Les pensionnaires d'une maison de bienfaisance, qui souffraient en silence des agissements d'un gardien pédophile, vont enfin pouvoir respirer. Leur bourreau, qui a été arrêté, devra rendre des comptes devant la Justice. Orpheline de père, elle a été placée par sa mère à Dar Attalib, la maison de bienfaisance de Tiznit. Elle était âgée de huit printemps et souhaitait, à l'instar de sa mère, être bien accueillie, et bien soutenue pour arriver à confronter un avenir qui lui dissimulerait tant du bien que du mal. Elle rêvait de poursuivre ses études pour décrocher un diplôme et trouver un emploi pour venir en aide à sa mère, la sauver de la pauvreté qui la dévore jour et nuit. Elle partageait ses rêves avec d'autres pensionnaires de cette maison de bienfaisance. Chacune d'elles brûlait d'un feu intérieur qui ne pouvait être éteint qu'avec un avenir prometteur. Sinon, c'est la misère, la rue, la délinquance, le vagabondage, la prostitution, qui les guettaient. Bref, elles n'ont pas d'autre choix que de tracer un parcours de réussite jusqu'au bout pour ne pas sombrer dans le gouffre. À chaque fois que sa mère lui rendait visite, elle lui réitérait ses encouragements à s'intéresser à ses études, à songer à un avenir bâti sur des bases solides pour arriver à réaliser ses rêves. La petite fille a promis de ne négliger aucun effort pour y arriver. Seulement, tout a basculé en un clin d'œil. Tous ses efforts n'étaient désormais fixés que sur un objectif : fuir les extravagances sexuelles d'un gardien qui n'a jamais pensé à les considérer comme des enfants. Quelques mois après son arrivée à la maison de bienfaisance, Dar Attalib, elle a été croisée un jour par le gardien en cause. Il l'a saisie par la main et l'a conduite vers la salle du contrôle éducatif. Elle ne savait pas au départ pourquoi il l'a emmenée dans cette salle. Aucune pensionnaire ne lui avait jamais parlé auparavant des comportements de l'homme. Il l'a fait rentrer sans lui adresser le moindre mot. Que lui voulait-il ? La maltraiter ? A-t-elle commis une erreur qui lui coûterait une gifle ou deux? Elle n'en savait rien, mais ses joues étaient déjà trempées de larmes. «Ne pleure pas, ma petite, je ne te ferais pas de mal», lui dit-il enfin tentant de la rassurer. Il lui a demandé de s'asseoir sur un tabouret et il a pris un papier journal qu'il voulait placer sur les carreaux des fenêtres. Et pourquoi ? la fille n'en savait toujours rien et l'attendait sur le tabouret en suivant ses pas avec des regards enfantins et curieux. Après quoi, il est retourné vers elle et lui a demandé de descendre du tabouret. Il l'a emmenée vers une table rectangulaire, lui a demandé de monter dessus. La fille obtempérait à ses sollicitations sans poser de questions. Enfin, il l'a allongée. La fille a résisté, elle voulait se relever. D'un ton menaçant, il l'a obligée à s'allonger sans protester. Elle a commencé à pleurer en silence. Il l'a dénudée, sans vergogne et s'est déboutonné pour procéder à des attouchements sur elle. Ensuite, il lui a intimé l'ordre de ne rien révéler à personne. Bouche cousue, elle est sortie de la salle, traînant ses pas vers son lit pour cacher ses larmes et sa souffrance. Le gardien n'a pas cessé depuis d'abuser d'elle. Au fil du temps, la petite grandissait et sa souffrance empirait. Quelques années plus tard, elle a fini par refuser de céder aux fantasmes du gardien. Celui-ci ne pouvait plus l'obliger, vu qu'elle avait atteint son seizième printemps. Depuis, il lui a tourné le dos pour s'intéresser à deux autres filles, âgées de neuf ans. Elle le regardait, le suivait, sans lui permettre de prêter attention à elle, jusqu'à, cette fois, la salle de surveillance, pour abuser des deux petites filles. Elle retournait dans son lit, en gardant le mutisme. Mais elle a fini après de longs mois par alerter le directeur de l'établissement. Celui-ci a appelé le gardien indigne et l'a blâmé sans prendre aucune autre mesure disciplinaire contre lui. En fait, cet homme aurait dû être chassé et poursuivi si le directeur avait décidé d'alerter la police ou le procureur du Roi. Des employés ont eux-aussi alerté le directeur et ils ont fini par constater les faits sans réagir. Aucun d'entre eux n'a pensé à aviser les autorités compétentes pour mettre fin aux extravagances de ce gardien. Hors d'elle, ne pouvant plus supporter les comportements d'un homme qui n'a cessé ces comportements que deux à trois mois, la fille a fini par mettre sa main dans celle d'une autre pensionnaire pour prendre l'autocar à destination de Chtouka Aït Baha, chez l'épouse de son oncle maternel, puis à Meknès, chez des membres de sa famille, puis à Tiflet et enfin à Nador. Là, elle a tourné le dos à la pensionnaire qui était en sa compagnie, parce qu'elle avait découvert que celle-ci se prostituait. Et elle a pris l'autocar à destination de Casablanca, puis à Safi pour séjourner chez un bienfaiteur qui fréquentait souvent Dar Attalib de Tiznit. Il l'a accueillie chaleureusement. Elle lui a pas raconté son histoire et celle des autres pensionnaires qui enduraient le calvaire. Quelques jours plus tard, le bienfaiteur demeurant à Safi a été alerté que la fille faisait l'objet d'une note de recherche. La police de la ville l'a interrogée et la pensionnaire a craché le morceau. Conduite devant la police de Tiznit, elle a réitéré ses déclarations et dévoilé les noms de deux autres victimes du gardien en cause. Ces dernières ont affirmé avoir été victimes d'abus sexuels du gardien. Arrêté, ce dernier, 43 ans, père de quatre enfants, a avoué avoir abusé sexuellement de plusieurs pensionnaires. Le directeur et deux autres employés de la maison de bienfaisance de Tiznit ont reconnu être au courant des comportements du mis en cause. Mais ils n'ont jamais osé alerter la police. Pour cette raison, ils ont été poursuivis en état de liberté pour non-dénonciation.