Deux analystes néophytes récemment engagés par les renseignements militaires américains sont parvenus à établir un diagramme, représentant les liens familiaux et tribaux de Saddam Hussein, qui a contribué à sa capture, affirme « The Wall Street Journal ». Partis d'une liste de 9 000 noms, les deux analystes ont fini par en sélectionner 300 à la mi-septembre avant de concentrer leurs recherches sur un Irakien très proche de l'ex-président, dont le nom est toujours tenu secret, qui était, selon les témoignages de plusieurs prisonniers, le financier de la résistance. L'homme a été arrêté un jour avant la capture de Saddam Hussein. Dans le quartier général de l'armée américaine à Tikrit, fief du président déchu, un énorme diagramme coloré explique, à qui sait lire, les liens qui ont permis à Saddam d'échapper aux recherches. Sur ce schéma de la «galaxie Saddam» plus de 9 000 personnes gravitant autour de la photo de l'ancien maître de Bagdad. Un concentration proche du centre représente les «courtiers», ceux qui mènent à Saddam Hussein, «en qui il aurait le plus confiance». Selon des sources directement impliquées dans la traque qui entraîné la chute de l'ex-président, «il n'y avait que quatre ou cinq intermédiaires-clef», dont l'un d'eux est l'informateur qui a révélé le lieu de la dernière cache de Saddam. On sait maintenant qu'il ne recevra pas la récompense de 25 millions de dollars promise, puisqu'il a lui-même été fait prisonnier. Le diagramme en question relate la saga de tribus, dont les ressorts d'action sont les liens de sang et l'argent. Il est concentré autour de six clans qui ont toujours appuyé Saddam. D'après ceux qui ont débusqué l'ancien président irakien, il y a deux types de personnes qui l'ont aidé : «ceux qui l'ont fait par loyauté et ceux qui l'ont fait pour l'argent». Ce sont eux qui lui fournissaient des planques, des fusils, des organisateurs et des financiers. Malgré la chute de Saddam Hussein, la guérilla ne connaît pas de répit. Pour certains la vraie guerre commence. La multiplication des actes de guérilla imposent aux Etats-Unis de réexaminer en profondeur leur engagement en Irak et les forcent à une confrontation à long terme dont ils ne maîtrisent pas forcément le calendrier et la durée. La situation sur le terrain s'oriente plutôt vers un allongement du conflit. Les Forces américaines, intentionnellement ou non, sont passées à une nouvelle étape, en envoyant leurs chasseurs F16 bombarder les abords de Tikrit, la ville natale de Saddam Hussein, avec des bombes de 200 kilos, et ce pour la première fois depuis la chute de Bagdad. Les Forces américaines sont ainsi passées d'une force policière, chargée d'assurer la stabilité et limiter les poches de résistance, à une mission de combats militaires. Il probable que cette opération ne reste pas exceptionnelle, mais constituera un précédent annonciateur d'une nouvelle étape du conflit. Paradoxalement, la situation en Irak risque de passer de l'état de paix délicate à celui d'une guerre. Surtout, que l'Administration Bush refuse encore de voir la nature tribale d'une insurrection en expansion constante ces dernières semaines. Des tribus d'un autre âge, qui ont la particularité d'être très conservatrices. L'exemple de la tribu Albueisi illustre cette dichotomie. Forte de 50 000 personnes de la région de Fallujah, au cœur du fameux triangle sunnite, elle accuse l'armée américaine de bafouer leur code de l'honneur aux postes de contrôle et quand elle effectue des raids musclés chez les particuliers. Selon certains, on doit à cette tribu l'hélicoptère Chinook abattu près de Fallujah au mois de novembre par un missile de détection de source de chaleur. 16 Américains y avaient trouvé la mort. : «si les Américains venaient comme des gens normaux, nous les accueillerions volontiers», assure un membre de la tribu. «Quand ils sont venus, je leur ai envoyé de la nourriture. Maintenant tout ce que je veux, c'est les tuer. Si je n'avais pas d'enfants je joindrais la résistance dès demain». Par ailleurs, le soutien exprimé par George W. Bush à une éventuelle condamnation à mort de Saddam Hussein a suscité un profond malaise chez ses alliés européens en nourrissant les inquiétudes au Proche-Orient sur l'équité du procès à venir de l'ancien président irakien. Dans un entretien accordé à la chaîne ABC, le président américain a estimé que Saddam Hussein méritait le « châtiment suprême » pour les crimes perpétrés par sa dictature. Principaux partisans européens de la guerre qui a entraîné la chute de Saddam Hussein, la Grande-Bretagne, l'Italie et l'Espagne ont toutes pris leurs distances avec les propos de Bush. « Je ne crois pas en la peine de mort (...) mais je respecte l'opinion des autres », a déclaré le ministre de l'Intérieur britannique, David Blunkett, sur les ondes de la BBC, et « je pense qu'il serait bon que le peuple irakien prenne lui-même la décision». La ministre espagnole des Affaires étrangères s'est pour sa part clairement prononcée contre la peine capitale pour Saddam Hussein. Selon Ana Palacio, le procès de l'ex-dictateur irakien devrait servir à montrer la supériorité de la «moralité» sur la barbarie. «Le procès de Saddam doit être un symbole d'éthique et de moralité humaine face aux penchants les plus misérables et les plus inhumains», a-t-elle insisté. Le ministre italien de la Défense a aussi fait part de son opposition à une éventuelle condamnation à mort. «Il n'y a pas que moi, la grande majorité des Italiens est contre la peine de mort. Je ne suis pas prêt à donner l'autorisation de tuer aux pouvoirs politiques», a dit Antonio Martino lors d'une conférence de presse.