Entretien avec Abdellah Karroum, Directeur du Musée arabe d'art moderne (Mathaf) de Qatar ALM : Le Musée «Mathaf» accueille une exposition permanente réunissant une collection marocaine. Pouvez-vous nous en parler plus en détail ? Abdellah Karroum : L'exposition permanente présente entre autres une collection d'œuvres d'art marocaines. Elle rassemble presque les grands fondateurs de l'art moderne au Maroc. Je cite Farid Belkahia, Mohamed Melehi, Chaabia Talal, Jilali Gharbaoui, Fatima Hassan, Younes Rahmoun, Mounir Fatmi, Miloud Lebyed, Mohamed Drissi, Safaa Urruas et d'autres. Par exemple, on a plus de cent œuvres pour Belkahia, une quarantaine pour Melehi, une dizaine pour Miloud Lebyed, cinq ou six pour Chaabia et une cinquantaine pour Cherkaoui. La collection réunit des œuvres d'art, d'une centaine d'artistes marocains, produites au Maroc ou à l'étranger. En effet, la collection réunit non seulement des artistes marocains mais aussi des artistes issus d'Asie, d'Afrique du nord, de l'Inde et autres. Elle a été constituée, il y a une quarantaine d'années, d'abord par l'initiative privée de Cheikh Hassan El Mohamed et après elle a été mise sous tutelle de Qatar Fondation pour gérer la collection. Depuis 2008 elle a été mise sous la gestion de Qatar Museums. Actuellement le musée accueille également «Triumphant Scale», une exposition temporaire de l'artiste international El Anatsui. Qu'est-ce qui distingue cette exposition ? El Anatsui est un artiste majeur. Il expose dans le monde entier. Son exposition «Triumphant Scale» au musée regroupe des œuvres clés issues de cinq décennies de carrière de l'artiste. Au cœur de cette exposition, qui se concentre sur le caractère triomphant et monumental de l'œuvre novatrice d'El Anatsui, se trouvent les œuvres de capsules de bouteilles des deux dernières décennies, avec leur présence majestueuse et imposante et leurs couleurs éclatantes. L'exposition présente également des sculptures sur bois et des reliefs muraux moins connus du milieu des années 1980 à la fin des années 1990, des sculptures en céramique des années 1970, ainsi que des dessins, des estampes et des carnets de croquis. Fasciné par l'architecture monumentale du musée, El Anatsui a créé trois œuvres spécialement pour cette exposition, parmi lesquelles «L'installation». L'évènement a pour ambition de souligner l'apport d'El Anatsui à l'art contemporain en mettant en lumière son langage visuel complètement nouveau. Quelles seront les prochaines expositions prévues au Mathaf ? Le musée accueillera en mars 2020 une exposition temporaire individuelle de l'artiste marocaine Yto Berrada. L'exposition se déroulera durant quatre mois et investira presque la moitié du musée. En 2020, il y aura aussi une exposition du Franco-algérien Kader Attia. Il est actuellement l'un des artistes français les plus reconnus sur la scène nationale et internationale Est-ce qu'il y a des échanges avec la Fondation nationale des musées au Maroc et quelles seront vos prochaines collaborations ? On a beaucoup de collaborations avec la Fondation nationale des musées. D'ailleurs, on lui avait prêté presque 14 œuvres de Cherkaoui pour l'exposition qui lui a été consacrée. On leur prête des œuvres pour les différentes expositions qu'ils organisent. On a également des échanges avec le Musée d'art contemporain de Rabat. Vous êtes directeur du «Mathaf», chercheur, critique d'art et curateur, comment réconciliez-vous entre toutes ces fonctions ? Je suis ici depuis 2013 à la tête de la direction du Mathaf. Je suis dans mon élément. Je gère les programmes, les collections et le musée et cela représente pour moi une grande responsabilité. Tout cela est en cohérence avec mes recherches et mon intérêt lié à l'art moderne et contemporain. Et même temps, la production des formes émergentes de l'art au Maroc et ici au Qatar m'intéresse beaucoup. Je peux dire que je suis là-dedans comme un poisson dans l'eau. Quel est l'objectif et la mission de ce musée ? Le musée représente non seulement l'art contemporain moderne mais aussi des programmes éducatifs et des recherches. Et qui dit recherches, dit identification des manques dans la collection. Le Mathaf est très actif dont l'achat d'œuvres qui manqueraient dans la collection mais aussi bien dans la production des recherches et la publication des livres. Le musée a pour objectif de mettre en lumière l'art moderne et contemporain au Moyen-Orient, en Afrique du nord, en Inde ou autres.