Entretien avec Mohamed Talal, PDG Groupe La Voie Express Logistics et vice-président de la CGEM ALM : Quel regard portez-vous sur le développement du secteur logistique au Maroc ? Mohamed Talal : Le Maroc a connu sur les 15 dernières années une importante avancée dans le secteur de la logistique. Cependant, nous accusons encore un retard très important par rapport aux pays ciblés à l'export ou à l'import par nos entreprises nationales. En effet, quand les pays concurrents au Maroc ont un coût logistique par rapport au PIB de 9 à 12 %, le Maroc reste malheureusement à 19%, soit à un coût très élevé. Ce qui plombe sensiblement la compétitivité du tissu économique marocain. Le secteur a-t-il été réellement résilient en ces temps de crise ? La réponse sera mitigée. Disons que le secteur sera maintenu. En effet, d'un côté la fermeture des frontières a mis à mal les entreprises de transport international, les transitaires, les frets forwaders car ils ont vu leur flux baisser de plus de 70%. De même pour le transport national de fret non alimentaire, car d'un autre côté les usines de production étaient en sous- activité, voire à l'arrêt. Il est à noter que le mot d'ordre de la Fédération du transport la FT-CGEM et de la CGEM, à travers leurs présidents respectifs Abdelillah Hifdi et Chakib Alej, a été de demander à tous les opérateurs logistiques d'être solidaires avec notre pays en assurant la chalandise des marchés et la distribution au niveau national, et ce indépendamment de toutes les questions économiques. Et nous sommes fiers aujourd'hui d'avoir répondu présent ! Puisque comme vous aviez pu le constater, aucune perturbation n'a été relevée. Quels sont les principaux enseignements tirés de cette conjoncture ? La leçon doit être d'ordre stratégique. L'entreprise marocaine doit, aujourd'hui, repenser son modèle de développement et assurer sa pérennité dans le temps en améliorant sa résilience face aux aléas socio-économiques mais aussi géopolitiques. En tant qu'opérateur, comment La Voie Express a-t-elle réagi face à ce nouveau contexte ? Pour rappel, La Voie Express est un Groupe de plus de 1.240 salariés qui opère depuis près de 25 ans dans les métiers de la messagerie, du transport et de la logistique. En assurant plus de 27.000 livraisons par jour au Maroc et plus de 240.000 m2 d'entrepôts logistiques sous gestion, La Voie Express s'est adaptée. Nous avons mis d'abord l'accent sur nos ressources humaines en mettant en place un programme d'accompagnement qui s'est appuyé sur les guides sanitaires de la CGEM. Ensuite, nous avons rassuré nos salariés sur la pérennité du Groupe et nos partenaires sur la continuité de l'activité au niveau qualitatif connu. Ensuite, bien au contraire nous avons lancé de nouveaux projets de développement par rapport aux nouveaux marchés de l'après-crise, notamment des chantiers ont été ouverts dans le chantier de la digitalisation. Selon vous, quelles sont les offres qui répondent aujourd'hui le mieux à cette nouvelle donne ? Les offres doivent répondre au client final, qui est de plus en plus pressé, veut acheter à distance, veut avoir plus de choix, veut payer moins cher, ne veut plus se déplacer, et veut être informé en temps réel. Donc nous devons apporter des solutions novatrices et flexibles, nous devons être réactifs et surtout mettre en place des solutions évolutives. Quelle place occupe la digitalisation dans votre process ? La digitalisation est au cœur de tous nos projets, mais sans perdre de vue la satisfaction du besoin client au moindre coût. En effet, La Voie Express investit dans les systèmes d'information depuis plus de 15 ans. D'ailleurs nous avons été précurseurs dans notre secteur de la logistique, puisque à ce jour nous restons la seule entreprise ayant installé nos systèmes d'informations dans des Data Centers à l'étranger il y a 10 ans avec des sites de back-up (sauvegardes). Ce qui d'ailleurs nous a permis d'être certifié Afnor ISO 27001 (sécurité des systèmes informatiques). Aussi, tous nos sites sont informatisés, dématérialisés grâce à la radio fréquence et nos 480 livreurs au niveau national sont dotés de terminaux (PDA) de livraisons. Et quelles sont vos perspectives pour le cap actuel ? Nos perspectives sont très prometteuses, essentiellement dans les métiers de la messagerie, du e-commerce et de la logistique, dans lesquels de lourds investissements sont en cours. Toujours pour répondre au mieux à nos 4.600 clients «entreprises» et nos 3.278.000 «clients particuliers» qui nous ont fait confiance en 2021.