La polémique est déjà engagée sur les preuves que va présenter, demain, Colin Powell au Conseil de sécurité. Tout en insistant sur les mauvaises intentions américaines, Baghdad réaffirme sa volonté de négocier et de coopérer. La communauté internationale a entamé hier une semaine cruciale pour l'issue de la crise irakienne, alors que la polémique ne cesse de se développer sur les preuves que détiennent les Etats-Unis sur les manquements du régime irakien à ses engagements vis-à-vis de l'ONU. C'est demain que le secrétaire d'Etat américain Colin Powell doit présenter ces «preuves» au Conseil de sécurité. Elles seraient notamment fondées sur les écoutes électroniques. Le dossier, selon «Le New York Times», serait mince et, aussi bien la CIA que le FBI sont en désaccord avec la Maison Blanche en ce qui concerne les supposés liens tissés entre le régime de Saddam Hussein et les réseaux d'Al-Qaïda. Le général irakien, Hossam Mohamed Amin, principal officier de liaison avec les experts en désarmement de l'ONU, a affirmé que Colin Powell allait probablement présenter des preuves fabriquées. «Je crois que les Américains ont fabriqué des photos satellites et des vues aériennes qui pourraient être interprétées de diverses façons simplement pour alimenter des soupçons». «Il n'y aura pas de vraies preuves, parce que nous ne détenons pas d'armes de destruction massive et que nous ne nous livrons pas à des activités interdites», a-t-il assuré. Mais voilà que José Maria Aznar, chef du gouvernement espagnol, se mêle de la partie : il affirme en savoir assez pour juger de la menace irakienne. Signataire avec sept autres dirigeants européens d'une lettre de soutien à George Walker Bush, il soutient que «tous les gouvernements savent que Saddam Hussein, du fait de l'armement dont il dispose, biologique, chimique et de ses liens avec les groupes terroristes, représente une menace pour la paix, pour la sécurité mondiale et pour l'Espagne». Dans cette optique de guerre, à quelques heures de la réunion du Conseil de sécurité, deux conseillers américains de haut rang se sont livrés à des révélations sur les projets de Washington. L'hypothèse de l'occupation de l'Irak par l'armée américaine pour une longue période est ainsi confirmée pour la première fois. La deuxième indication sur les plans de l'Administration Bush, développée par le secrétaire à la Défense Donald Rumsfelld, affirme que «la guerre va commencer prochainement, et les Etats-Unis seront en mesure d'avoir la situation en main en l'espace de 30 jours». Ces projections accréditent des informations de presse quant à la perspective de frappes massives contre l'Irak dès l'ouverture des hostilités. Selon «Le New York Times», le Pentagone a prévu de lâcher 3.000 bombes et missiles dans les premières 48 heures de la campagne, de façon à briser le moral de l'armée et créer un choc au sein du pouvoir politique. De son côté, «The Observer» croit savoir que les raids de bombardiers viseront en premier lieu les palais de Saddam Hussein et d'autres symboles de l'Etat irakien, de façon à dissocier le peuple irakien de son président et du parti Baath. Malgré tout, le Président irakien serait toujours optimiste quant à la possibilité d'éviter la guerre, selon un ancien député et ministre britannique Tony Benn, l'une des grandes figures de la gauche britannique, qui a vient de séjourner à Baghdad où il é été reçu par Saddam Hussein. Par ailleurs, les chefs des inspecteurs en désarmement des Nations unies, Hans Blix et Mohamed Elbaradeï sont attendus samedi à Baghdad, avant leur prochain rapport au Conseil de sécurité, le 14 février. Ils reviennent en Irak pour deux jours de discussions dans l'espoir d'obtenir des concessions de Baghdad pour pouvoir accélérer le travail quotidien des inspecteurs, et en particulier lever les obstacles aux vols de reconnaissance des Nations unies et aux entretiens en privé avec les chercheurs irakiens. Au plan diplomatique, les ministres des Affaires étrangères des pays arabes se réuniront au Caire à la mi-février pour harmoniser leurs positions sur l'Irak. Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe multiplie les rencontres avec les dirigeants arabes afin de fixer une date pour cette réunion d'urgence. La date précise du sommet annuel arabe, prévu au mois de mars, sera également fixée après le retour de Baghdad des chefs des inspecteurs en désarmement de l'Irak.