En analysant le traitement médiatique de la libération des prisonniers marocains, on perçoit chez la presse algérienne beaucoup d'amertume dissimulée derrière un semblant de résignation. A l'occasion de la libération des 404 prisonniers marocains par le Polisario, le "Quotidien d'Oran" a effectué un reportage sur place à Tindouf : "Pour célébrer cette nouvelle initiative de paix, les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf étaient en fête jeudi dernier. Sous une chaleur assommante, les familles sahraouies ont scandé des slogans à la gloire de leurs martyrs et de la lutte pour la libération de leurs terres, brandissant fièrement les drapeaux sahraouis et des pancartes portant l'inscription «Peace», «Freedom» et «Democracy». A 15h, le sénateur américain était accueilli comme un chef d'Etat, un véritable héros. Les prisonniers, eux, restaient dans un coin à l'ombre, avec leurs tenues militaires neuves et ruminant leurs années perdues. La libération, ils en avaient tellement rêvé qu'ils n'osent pas y croire. Pour eux aussi, le sénateur Lugar est un héros". Un tissu de contrevérités. Cette libération a été une décision "volontaire, humanitaire, un signe de bonne foi" de la part des séparatistes. Voici le message principal que la presse algérienne essaye de diffuser. Aucune allusion à une quelconque entrée en force des Etats-Unis. Certains journaux ont carrément modifié les propos du sénateur américain, émissaire du président Gorges W. Bush et président de la commission des Affaires étrangères au Sénat, Richard Lugar. Celui-ci avait exhorté Rabat et Alger à ouvrir des négociations pour solutionner leurs problèmes. Toutefois, "Le Jeune Indépendant", dans sa livraison du samedi dernier, a assuré que Richard Lugar a appelé "le Maroc et le Front Polisario à œuvrer à un règlement du conflit". En somme, l'Algérie continue à narguer la communauté internationale. Citée par la presse algérienne, à l'occasion de la libération des 404 militaires marocains, Alger a "réaffirmé son attachement à une application scrupuleuse du plan de paix de l'ONU pour le règlement du conflit du Sahara qui oppose le Maroc au Front Polisario depuis 1975". En clair, Alger se dérobe à ses responsabilités et soutient une solution inapplicable car le Plan Baker (qu'Alger a savamment inspiré) a été catégoriquement rejeté par le Maroc. Pour sa part, le journal "L'Expression" a une lecture singulière du déplacement de Richard Lugar en Algérie : "La présence à Alger du chef de la commission des Affaires étrangères du Sénat américain indique aussi, en filigrane, l'importance qu'accordent aujourd'hui les Etats-Unis à des relations exemplaires avec l'Algérie". C'est se voiler la face que de croire que le coup de force américain est à inscrire à l'actif d'Alger. En outre, "L'Expression" estime que "si l'amélioration des relations entre Alger et Rabat est souhaitée par les Etats-Unis, un tel raffermissement des rapports entre les deux pays maghrébins ne doit pas se faire pour autant au détriment du droit international et du droit du peuple sahraoui à l'autodétermination". En somme, certains milieux algériens ont encore du mal à concevoir une solution de la question sahraouie dans le cadre de la souveraineté marocaine.