Une trentaine de films seront coproduits par an par les deux chaînes de télévision à partir de janvier 2006. Cette mesure, accueillie avec une grande joie par les professionnels de cinéma, a fait l'objet d'un débat fructueux à Tanger. Les professionnels de cinéma se sont donné rendez-vous samedi à la salle de conférences «Menzah» (Tanger) pour cerner les enjeux de l'aide que peut apporter la télévision à la production cinématographique. Organisée par le Centre cinématographique marocain, cette rencontre a été l'occasion pour les producteurs, les réalisateurs et autres talents, de livrer leurs analyses sur une mesure qui promet de donner une nouvelle impulsion à la production cinématographique nationale : l'engagement de la TVM et de 2M, sur la base d'un cahier des charges, à contribuer à la production d'une trentaine de films par an. Noureddine Saïl, qui a présidé cette rencontre, a introduit le débat par une précision nécessaire. Contrairement à ce que l'annonce de cette mesure a laissé supposer, il s'agit seulement de la participation des deux chaînes à la production d'une trentaine de films nationaux par an. Une décision qui, avec l'engagement du ministère de la Communication à revoir à la hausse l'aide publique à la production (50 millions de Dhs, au lieu des 30 millions), permettra, comme l'a dit le DG du CCM, de «confirmer le Maroc comme premier pays producteur à l'échelle arabe et africaine». Certes, l'implication de la télévision dans la coproduction cinématographique n'est pas un fait nouveau dans notre pays. Mais voilà, les accords entre les producteurs et les deux chaînes se faisaient de gré à gré. Dorénavant, le cahier des charges signé en bonne et due forme par les chaînes d'Aïn Sbaâ et Dar Brihi promet de réglementer, donc d'assainir, les rapports entre les deux parties. Ces rapports qui, comme l'a précisé le producteur Sarim Fassi Fihri, étaient « bricolés», seront organisés par les clauses contenues dans le cahier des charges. «Il aura fallu l'arrivée de Noureddine Saïl à la tête de 2M pour instituer une réelle politique de coproduction », fait remarquer le président de la Chambre marocaine des producteurs de films. Cette politique dénote une conscience de l'enjeu que peut représenter le cinéma pour la télévision. « Entre le cinéma et la télévision, il y a beaucoup d'intérêts», a-t-il souligné. Et de renchérir : « L'audience se fait grâce au cinéma ». « Ce sera un mariage de raison », souffle un cinéphile. En effet, si la télévision deviendra un deuxième guichet pour la production cinématographique, après celui du CCM bien sûr, cela permettra, d'une part, aux cinéastes d'avoir plus de chances de production et reconquérir en plus leur place sur la petite lucarne. Et, d'autre part, cela vaudra à nos deux chaînes de gagner quelques degrés de plus dans la courbe de l'audimat. Du point de vue des producteurs, l'enjeu est capital. « Cela nous donnera la possibilité de passer d'une production artisanale à une production pré-industrielle », résume Latif Lahlou, président du Groupement des auteurs, réalisateurs et producteurs. Jacques Le Glou, membre du Syndicat des producteurs indépendants en France, est intervenu de son côté pour nous édifier sur l'expérience hexagonale en la matière. Si la France, explique ce producteur, arrive aujourd'hui à produire plus de 200 films par an, c'est grâce aussi à l'implication de la télévision. Canal Plus est citée comme un modèle de coproduction, sachant que cette chaîne est considérée en France comme un pionnier. Une chose, cela étant, reste sûre : le rôle de l'Etat français dans le développement du secteur est indéniable. Au-delà de sa contribution financière considérable, il a le mérite d'avoir doté le secteur d'un arsenal juridique solide. « Toutes les chaînes confondues sont portées à diffuser 30% de films français », a-t-il indiqué. De ce côté, le chemin reste long à parcourir. Mais les premiers jalons sont tout de même là…