Tout y passe. La nouvelle loi antiterroriste soutenue par Aznar en Espagne ratisse large. D'où un recul palpable des libertés publiques. Fait insolite dans la « Vieille Europe ». Au hit-parade des gouvernements espagnols champions en matière d'avancées des libertés publiques, l'actuelle formation dirigée par José Maria Aznar se perdrait certainement dans la queue du classement. L'interdiction du parti indépendantiste Batasuna et surtout la nouvelle loi antiterroriste, une loi dont les domaines d'application peuvent s'avèrer multiples, sont là pour le montrer, Aznar voit le monde à travers le prisme sécuritaire. En vertu de cette disposition, une marche pacifique peut être considérée comme …une action terroriste si elle n'est pas autorisée. Des mineurs peuvent recourir à des peines d'emprisonnement. Bref, une boulimie sécuritaire que le leader basque nomme « le tunnel de l'autoritarisme », et qui, à l'occasion, sert à faire taire les voix indépendantistes. Le chef du gouvernement espagnol menace désormais d'envoyer le président du Parlement basque, élu pourtant démocratiquement, en prison. Un durcissement qui ne fait l'affaire ni des uns ni des autres, et surtout des partisans du dialogue, persuadés qu'aucune action sécuritaire ne pourrait faire taire un parti politique qui recueille en moyenne à chaque élection plus de 200 000 voix. D'ailleurs ce n'est plus que dans le pays basque où les aspirations « souverainistes » donnent de la voix. A l'allure où vont les choses, Aznar va bientôt appliquer sa loi antiterroriste en Catalogne et aussi aux abords du Parlement où chaque semaine pacifistes et mécontents tout court protestent à coup de slogans. La presse a été bien entendu la première à payer au prix fort ce nouveau tour de vis sécuritaire. L'affaire de la revue Ekin dont le directeur a été emprisonné n'est pas sans rappeler quelques pratiques encore en cours sous les tropiques. La loi antiterroriste a été brandie dernièrement pour faire barrage au plan Ibaretxe dont le but n'était ni plus ni moins que l'organisation d'un référendum en terre basque. Réponse d'Aznar: faire voter au Parlement la réforme du code pénal interdisant sous peine d'emprisonnement un référendum non autorisé par le gouvernement. Heureusment que les sondages, du moins jusqu'à nouvel ordre, ne rentrent pas dans la nomenclature des définitions générales d'un « référendum non autorisé ». Ceux-ci accréditent le chef du gouvernement d'une impopularité « raffarinienne ».