En remportant pour la deuxième fois consécutive le titre de champion du monde du marathon, Jaouad Gharib est entré par la grande porte dans l'histoire de l'athlétisme mondial. Après les deux médailles d'argent remportées par Hasna Benhassi (800m) et Adil El Kaouch (1.500m), le métal précieux a été, enfin et après une longue attente, le lot de Jaouad Gharib (marathon) et l'hymne national a été entonné, samedi au stade olympique de la capitale finlandaise. Jaouad Gharib, heureux de son second titre mondial, après celui de Paris en 2003, a réussi une autre fois de briller de mille feu devant, notamment les membres de la communauté marocaine résidant en Finlande (environ 1800) qui ont soutenu chaleureusement et exprimé leur joie après cette consécration marocaine. Gharib a ainsi damé le pion, dès le début de la course, en particulier, au champion olympique, l'Italien Stefano Baldini (abandon) qui a été contraint à une blessure ainsi qu'aux autres athlètes coriaces tanzaniens, Kenyans et Nippons. Le Marocain, 33 ans, a conservé son titre de champion du monde de marathon, un doublé que seul l'Espagnol Abel Anton avait réussi aux Mondiaux, en 1997 (Athènes) et 1999 (Séville). Mais Jaouad Gharib a réussi également à conserver le record mondial des championnats signé lors de l'édition de Paris en 2003. Jaouad Gharib était arrivé aux 9èmes championnats du monde de Paris, sans fanfare, mais en était reparti avec les honneurs d'une médaille d'or enlevée pour la première fois dans ce genre de compétitions (2h 8mn 31sec). Ce jeune athlète "timide" qui allie endurance, résistance et vitesse a tenu la dragée haute tout au long du marathon d'Helsinki à ses adversaires du jour, notamment à l'Italien Stefano Baldini, le Tanzanien Christopher Isegwe et au Japonais Tsuyoshi Ogata. Soutenu par la ferveur du public venu nombreux au stade olympique de la capitale finlandaise, Gharib a franchi la ligne d'arrivée en 2h 10mn 10sec, devançant de 11 secondes son poursuivant immédiat, le Tanzanien Isegwe (2h10:21), médaillé d'argent. Ce deuxième titre successif de Gharib n'est que le fruit d'un travail marqué par l'assiduité et des entraînements de haut niveau effectués sur trois périodes, la première à Khénifra, sa ville natale, la deuxième à Ifrane et la troisième à Michlifen, sous la houlette de son coach Mohamed Mouha, qui est le troisième entraîneur de cet athlète depuis 2003. Jaouad Gharib avait été également entraîné par l'ancien champion olympique Brahim Boutayeb avec lequel il avait remporté son premier marathon mondial, puis avec l'entraîneur Abdelghani Kestal. Le rêve de ce grand athlète était de décrocher l'or des jeux olympiques (JO) d'Athènes pour le dédier à son prédécesseur, feu Abdeslam Radi, médaillé d'argent lors du marathon des JO de Rome en 1960. Mais la consécration d'Helsinki a remplacé le métal précieux d'Athènes (11ème) dans l'espoir de concrétiser le rêve lors des prochains JO de Pékin de 2008. Après quarante-trois années de la médaille d'argent de feu Abdeslam Radi, Gharib avait offert, à Paris, la deuxième médaille d'or au Maroc dans cette discipline considérée comme la plus ancienne compétition dans l'histoire de l'athlétisme mondial. Le champion marocain a donc inscrit pour la deuxième fois consécutive son nom en lettres d'or, pour être le troisième athlète marocain médaillé d'or à deux reprises, après ses compatriotes Hicham El Guerrouj, le maître incontesté des 1.500m, avec 4 médailles d'or et Nezha Bidouane, deux médailles d'or sur le 400 m haies. Jaouad Gharib est synonyme de l'éclosion tardive, puisqu'il n'avait commencé l'athlétisme qu'à l'âge de 22 ans, âge où des athlètes comme Hicham El Guerrouj ont déjà à leur actif plusieurs titres. Ainsi, Gharib a eu son premier contact avec l'athlétisme via la télévision marocaine qui transmettait alors en direct le marathon de Marrakech, édition 1992. "Un jour de janvier 1992, je regardai la télévision qui transmettait en direct le marathon de Marrakech et c'était le déclic...Je me suis posé la question: pourquoi ne pas être parmi ces gens-là et gagner un jour ce marathon", a-t-il confié un jour. Le lendemain, il a pris la clé des champs, en commençant à s'entraîner tout seul, avant de réintégrer un club local. Après avoir aiguisé ses armes au sein de l'équipe militaire de la Garde Royale avec laquelle il a réalisé des exploits fabuleux, Gharib se lance dans une nouvelle aventure, celle des courses sur route. Vu son potentiel, la direction technique de la Fédération royale marocaine d'athlétisme a décidé de l'incorporer à l'Institut national de Rabat et le confiant à Brahim Boutayeb, l'ancien champion olympique du 10.000m à Séoul, dont l'objectif avoué est le10.000m. Il s'entraînait aux côtés des Habassa, Bedday, Goumri, Hissou et autres. Au terme des championnats du monde d'Edmonton en 2001 où il avait terminé 11ème, avant de remporter la médaille d'or des jeux méditerranéens de Tunis, il a fallu toute l'expérience et le savoir faire de son entraîneur et du directeur technique national pour le convaincre à se reconvertir vers le semi marathon et le marathon. En 2001, il avait enlevé l'argent de semi marathon des mondiaux de Bruxelles, avant de se contenter l'année suivante, de la 12ème place lors de l'édition de Bristol en Angleterre. Jaouad Gharib avait disputé son premier marathon en 2003 à Rotterdam où il avait occupé la 6ème place, avant de remporter au cours de la même année (juin) le semi-marathon de Johannesburg et d'être sacré champion du monde lors de l'édition parisienne. • Mohamed Benchrifa (MAP)