Après les stars hollywoodiennes, les hommes de lettres américains se mobilisent contre la guerre en Irak. Arrêt sur quatre actes dont tout le monde attend qu'ils transforment une tragédie en une belle leçon d'humanisme. Acte I. Curieusement, Les stars hollywoodiennes, celles que leurs détracteurs nomment la gauche Limousine, ont été les premières à se mobiliser contre la guerre en Irak. Martin Sheen, George Clooney, Susan Sarandon, Ed Norton, Penelope Cruz, Sean Penn ou Martin Scorsese se sont exprimés contre la guerre en Irak. Cette mobilisation a même laissé courir le bruit que Martin Sheen, qui joue le président des Etats-Unis dans le feuilleton télévisé « A la Maison Blanche » (The West Wing), allait être viré par la chaîne NB. Ce qui a avivé le démon du maccarthysme, dans les années 50, pendant la guerre froide, où acteurs, scénaristes et cinéastes soupçonnés de sympathies pour le communisme avaient été placés sur «liste noire» et interdits de travail à Hollywood. Cette « chasse aux sorcières » avait mis sur la liste noire Charlie Chaplin, Arthur Miller et Orson Welles, entre autres. Mais rien de tel ne peut être envisagé contre les stars hollywoodiennes qui se mobilisent contre la guerre en Irak. Ils sont trop nombreux et le très puissant syndicat des acteurs américain, la Screen Actors Guild (SAG), ne veut plus entendre parler de comédiens « blacklistés ». Acte II. Après les stars hollywoodiennes, les hommes de lettres passent à l'attaque. Tout a commencé par une lettre d'invitation dont s'est beaucoup formalisé son destinataire. Le poète américain Sam Hamill n'en croit pas ses yeux lorsqu'il reçoit un faire-part à une réception organisée le 12 février à la Maison Blanche par Lara Bush, et intitulé «la Voix poétique de l'Amérique». Comment ose-t-on ? Lui le fondateur de la prestigieuse maison d'édition Cooper Canyon Press, connu par son opposition à la guerre du Vietnam, pacifiste notoire, se voit convié à une réception poétique par la femme d'un président déterminé à envahir l'Irak. Cette invitation lui donne « la nausée », comme il l'écrit à ses amis poètes. Il leur demande de composer des textes contre la guerre et de les poster sur un site web qui porte bien son nom : poetsagainstthewar.org. Hamill ne manque pas d'humour, puisqu'il allait répondre à l'invitation de Lara Bush par la collecte des textes contre la guerre de son mari. Les contributions à ce site ont atteint en trois jours 10 000 textes, signés par des poètes connus comme W.S. Merwin, Philip Levine, Grace Paley et des noms moins connus. La Firt Lady en annule sa réunion sur la poésie. «Il n'est pas approprié de transformer un événement littéraire en forum politique», déclare une porte-parole. Acte III. Un groupe de féministes se réunit à Washington à l'occasion de la Journée internationale de la femme, célébrée le 8 mars dernier. Elles s'acheminent vers la Maison Blanche pour protester contre une éventuelle guerre en Irak. Vingt-sept personnes sont interpellées, dont les célèbres écrivains Alice Walker et Maxine Hong Kingston. La première est l'auteur de livres comme « La Couleur pourpre », « Le Cœur noir », la seconde des « Hommes de Chine » et « Les Fantômes chinois de San Francisco ». Acte IV. Un groupe de stars hollywoodiennes, parmi lesquelles Jessica Lange, Ethan Hawke et Steve Buscemi a remis lundi à la mission américaine aux Nations unies une pétition contre la guerre en Irak signée par plus d'un million de personnes. « Je ne veux pas laisser à mes enfants l'héritage de cette guerre. Les Américains sont des gens moraux et cela suppose qu'on ne laisse pas notre gouvernement nous mentir sur la justesse de notre cause », a déclaré Jessica Lange. Les signatures pour la pétition ont été rassemblées à travers le monde sur Internet, en cinq jours seulement, par un groupe, Moveon.org, membre d'une coalition d'organisations opposées à la guerre en Irak appelée Win Without War (WWW, Gagnez sans la guerre). Voilà pour ce qui concerne la protestation de l'Amérique des arts et des lettres contre la guerre en Irak. Cette mobilisation a fini par provoquer des ondes de choc en dehors des frontières des USA. Et pour preuve, les artistes et les hommes de lettres marocains ne veulent pas demeurer en reste. Un immense concert sera organisé dans ce sens le 17 mars au théâtre Mohamed V.