Fahd Yata a analysé d'une manière pertinente la prestation du président de la première Chambre du Parlement lors de l'émission «Hiwar» sur la première chaîne. Nous reproduisons l'éditorial de notre confère. Abdelouahed Radi, président de la Chambre des représentants depuis 1998, membre du Parlement marocain depuis 1965, ce qui fait de lui le doyen des parlementaires, premier secrétaire adjoint de l'Union socialiste des forces populaires, était mardi soir l'invité de Hiwar, de la TVM, animée par Mustapha Alaoui. Vieux briscard de la politique, Abdelouahed Radi a fait montre, au cours de la seule vraie émission politique de nos deux chaînes nationales, de quelque éloquence, notamment lorsqu'il évoqua la personne et l'apport d'Abderrahmane Youssoufi dans la mise en place de l'Alternance, d'une bonne dose de cet humour qui fleure bon le terroir marocain (en grand propriétaire terrien qu'il est), mais surtout d'une certaine agressivité envers les journalistes qui le questionnaient fort civilement et d'une terrible propension, (un art diraient certains), à esquiver les questions, alliées à un cynisme qui a souvent percé au fil des réponses qu'il donnait. En face des caméras de TVM, M. Radi a sans doute oublié qu'il s'adressait au peuple marocain, à des millions de téléspectateurs qui avaient besoin de retrouver confiance en une institution parlementaire décriée, mal perçue, éloignée des électeurs, à l'heure où plusieurs réformes initiées par SM le Roi tentent de revaloriser la politique et ses acteurs. Le leader socialiste, abruptement, a fui les vérités qu'il aurait dû reconnaître, tant au niveau des problèmes internes vécus par sa formation (et qui déboulent sur la place publique malgré un congrès qu'il a qualifié de “ réussi ”), qu'à celui de la stratégie des alliances qui sera mise en œuvre dans la perspective des prochaines échéances électorales. C'est ainsi que le dirigeant progressiste qu'il est, tout en déclinant les qualités d'un parti de gauche (ce qui est incontestablement le cas de l'USFP), n'a pas craint d'évoquer l'hypothèse d'une alliance future avec le PJD en une grande coalition “ à l'allemande ”, au lendemain des législatives de 2007, prétextant pour cela qu'en politique “ rien n'est impossible ”. Cette sortie de M. Radi, à n'en point douter, fera mal à de nombreux militants de sa formation, mais aussi à tous ceux qui préfèrent appeler à la mobilisation des forces de gauche contre le péril conservateur et réactionnaire et qui rejettent la perspective d'alliances contre nature entre des partis que tout devrait séparer. De plus, la position de M. Radi est d'autant plus choquante qu'elle a pour conséquence de démobiliser par anticipation tous ceux qui comprendront que les jeux sont déjà faits puisque la direction de l'USFP envisage d'ores et déjà une “ alliance avec le diable ” pour rester aux affaires… Assurément, M. Radi a donné de lui-même mardi soir une image plutôt négative, lui qui n'a pas craint, sur un autre registre, de rendre responsables les citoyens du manque de conscience politique de la majorité des parlementaires, qui accepte l'absentéisme et la transhumance partisane, qui refuse le rajeunissement des directions politiques et qui trouve normal que les projets de lois soient votés en plénières par moins du tiers des membres de la Chambre des représentants !!! On attendait d'Abdelouahed Radi l'autocritique courageuse d'un homme qui a été l'un des piliers du parlementarisme marocain, le bilan d'un dirigeant au soir d'une longue carrière, l'appel à la responsabilisation des nouvelles générations dans le pays et dans son parti. Au lieu de quoi, nous avons eu les réparties en forme de pirouettes d'un vieux leader politique qui refuse ce que M. Bousaïd a donné aux fonctionnaires, l'opportunité d'un départ volontaire. Mais n'est pas Youssoufi ou Boucetta qui veut… • Fahd Yata (La Nouvelle Tribune)