A l'occasion du 40ème anniversaire de la disparition de Mehdi Ben Barka, un colloque international intitulé "De la Tricontinentale à l'Altermondialisme" a eu lieu samedi à Paris. Compte rendu. Lors de la séance "Assassinats politiques : crimes d'Etats et raison d'Etat", présidée par la déléguée permanente de Palestine en France, Leïla Chahid, les participants ont évoqué tout ce qui a été accompli, et ce qui reste à accomplir pour faire toute la lumière sur la disparition de Mehdi Ben Barka, soulignant qu'une telle manifestation fait partie du combat pour la mémoire et la vérité. Cette rencontre doit également contribuer à faire échec à la banalisation et à l'impunité de l'assassinat politique, ont-ils fait remarquer. Les éminents penseurs français et maghrébins qui ont pris part à ce colloque, ont évoqué le combat de Mehdi Ben Barka pour l'indépendance et la libération des peuples du tiers-monde, pour les droits de l'Homme, la justice sociale, le sous-développement et l'édification d'une société moderne. Ils ont souligné la responsabilité des services secrets marocains dans sa disparition et rappelé, par ailleurs, que 40 ans après la disparition de Mehdi Ben Barka, les circonstances de cette affaire ne sont pas encore élucidées. Toutefois, l'implication directe des services secrets américains et israéliens dans la disparition de l'opposant marocain est établie dans la mesure où cet homme constituait une menace pour leurs intérêts géostratégiques dans la région, ont-ils expliqué. Par la suite, les participants ont passé en revue les assassinats politiques commis en France, selon une liste établie par l'association "Mémoire, vérité, justice sur les assassinats politiques", notamment l'assassinat en 1972 de Mahmoud Al Hamchari, représentant de l'OLP, de Basil Al Kubeisi, Irakien membre du comité central du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) en 1973 et de l'Algérien Mohamed Boudiaf en 1992. Cette liste comporte également l'assassinat d'Azeddine Kalak, représentant de l'OLP en France en 1978 et le meurtre en 1979 de l'agent des services syriens Zouheir Mouhsen. L'assassinat en 1980 de Salah Bitar et d'un étudiant iranien par colis piégé, sont également mentionnés dans cette liste. Pour Mme Victoria Brittain qui a vécu et travaillé comme journaliste à Saigon, Alger, Nairobi, Washington et Londres, le recours systématique à l'assassinat ciblé contre les mouvements de libération en Afrique et au Moyen-Orient, a modifié le cours de l'histoire d'un certain nombre de pays et profondément affecté les politiques régionales. Dans le contexte plus large de l'histoire du tiers monde, l'impact de ces assassinats a été considérable, selon Mme Brittain qui relève que les relations actuelles de pouvoir entre le tiers-monde et les puissances de l'Occident sont dans une large mesure, le résultat de la politique d'usure par l'assassinat politique pratiquée pendant des années. Cette politique, poursuit la conférencière, a privé l'Afrique et le Moyen-Orient de quelques uns de leurs grands dirigeants, affaiblissant parallèlement l'importance de leurs organisations politiques. La pratique de l'assassinat ciblé a produit les effets attendus en affaiblissant et en minant les mouvements de libération, notamment au Cameroun, au Congo et en Palestine, a-t-elle conclu. Ce colloque est organisé notamment par la Fédération internationale des Ligues des droits de l'Homme, l'Institut Mehdi Ben Barka, la Ligue française des droits de l'Homme et "Mémoire, vérité justice" avec la collaboration du Monde diplomatique. "Le tiers-monde de Bandoung à la Tricontinentale", "De la solidarité afro-asiatique à la solidarité des peuples d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine", "Droit des peuples et droit international", "Altermondialisme, signification actuelle", "Assassinats politiques" et "Travail de justice et de vérité", sont quelques thèmes retenus par ce colloque qui s'est poursuivi jusqu'à hier. La première journée de ce colloque s'est déroulée en présence des membres de la famille de Mehdi Ben Barka dont son fils Bachir, du fils du syndicaliste tunisien assassiné Ferhat Hachad et de l'épouse de l'avocat algérien assassiné également Ali Mecili, considéré comme l'une des figures emblématiques de la guerre d'Algérie.