Le réalisateur et producteur marocain, Hicham El Jebbari, révèle ses projets en cours. Il s'exprime également sur sa démarche par rapport à l'écriture des scénarios, un métier qu'il maîtrise parfaitement. Chose qui se reflète dans ses œuvres réussies. ALM : Nous avons appris que vous avez des projets. Pourriez-vous nous les dévoiler ? Hicham El Jebbari : Pour l'heure, j'ai deux projets. Le premier est une capsule comique intitulée « Café Ness Ness » dont je suis le réalisateur. Cette œuvre, de 13 minutes par épisode, rassemble de nombreux artistes notamment Bassou, Said Ait Bacha, Fettah Gharbaoui, Sandia Tajeddine, Badiâa Senhaji et Mohamed Atir. Quant au deuxième projet, c'est le téléfilm «Oncle Nawfal» dont je suis le producteur. Cette œuvre télévisée, réalisée par Hicham Lasri, sera diffusée sur la chaîne Al Aoula qui émettra également la première œuvre selon la post-production. Qu'en est-il de la 2ème saison «Salamat Abou Lbanat» qui a eu un succès au mois de Ramadan dernier sur MBC 5? C'est toujours un projet en développement. Rien n'est encore décidé au niveau du planning pour cette prochaine saison notamment les dates de tournage. Par l'occasion, je me félicite de l'engouement du public pour cette série. Pourriez-vous nous expliquer les raisons du choix de cette chaîne? Je pense que depuis longtemps nous rêvions que des chaînes étrangères s'intéressent au «drama» marocain. Enfin, il y a une chaîne arabe qui a un large public qui lui est réservé. Je trouve que c'est un beau geste et un pas géant et important pour ce genre et pour le créateur marocains. Ainsi, elle réalisera un rendement non seulement en quantité mais aussi en qualité du public, propagation de celui marocain en-dehors du pays et travail tout au long de l'année dans le cadre d'une concurrence entre un certain nombre d'œuvres. J'espère aussi que d'autres chaînes et producteurs étrangers s'y intéresseront surtout que c'est l'âge d'or du «drama» au niveau mondial. Si l'on ne s'impose pas, en ces temps, nous pourrons bien être en retard par rapport à celui de certains pays qui n'avaient pas d'œuvres de bonne qualité mais sont devenus leaders au niveau mondial. D'autant plus que les plates-formes de streaming et des chaînes privées ont tendance à leur emprunter des œuvres parce que même le problème de la langue ne se pose plus, la traduction ayant facilité la tâche. Donc nous avons tendance à voir des œuvres de pays dont nous n'entendions pas parler. Alors pourquoi ne pas créer un « drama » pour nous, qui avons une histoire, une créativité et un théâtre forts mais limités au niveau local, afin de révéler notre culture et identité. Le tout en adoptant un traitement moderne adapté même aux téléspectateurs étrangers, en concurrençant les autres qui ont un « drama » fort distribué, voire en créant un marché pour nous. C'est un début qu'il faut bien saisir en allant de l'avant afin que celui marocain soit sollicité autant que les autres. Vous êtes producteur et réalisateur à la fois. Comment parvenez-vous à concilier les deux casquettes? Pour ma part, j'ai eu une expérience de six ans en réalisation d'un long-métrage dont j'étais le scénariste, producteur et réalisateur outre quelques téléfilms que j'ai produits. Par la suite, il y a cette production du nouveau téléfilm dont j'ai parlé au début. Pour répondre à votre question sur la conciliation entre les deux, je dirai que c'est une question de gestion surtout quand les projets d'œuvres sont écrits par moi-même. En production, il faut des personnes professionnelles pour le management du projet afin de le mettre sur la bonne voie. Et si l'on parlait des scénarios? Puisque vous écrivez certains textes de vos œuvres, vous écartez la responsabilité du scénariste au moment où d'autres estiment que c'est celui-ci qui doit l'assumer par rapport à la qualité ? Il est vrai qu'à un moment, c'est le scénariste qui assumait cette responsabilité. Mais actuellement, les choses ont changé. C'est le réalisateur qui est le premier et dernier responsable du scénario. Chaque projet porte le nom du réalisateur qui doit être impliqué dans le scénario en tant qu'étape la plus importante. C'est lui qui mélange également sa vision avec l'écriture du texte et crée un équilibre voire une harmonie entre cette vision et le texte tel qu'écrit par le scénariste. Parfois, le scénario peut être bien écrit, c'est la vision du réalisateur qui déforme l'œuvre. C'est pour cela qu'il doit être impliqué avec le scénariste. Pour rappel, j'ai commencé par l'écriture avant de me lancer en réalisation. Puisque vous êtes le réalisateur de «Café Ness Ness», parlons un peu de la comédie. Que pensez-vous de son évolution au Maroc? En général, la comédie, en «drama», en théâtre ou en cinéma, je crois que c'est l'un des genres les plus difficiles que cela soit au niveau de l'écriture ou de la performance. Evidemment, le Maroc a une grande histoire en comédie. De leur côté, les Marocains sont esthètes et ont pris du plaisir à voir plusieurs genres comiques que cela soit sur la télévision ou sur les planches. C'est pourquoi, le public marocain est l'un des spectateurs distingués, de par le monde, qui tient énormément à la comédie. A chaque fois, qu'il y a une œuvre comique au Maroc, il y a une grande affluence pour la regarder et aspire à sa réussite. C'est pour cela que plusieurs producteurs et chaînes parient sur la comédie pour la présenter comme œuvre télévisée pour le public notamment au mois de Ramadan. Pour l'évolution, ce sont les critiques qui peuvent en parler parce qu'ils ont un recul par rapport à cet essor. Pour ma part, je pense que la comédie a connu une évolution bien que celle-ci ne réponde pas grandement à notre aspiration parce que ce genre est lié à la psychologie de la société. Dans ce sens, le public peut prendre du plaisir dans une époque à voir une comédie qui peut ne pas le faire rire dans une autre. La comédie est impactée par le type de public, de l'époque et des sujets. En tout j'ai remarqué que la comédie, avec le temps et même à l'étranger, a tendance à avoir du mal à trouver plus de public et évoluer parce que trop de comédie tue la comédie. En tous cas, c'est sûr qu'elle évoluera parce que nous avons un nouveau genre de shows et d'auteurs différents, ainsi que des séries et films comiques différents. Certains sont assez réussis et d'autres sont moyens. Et c'est le public qui juge. Parfois certaines œuvres ne réussissent pas depuis le début mais au fil du temps. D'autres ont du succès dans l'immédiat et en perdent par la suite. Cependant, au bout d'une décennie, une œuvre forte peut voir le jour et être suivie par le public. Et comment développer ce genre? Pour évoluer, la comédie a besoin de beaucoup de travail, recherche exceptionnelle et de temps notamment en écriture. Pour faire de la comédie, il faut des auteurs dans ce sens qui ont un souffle comique fort. Ils doivent également s'entraîner et développer les sujets et abonder dans le sens de la psychologie et des aspirations du téléspectateur marocain pour une comédie évoluée. Actuellement, d'autres facteurs impactent la comédie notamment les réseaux sociaux, donc l'auteur comique doit développer ses outils de travail pour une nouvelle comédie. Auriez-vous d'autres projets? Je prépare également la 2ème saison de la série «Al Madi La yamout» (Le passé ne meurt jamais) pour la chaîne Al Aoula. D'autres faits, personnages et rôles ainsi que de grands changements y seront apportés.