L'Administration Bush est décidée à réduire de manière drastique le nombre des personnes détenues dans la base de Guantanamo. Le département d'Etat américain annonce des négociations avec dix pays dont le Maroc. L'Administration américaine, face aux grandissantes polémiques sur les conditions de détention de plusieurs centaines de prisonniers sur la base cubaine de Guantanamo, semble décidée à transférer une grande partie de ces derniers vers leurs pays d'origine. Pour ce faire, les Etats-Unis ont initié plusieurs négociations avec les pays concernés et s'apprêtent à faire de même avec au moins dix autres pays. Le but est de parvenir, dans un délai de deux mois, à des accords incluant toutes les modalités du transfert, mais aussi de détention, si besoin en est, des «combattants ennemis». Selon une récente édition du «Washington Post», citant le département d'Etat américain, le Maroc figure parmi ces dix pays aux côtés de l'Egypte, le Bahreïn et le Koweït. Ces quatre pays, à eux seuls, devront se mettre d'accord avec les Américains pour recevoir 19 personnes arrêtées pour la majorité en Afghanistan dès le début des opérations militaires contre le régime des Talibans et Al Qaïda. Les Etats-Unis avaient déjà extradé au Maroc cinq personnes dont Abdallah Tabarak, présenté par les médias comme étant un des gardes du corps de Ben Laden. Ce dernier, en plus de deux autres co-détenus, a été acquitté par la Chambre criminelle près la Cour d'appel de Rabat à la suite d'un long procès où rien n'a pu être prouvé contre lui. Le même sort a été réservé à Brahim Benchekroun et Mohamed Mazouz. Toutefois, à en croire des milieux islamistes marocains et notamment l'Association «Annassir» qui a élargi ses activités récemment pour militer pour la libération des Marocains encore détenus à Guantanamo, huit Marocains figurent toujours parmi les centaines de personnes encore en détention sur la base cubaine. Il s'agit, entre autres, de Mohamed Belmoujane, Mohamed Alami et Saïd Boujaâdiya. Les accords recherchés par les Américains concernent uniquement les personnes jugées peu susceptibles de représenter un danger en reprenant leurs présumées activités terroristes et notamment en agissant contre les intérêts des Etats-Unis. Ce nouveau revirement américain a déjà connu un début de concrétisation avec un accord conclu la semaine dernière avec le gouvernement afghan. En vertu de cet accord, les Etats-Unis transféreront vers ce pays 110 personnes qui seront éventuellement emprisonnées dans l'ex-pays des Talibans. En échange, les Etats-Unis ont promis d'apporter toute l'aide nécessaire pour les infrastructures pénitentiaires, mais aussi la formation des gardiens afghans. Washington était également sur le point de conclure un accord similaire avec l'Arabie Saoudite pour le transfert de 129 ressortissants saoudiens détenus à Guantanamo. Les négociations et l'accord qui devait en découler n'ont pas abouti. Tout a été interrompu avec le décès du Roi Fahd et les Américains espèrent tout reprendre dans les quelques semaines à venir. D'autres négociations similaires avaient déjà été initiées avec le Yémen, le pays à fournir le plus grand nombre de détenus aux côtés de l'Afghanistan et de l'Arabie Saoudite. En Afghanistan, les Etats-Unis devront d'ailleurs trouver une solution pour les 350 personnes (combattants ennemis) toujours emprisonnées sur la base aérienne de Bagram. Reste toutefois que Washington trouvera beaucoup de peine à convaincre l'un des pays européens pour l'accueil de 15 musulmans chinois détenus à Guantanamo et que l'Administration Bush refuse d'extrader vers la Chine par crainte de mauvais traitements et d'iniques procès. L'objectif des Etats-Unis, via ces contacts, négociations et accords, est de parvenir à alléger la base cubaine à raison de 68 % et où sont toujours détenus 510 présumés terroristes. Les Américains excluent toutefois 100 détenus de la liste des transférables, les jugeant comme étant des personnes à haut risque pour la sécurité des USA. Ces 100 personnes seront jugées aux Etats-Unis où l'on parle de plus de plus de l'éventualité de procès devant des tribunaux militaires, option qui a été dénoncée depuis longtemps par plusieurs ONGs de défense des droits de l'Homme. Le comité créé au Maroc en faveur des Marocains de Guantanamo compte mener des actions, au Royaume comme ailleurs, pour leur libération et, surtout, pour qu'ils puissent librement choisir une autre destination au cas où ils ne voudraient pas rentrer au pays.