«Avec la Covid-19, la réflexion s'est accélérée. Cependant, il faut commencer à faire des réglages dans le système financier sinon les 6.000 milliards par an, on ne les trouvera pas si on ne réforme pas le système». «Pour atteindre les engagements internationaux en termes de neutralité carbone, il faut mobiliser 5.700 milliards de dollars par an. Aujourd'hui, la finance verte est de 300 à 600 millions de dollars par an». Les montants sont fixés par Mihoub Mezouaghi, directeur de l'Agence française de développement (AFD) au Maroc, lors d'un webinaire consacré par l'Institut CDG et CDG Capital à la green finance. Pour lui, cet enjeu est, notamment en ce contexte de Covid-19, doublé de celui économique ainsi que de celui de la transformation du système financier. Au-delà de ces challenges, les participants à cette rencontre en ligne avaient, chacun, une perception de cette finance verte. Des réglages à faire dans le système financier Au sens de Bertrand Badré, président-directeur général de Blue Like an Orange Sustainable Capital, ex-directeur général et directeur financier de la Banque mondiale, «toute la finance doit devenir durable». «Avec la Covid-19, la réflexion s'est accélérée. Cependant, il faut commencer à faire des réglages dans le système financier sinon les 6.000 milliards par an, on ne les trouvera pas si on ne réforme pas le système», avance-t-il. De son côté, Benoît Leguet, directeur général I4CE (Institut de l'économie pour le climat), préfère un «verdissement» de la finance. Pour lui, il est, à cet effet, «question d'impact à travers des outils pour aligner l'économie au service du climat». De la gestion des risques liés à la transition Pour sa part, Hamid Tawfiki, administrateur directeur général de CDG Capital, estime qu'il y a un risque lié à la finance verte qui «ne doit pas être dissociée de l'économie». Par l'occasion, il trouve dans le contexte de la Covid-19 «un accélérateur, une occasion, voire une nécessité pour penser la relance à travers la finance verte, voire des projets qui luttent contre le réchauffement climatique». Pour cette green finance, des outils peuvent être utilisés de manière idoine à l'instar de la taxonomie. A propos de la gestion du risque lié à la transition, il considère qu'il faut «accompagner le financement des projets». Dans ce sens, il conduit l'exemple du projet de Bank Al-Maghrib pour le verdissement du secteur financier couronné par le lancement d'émissions vertes par le secteur bancaire, les entreprises et établissements à l'instar de l'AMMC (Autorité marocaine du marché des capitaux) qui a émis un guide pour les green bonds. Des leviers pour le «verdissement» financier Aux yeux de M. Leguet, trois leviers peuvent contribuer à ce verdissement financier. A commencer par «l'engagement volontaire des banques». Aussi, des pratiques de marchés peuvent être instaurées à son sens. De même une impulsion publique est, pour lui, de nature à faciliter ce verdissement à travers notamment la «régulation financière». Le tout en «ouvrant des flux vers une économie bas carbone». «Cependant on ne mobilise pas assez de flux. Il faut mobiliser l'investissement public et privé en motivant le secteur financier tout en s'assurant que les projets sont bancables», ajoute-t-il. Quant à la régulation financière, elle doit, à son sens, prendre «en compte les risques climatiques à la fois». Au Maroc, ce sont des enjeux clés qui se présentent à la finance verte. Il s'agit, selon M. Mezouaghi, de «la volonté des politiques publiques». La régulation est aussi un enjeu à son sens. De même, des opportunités peuvent être saisies pour «prendre en compte le potentiel de l'économie verte qui peut avoir un impact social». Pour lui, ces opportunités consistent en «la relocalisation des filières de production à travers une décarbonisation». Le tout en rappelant que le financement du climat par l'AFD s'élève à 40 milliards d'euros depuis 2005. Comme il le précise, 60% du portefeuille du financement est destiné au climat au Maroc. «Nous travaillons sur les programmes de 2021 pour 80% de financement. Le Maroc doit engager 50 milliards de dollars d'ici 2030 pour respecter ses engagements», ajoute-t-il. Dans ce sens, M. Badré trouve que la finance verte trouvera son chemin aussi via le marché et la réglementation suscitée également par M. Tawfiki qui indique qu'il faut arriver à «orienter les flux de capitaux vers des projets avec résilience». Par l'occasion, il rappelle que la CDG est impliquée dans des programmes de financement de startups vertes.