A la veille du sommet des Quinze, organisé jeudi et vendredi à Bruxelles, les ministres européens des Affaires étrangères se sont quittés mardi avec l'espoir de surmonter les graves divergences du vieux continent. Elles ne vont certes pas «se résoudre en 24 heures», comme l'a signifié mardi soir le représentant de la politique extérieure européenne, l'Espagnol Javier Solana. Mais les profondes divisions apparues au sein de l'UE n'empêcheront pas les quinze partenaires de « retrouver un terrain commun ». C'est en tout cas l'espoir qu'ont émis les chefs de la diplomatie du vieux continent réunis lundi et mardi pour préparer le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement prévu durant ces deux jours à Bruxelles. « Il y a des divisions, on ne peut pas les cacher, mais on va tenter de la meilleure manière possible de trouver un terrain commun sur lequel on peut travailler» a résumé M. Salana, estimant qu'«il y a beaucoup de thèmes sur le Moyen-Orient par exemple où l'on peut trouver un consensus pour retrouver l'impulsion de l'Union européenne ». C'est en effet sur la seule question du conflit israélo-palestinien que les ministres ont pu adopter une déclaration commune, réaffirmant notamment «la nécessité de relancer le processus de paix au Proche-Orient». Ils ont appelé à «la publication et la mise en oeuvre immédiate de la feuille de route (…) telle qu'adoptée par le Quartette le 20 décembre 2002 à Washington ». Le dossier irakien continue au contraire de diviser et même de déchirer une Europe qui a d'ailleurs affiché tout au long de cette crise, son manque chronique de diplomatie cohérente voire «unie». Au terme des débats de mardi, le ministre allemand des affaires étrangères Joschka Fischer a confié à la presse avoir assisté, sur l'Irak, à «une discussion sur la base des différences existantes». «Le masquer ne sert à rien», a-t-il constaté. L'UE pourra-t-elle surmonter ses divergences et continuer à se construire ? De l'avis général, « un débat sur une Europe plus forte » au sein de la Convention sur l'avenir de l'Europe est aujourd'hui plus que jamais d'actualité. Présidée par l'ancien chef d'Etat français Valéry Giscard d'Estaing, cette Convention est chargée de définir un projet de constitution pour la future UE élargie à 24 membres en 2004, qui couvrira notamment la politique étrangère et de sécurité commune… Ce que la chef de la diplomatie espagnole a estimé encore possible, insistant sur le fait que les désaccords actuels ne devaient pas «entraver le projet européen». «La construction européenne ne doit pas être freinée ou arrêtée (...) aussi importantes soient nos différences» a déclaré Ana Palacio. Ces «différences» ont cependant ces derniers mois tourné à la polémique, à l'insulte et aux dérapages en tout genre, dont les séquelles seront très longues à s'effacer. Au delà de leur opposition sur le conflit irakien, Paris et Londres ont par exemple vu leurs relations se dégrader par médias et déclarations interposés. Mercredi, la France s'est encore dite « choquée et peinée» par des propos britanniques qu'elle a jugé «indignes d'un pays ami». Dominique de Villepin, a appelé son homologue britannique, Jack Straw, pour dénoncer l'intervention de Tony Blair -sans qu'il soit nommé- qui avait considéré la veille Paris comme responsable de l'impasse diplomatique à l'ONU. L'heure n'est décidément pas à la réconciliation…