Dans sa première comparution devant la justice, en tant que témoin dont le procès des 24 membres présumés du réseau Al Qaïda, le Marocain a nié toute implication dans les attentats de Madrid, dont il est soupçonné d'être l'un des instigateurs. Il a 32 ans, n'a rien d'un islamiste, physiquement s'entend, et il continue de nier toute appartenance à Al Qaïda, tout lien avec ses membres en Espagne et toute implication dans les attentats du 11 mars 2004 à Madrid, dont il est soupçonné, et plutôt deux fois qu'une, d'être l'un des principaux instigateurs. Lui, c'est Jamal Zougam, Marocain installé depuis l'âge de 15 ans en Espagne et le tout premier suspect à avoir été arrêté, deux jours seulement après les attaques qui ont fait 191 morts. Les charges contre lui sont lourdes. Il est accusé d'être un auteur matériel des attentats. La téléboutique dans laquelle il travaillait est soupçonnée d'être l'endroit où les téléphones portables ayant explosé lors de ces attaques ont été vendus. Un de ces téléphones, retrouvé dans le sac d'explosifs qui n'a pas explosé, a mené les enquêteurs vers cette boutique et à Zougam. Certains témoins déclarent même l'avoir vu dans un des trains visés par les bombes. Mais il continue de plaider son innocence. Sa comparution, mercredi, en tant que témoin au procès du 24 membres présumés du réseau Al Qaïda, a constitué pour lui l'occasion de plaider sa cause. Un plaidoyer qui lui a valu d'être exclu de la salle d'audience, mettant ainsi fin à l'un des moments les plus attendus du procès. Mais pas avant qu'il se soit exprimé à la barre, pendant quelque 13 minutes, pendant lesquels il a notamment affirmé dormir chez lui lorsque les attentats ont eu lieu. Zougam a reconnu cependant connaître le Syrien Imadeddine Barakat Yarkas (Abou Dahdah), principal accusé dans le procès de la cellule d'Al Qaida en Espagne, mais il a soutenu que ses relations avec lui étaient uniquement de caractère « commercial ». D'après plusieurs agences d'informations, Zougam a déclaré qu'il s'était, en certaines occasions, approvisionné auprès d'Abou Dahdah en légumes, pour le local commercial qu'il tenait dans le quartier madrilène de Lavapies. C'est la raison pour laquelle il dit avoir été en possession du numéro de téléphone d'Abou Dahdah, contre lequel le procureur Pedro Rubira requiert plus de 60.000 ans de prison pour sa complicité dans les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis. Durant sa comparution au début du procès, le Syrien avait indiqué que ses contacts avec Zougam relevaient du commerce et qu'il ne le considérait pas comme un bon musulman parce qu'il le voyait « sortir avec les filles ». Zougam a, pour sa part, nié avoir été encouragé par Abou Dahdah à se rendre en Afghanistan pour combattre. « Je n'ai jamais entendu personne parler de l'Afghanistan ou de la guerre », a-t-il dit. « Ma guerre est d'aider mon père qui a sept enfants au Maroc avec une autre femme qu'il doit faire vivre avec 150 euros par mois. Ma guerre est pour leur acheter des livres et des vêtements », a-t-il ajouté. Zougam a expliqué qu'il était arrivé de Tanger en Espagne après le divorce de ses parents. « J'ai travaillé où j'ai pu, sur les chantiers, dans les restaurants et en tant que commerçant jusqu'au 13 mars (2004) quand ils sont venus pour m'arrêter sans que je sache rien ». Il a assuré, d'autre part, qu'il ne connaissait pas Salaheddine Benyaich, dit "Abou Moghn", un ancien combattant en Bosnie et en Tchétchènie, actuellement en prison au Maroc pour son implication dans les attentats du 16 mai 2003 à Casablanca. Zougam a, en outre, nié connaître Driss Chebli, l'un des principaux accusés dans le procès en cours, ni Amer Azizi, soupçonné d'être l'un des instigateurs des attentats de Madrid et considéré comme l'un des chefs d'Al Qaifda en Europe à l'époque des faits. Nier tout en bloc, Zougam a soutenu ne pas connaître David Courtailler, détenu en France, en dépit du fait que ce dernier possédait le numéro du téléphone mobile de la mère de Zougam. Avant de quitter la salle, Zougam a demandé la parole pour « ajouter quelque chose », nous informe la MAP. Devant le refus du tribunal, il s'est quand même plaint: « Ils me traitent très mal en prison ». Le juge Javier Gomez Bermudez lui ayant répondu qu'il devait en faire part au magistrat compétent, Zougam a rétorqué qu'il l'avait fait mais que le juge chargé de l'instruction du dossier des attentats du 11 mars lui avait dit qu'il était « très dangereux ». Le juge l'a alors interrompu et a ordonné à la police de le sortir de la salle d'audience. Quelques instants plus tôt, le tribunal avait ordonné la mise en liberté conditionnelle de cinq des 24 personnes soupçonnées d'appartenir à Al Qaïda, dont deux Marocains. Selon certains experts, cités par Reuters, cela pourrait être un signe avant-coureur de leur acquittement.