Le Premier ministre a pris son déjeuner du mercredi 22 février dans une ferme de volailles à Kénitra. Le menu était exclusivement composé de poulet. Une manière de signifier que la volaille nationale est en bonne santé. Bonne opération de communication de la fédération interprofessionnelle du secteur avicole (FISA). Face à la chute de la consommation du poulet et partant des prix en raison de la psychose de la grippe aviaire, cette fédération a tenu à rassurer les consommateurs que nous sommes. Et c'est le Premier ministre lui-même, accompagné d'une délégation ministérielle restreinte, qui a pris les devants en effectuant, mercredi 22 février, une visite dans une ferme d'élevage de volaille dans la région de Kénitra. D'emblée, Driss Jettou a précisé “qu'aucun cas de grippe aviaire n'a été enregistré au Maroc“. Cette visite a été suivie d'un déjeuner sur place mitonné par un traiteur du cru. Au menu, du poulet bien sûr. Un vrai festival. En entrée, pastilla au poulet, tagine de poulet aux amandes et aux œufs durs comme plat de résistance et flanc à base d'œufs en guise de dessert. Le poulet en fête. Marocains n'ayez pas peur, régalez-vous, le poulet national a la pêche, qu'il soit aux hormones ou fermier. C'est le sens du message de ce repas champêtre exceptionnel sur lequel les éleveurs misent pour redresser la situation d'une filière touchée de plein fouet. Les professionnels attendent surtout un geste du gouvernement pour qu'il débloque une indemnisation conséquente. Un fonds spécial a été mis en place mais on ne connaît pas le montant de la subvention. Cette opération de charme de la FISA intervient alors que le comité interministériel chargé du contrôle de la grippe aviaire a décidé de confiner les volailles dans un rayon de trois kilomètres tout en recommandant la “vaccination des oiseaux des parcs zoologiques nationaux et ceux des élevages d'autruches, d'outardes et de faucons“. Objectif du confinement : empêcher le contact avec les oiseaux migrateurs et freiner la propagation du virus parmi les élevages de volailles. Cette mesure est généralement prise après l'apparition des cas de l'épizootie dont le Maroc est, officiellement, toujours à l'abri. Or, nombre d'oiseaux ont été découverts morts ces derniers temps dans certains coins du pays. Selon la version officielle, les analyses des prélèvements effectués sur les carcasses n'ont pas conclu à la présence du virus H5N1. Pour les responsables du ministère de la Santé et de l'Agriculture, le décès des oiseaux est dû à la vague de froid exceptionnelle qui a traversé le Royaume. Cependant, les mêmes scènes d'oiseaux sauvages décédés ont eu lieu dans plusieurs pays européens- réputés du reste par la rigueur du climat- où les analyses au laboratoire de Londres ont confirmé la présence du H5N1. Difficile de croire que le Maroc reste encore épargné alors qu'il représente une escale pour les oiseaux migrateurs! La maladie avance et se propage. La Tunisie vient de faire à son tour une macabre découverte : 26.000 oiseaux morts ! Les autorités de ce pays se sont empressées avant même le résultat des analyses d'écarter la grippe aviaire. Difficile de croire que le Maghreb continue à faire l'exception à moins que le virus ne soit doté d'une intelligence géostratégique qui lui permet de choisir les États à frapper !