L'exploitation du pétrole mauritanien commence en mars. Mais l'or noir a déjà fait sa première victime. Zaydane Ould Hmaidah, le tout premier ministre mauritanien du pétrole et de l'énergie, a été démis de ses fonctions puis immédiatement placé en garde à vue. Zaydane Ould Hmaidah est en prison. L'ex-ministre mauritanien du Pétrole et de l'Energie est confronté depuis dimanche 15 janvier 2006 aux interrogatoires des inspecteurs de l'instance chargée du contrôle des comptes et des finances. Trois mois d'investigations et d'audit auraient suffi pour faire pâlir la bonne étoile de cet homme à qui tout réussissait jusque-là. Accusé d'avoir modifié les avenants des contrats pétroliers signés avec les compagnies pétrolières internationales sans en aviser quiconque, le ministre a vu se prolonger, mardi dernier, sa garde à vue de 48 heures supplémentaires. De ce dont il est reproché à ce membre de la tribu des Oulad Ghailane, les spéculations sont nombreuses. Le rapport de la commission est pour le moins accablant : onze irrégularités dont, entre autres, la réduction des impôts et avantages, la diminution de la part de l'Etat et la suppression de la clause de garantie de bonne fin, l'un des rares moyens de pression dont disposerait un pays producteur de pétrole contre les firmes exploratrices. La société australienne aurait réussi entre autres à obtenir à ce que les coûts de toute prospection pétrolière engagée en dehors du site de Chinguitti et qui se révélerait infructueuse soient défalqués sur le compte du consortium auquel fait partie l'Etat mauritanien. De source non officielle, on estime que la modification qu'aurait apporté le ministre à l'avenant en question priverait le pays d'un manque à gagner de 150 millions de dollars par an. Comment le ministre a-t-il pu signer d'importantes dispositions sans que le Conseil des ministres et les instances élues n'en soient avisés ? Pourtant, il y a encore quelques mois, Zaydane Ould Hmaidah était l'un des ministres les mieux en vue en Mauritanie.C'est sous sa gouverne, alors qu'il était ministre des Mines et de l'Energie, que la bonne nouvelle a jailli à 80 kilomètres au nord-ouest de Nouakchott, dans une zone off shore baptisée Chinguitti et un peu plus au Sud dans un site dénommé Thiof Interlocuteur privilégié des sociétés pétrolières internationales de par ses fonctions, Ould Hmaidah et son équipe étaient crédités de bons points sous l'ancien régime. Contrairement au Tchad et à la Guinée Equatoriale, deux pays qui ont opté pour des accords de concession, Nouakchott avait négocié un accord de participation. Dans le consortium pétrolier ayant pour tête de pont Woodside, la Mauritanie détient en principe 12% des parts. «Nous sommes propriétaires du pétrole alors que dans un accord de concession, on ne serait que percepteur de 12,5% sous forme de royalties », se vante un spécialiste du pétrole mauritanien interrogé par la presse étrangère. La qualité supposée de ces accords n'aura-t-elle été finalement qu'un paravent pour le ministre ? Il aurait favorisé le petit poucet du secteur, l'australien Woodside contre les géants comme Exon Mobil et Total? La société australienne qui publie régulièrement des communiqués depuis le début de la crise nie toute liaison dangereuse avec l'ancien ministre, clamant que tous les accords signés étaient faits dans la transparence. Ce n'est pas ce que pense la rue mauritanienne. Pour les observateurs avertis, cette arrestation marque un tournant dans la toute récente histoire pétrolière de Mauritanie. Le pays entier fêtera son premier baril au mois de mars 2006 au plus tard. Dans les premières années, la production se fera au rythme de 75 000 barils par an avant d'atteindre rapidement la barre des 250 000 barils.