émanant de l'ambassadeur du Royaume qui a saisi la diplomatie italienne pour avoir des explications. Sinon les "regrets" du peuple et du gouvernement italiens. Des explications, il n'y en aura pas de la part des autorités italiennes à l'écriture de ces lignes. La seule disposition qui a été prise à l'encontre des tortionnaires de Moulay Amer Oulkadi Idrissi est leur mise en congé. Dans une récente réaction, Amnesty International Italie a officiellement demandé l'ouverture d'une enquête pour "usage excessif et illégitime de la force" par les policiers italiens. Pour cette ONG, le traitement infligé à Moulay Amer Oulkadi Idrissi ne pourrait que figurer parmi les actes de torture et de traitements humiliants et dégradants prohibés par les législations européennes et les conventions onusiennes contre la torture. Cette affaire intervient au moment où l'Italie est engagée dans une campagne électorale sur fond de critiques déjà formulées à l'encontre du gouvernement et notamment envers le ministre de l'Intérieur Giuseppe Pisanu. Ce dernier s'est rendu célèbre par plusieurs initiatives visant à rendre la vie difficile aux immigrés. C'est à lui d'ailleurs que revient l'initiative d'une des lois les plus impopulaires d'Italie. Entrée en vigueur à la fin de l'été 2005, cette loi prévoit l'extradition de toute personne soupçonnée de sympathie avec des organisations terroristes. L'imam marocain Bouchta Bouriki, actuellement à Khouribga, en a fait les frais. Expulsé de Turin où il avait toutes ses affaires, il vit toujours un déchirement familial en attendant que la justice italienne puisse trancher.