Le congrès du Parti républicain démocratique et social de l'ancien président mauritanien, Moaouiya Ould Sidi Ahmed Taya, a été suspendu avant la fin de ses travaux. Premières limites de la transition ou volonté de ne pas renouer avec les démons du passé ? Comme du temps de l'ancien régime, le congrès du Parti républicain démocratique et social, tenu au Palais des congrès de Nouakchott, du 21 au 24 octobre, a vu défiler tout l'aparactchik économico-politique de l'ère Ould Taya. Seule différence, les couleurs bleues de l'ex parti étaient quasi-absentes. Dans les alentours du Palais des congrès, construit au temps de la toute-puisssance du diplômé de Saint Cyr, la ferveur populaire était aussi moindre. L'heure n'était pas à la fête. A l'intérieur de la salle par contre, les tractations étaient intenses. Enjeu, élire un bureau exécutif, un conseil national et un secrétaire général. L'orientation politique affichée dans les différentes déclarations demeure le soutien à la période de transition en cours. Mais, dans l'ensemble, les travaux ont accouché , selon les commentateurs sur place, d'un ni-ni. Ni signaux forts de dépassement du passé ni, non plus, position exprimée pour le soutien de l'exilé du Qatar. Une frange minoritaire, constituée des jusqu'au-boutistes, proposera brièvement une motion de retour... Alternative vite balayée par les barons du parti qui, en bons politiciens, ont résolument opté pour l'allégeance au CMJD, en attendant les élections communales et législatives en 2006 et en 2007. Pour marquer la rupture, l'ex parti-Etat a tronqué son ancienne appellation (Parti républicain démocratique et social) par une nouvelle, Parti républicain et démocratique pour le renouveau. Ce changement de nom n'a pas été accompagné sur le fond de remaniements au niveau du cercle dirigeant. Les courants réformistes ont été tenus à l'écart, selon Ahmed Ould Lafdal, un membre réformiste au sein du parti. Par conséquent, les vieux dinosaures qui «manquent de popularité » sont parvenus à rester aux commandes. Mais, alors que les 280 membres du Conseil national préparaient leur session, la Chambre administrative du tribunal de Nouakchott ordonnait, vendredi 28 octobre, la suspension de tous les travaux issus de ce congrès et l'annulation de la session du Conseil national, prévue le même jour, dans l'après midi. Les détracteurs du CMJD y verront les premières failles de l'alternance. Le recours en annulation se fonde, explique-t-on du côté des ordonnateurs, par le fait que ce congrès s'est tenu dans «des conditions illégales », en raison de la présence des membres de l'ancien gouvernement et des deux chambres du Parlement dissous. De plus, selon un avocat, cité par l'agence officielle, les travaux du congrès se sont déroulés sous la présidence d'un bureau de cinq membres dont trois ne sont pas des délégués audit congrès. Bref, au-delà de ces décisions de justice, l'enjeu est désormais de savoir sous quelle forme le parti de Taya reviendra dans le jeu politique mauritanien. Parviendra-t-il à survivre à ses contradictions internes et à certains gros départs? Acceptera-t-il un candidat imposé de l'extérieur, et surtout un certain Ahmed Ould Daddah, opposant historique de Ould Taya, présumé avoir des sympathies affichées dans l'armée. Ce dont on est pour le moins sûr, c'est que le chef d'Etat Ely Ould Mohamed Vall a promis d'observer une neutralité stricte par rapport aux partis et de mener la transition en toute transparence. Des paroles suivies d'actes concrets : traitement similaire jusqu'à présent avec tous les chefs des partis politiques, à l'exception d'une formation islamiste interdite à cause de ses positions jugées extrêmistes et dangereuses pour la démocratie mauritanienne. Ould Vall, arrivera-t-il pour autant à résister jusqu'au bout à la tentation et aux appels du pied tant des ex-affidés du régime que d'une certaine opposition en ébullition et qui a perdu avec la chute de Ould Taya son élément fédérateur ?