Il faut visiter un bidonville pour connaître les conditions d'extrême précarité dans lesquelles vivent enfants, adultes et vieillards. Ce que montrent les images des caméras et des appareils photos ne suffit aucunement pour percevoir le degré de la misère et de la déchéance humaine. Il faut visiter un bidonville pour connaître les conditions d'extrême précarité dans lesquelles vivent enfants, adultes et vieillards. Ce que montrent les images des caméras et des appareils photos ne suffit aucunement pour percevoir le degré de la misère et de la déchéance humaine. Le champ de la caméra ou de l'appareil photographique, qui balaye dans des prises panoramiques les baraques en tôle, est limité et ne dégage surtout aucune odeur. Or l'odeur d'un bidonville est insupportable. Nauséabonde par ses fosses sceptiques, pestilentielles, par son cours d'eau qui coule devant les portes avec des résidus où se mélange l'urine avec moult déchets. Suffocante par le dépotoir qui jouxte les maisons et où les ordures fermentent toutes sortes de bactéries faute d'un ramassage régulier des services de la commune. Puante par un fumier où s'entassent les crottes des animaux que les habitants stockent pour les revendre aux fournisseurs des sociétés de fertilisants. C'est dans cet environnement hostile que naissent et grandissent des enfants privés du minimum vital qui finissent souvent dans la rue avec son triste lot de délinquance et de criminalité. A qui la faute ? Les réponses fusent de toutes parts depuis les attentats du 16 mai quand on a découvert que les fous kamikazes provenaient d'un bidonville de Sidi Moumen. C'est la conséquence de la misère, répliquent certains savants futuristes qui sont atteints par une amnésie du passé et du présent. C'est la faute à tout le monde, et des décennies bien avant le 16 mai quand les pouvoirs publics, les autorités locales et les élus ont affiché un laxisme déroutant face à la prolifération des bidonvilles. C'est un secret de polichinelle que d'affirmer que les premiers responsables de cette tare sociale demeurent le Mokaddem , le Cheikh , le caïd, le gouverneur et l'élu local. Les fonctionnaires de l'Etat cèdent facilement à la saveur de la corruption et les élus du peuple se pliaient en deux à la veille d'un scrutin pour acheter des voix moyennant la construction illicite d'une baraque. Les champignons poussent rapidement par la culture de semences traitées par des pesticides portant le sigle de la corruption et de l'impunité. Maintenant que le mal ronge toutes les périphéries de nos villes, il n'est pas necessaire d' être futuriste , ni passéiste pour arrêter l'hémorragie. Il faut seulement être réaliste , pragmatique et résolument convaincu que la résorption des bidonvilles ne passe pas par un relogement systématique aux frais de l'Etat de toute personne possédant une baraque. D'abord, parce que cette stratégie a été une faillite totale puisque jamais le budget de l'Etat n'aurait permis la construction de logement pour éradiquer tous les bidonvilles du pays. Ensuite, et c'est encore plus catastrophique, cette politique de rechange systématique a eu un effet contraire en encourageant la surenchère pour convertir le droit au relogement en un fonds de commerce illicite. La philosophie de l'Etat est ainsi rendue caduque. Par contre celle du ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme , Taoufiq Hjira, est très perspicace dans la mesure où elle met fin à la surenchère et encourage la loi de l'offre et de la demande à éradiquer les bidonvilles. La baraque n'est plus un fonds de commerce lié au droit au relogement quand l'Etat offre une ligne de crédit avantageuse pour un habitat à un prix concurrentiel.