Sa Majesté le Roi reçoit le président mauritanien à Casablanca    Digital Space Accelerators 2024 : l'écosystème des startups au Maroc en question    Le Nouveau modèle de développement des Provinces du Sud a donné un nouvel élan au chantier de la régionalisation avancée (Yanja El Khattat)    Aziz Senni, un entrepreneur franco-marocain pressenti pour intégrer le gouvernement    Finances locales : Un excédent budgétaire de 11 MMDH à fin novembre    La Banque mondiale accorde 250 millions de dollars au Maroc pour renforcer l'agroalimentaire    Ibtissam El Boukhari : "Notre objectif est de généraliser l'usage des signatures numériques"    L'aéroport d'Agadir franchit le cap historique de trois millions de passagers    Dessalement : Le PJD pointe un conflit d'intérêts et appelle Aziz Akhannouch à démissionner    SM le Roi félicite l'Emir de l'Etat du Koweït à l'occasion de son premier anniversaire d'accession au pouvoir    Netflix obtient les droits des deux prochaines Coupes du monde féminines    Snowfall expected in Morocco this weekend    L'Exposition de l'Innovation à l'Université Al Akhawayn : un carrefour entre ingéniosité étudiante et coopération industrielle    Pharma 5 launches Morocco's first generic medicine based on medical cannabis    Le patrimoine culturel de Tanger célébré au musée Villa Harris    Barid Al-Maghrib lance une émission spéciale de timbre intitulé « Le Malhoun, patrimoine culturel immatériel de l'humanité »    Climat : l'Afrique en quête de solutions au Forum euro-méditerranéen    Nouveau gouvernement belge : La mission du formateur prolongée jusqu'au 7 janvier    À Rabat, réunion du comité technique chargé de l'élaboration d'un cadre référentiel pour la santé en milieu carcéral    Le Raja Casablanca se sépare de l'entraîneur Sá Pinto et du joueur Bouzok    Starlink : Internet par satellite bientôt accessible au Maroc    Angleterre. Coupe de la Ligue : Tottenham élimine Mezraoui et compagnie    Botola D1/J15: Berkane terminera la mi-saison sur le podium, Mohammedia et Tétouan sur les sièges relégables    26e Coupe du Golfe des Nations 24: Le coup d'envoi donné ce samedi    Grèce: Huit morts dans le naufrage d'un bateau de migrants    Cyclone Chido. Le bilan s'alourdit au Mozambique    La première dame de Mauritanie subit une opération réussie à Rabat    Traite des êtres humains. Le Maroc et la Côte d"Ivoire signent un accord    Nigeria. Une fête foraine meurtrière    Tourisme. Plus de visa entre la Zambie et 53 pays    Classement FIFA. Le Maroc finit l'année en beauté    Challenge N°950 : Du 20 au 26 décembre 2024    La très dérisoire candidature algérienne à la vice-présidence de la Commission de l'Union africaine    Sahara : L'influence d'Israël sur le soutien du Sénat paraguayen    Washington rejette la désignation par l'Algérie du MAK comme organisation terroriste    US challenges Algeria's terrorist label for Kabylie movement    Inflation : l'IPC augmente de 0,8% en novembre    Une résolution marocaine sur le tourisme durable adoptée à l'ONU    Les températures attendues ce vendredi 20 décembre 2024    Le temps qu'il fera ce vendredi 20 décembre 2024    Essaouira : Une convention de 2,3 MMDH pour relancer la station Mogador signée sous la présidence de M. Akhannouch    Cinéma : Le Maroc sélectionné pour le tournage d'un méga-film sur Cléopâtre !    Classement FIFA: Le Maroc termine l'année au 14è rang mondial    Aide à la production cinématographique : Des titres et des montants    «Rêves avortés de femmes mazaganaises», de Khatiba Moundib, à mi-chemin entre le réel et l'imaginaire    Un spectacle de tbourida clôt l'année culturelle Maroc-Qatar à Doha    Placement de produits dans le cinéma : Pratique lucrative qui peine à s'imposer au Maroc ! [INTEGRAL]    Festival "Florilège Culturel" : un colloque célébrant la poésie, le zajal et les adages marocains    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Belkahia à cœur ouvert
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 24 - 01 - 2003

Le peintre Farid Belkahia expose ses œuvres à la galerie Al Manar à Casablanca. Ce peintre, dont le nom se confond avec l'Histoire de la peinture au Maroc, parle de sa relation au signe et récuse les propos rapportés par certains de ses confrères sur son art.
Aujourd'hui le Maroc : Que pouvez-vous dire de votre relation avec le signe ?
Farid Belkahia : Ecoutez ! Si l'on considère que la calligraphie est un signe, et si certains artistes y ont recours par souci identitaire, ça peut être légitime, mais c'est une préoccupation somme toute très limitée et qui ouvre très peu de perspectives. Les jeunes qui transforment la calligraphie en œuvre plastique oublient qu'il s'agit d'un texte qui véhicule un sens.
C'est une écriture avant tout. D'ailleurs, nous ne sommes pas la seule civilisation à s'enorgueillir d'avoir une calligraphie exceptionnelle. Les Chinois et les Japonais en font depuis des millénaires. Les hébraïques ont également une belle calligraphie, mais je ne connais aucun artiste moderne japonais, chinois ou juif qui fait de la calligraphie l'objet de son art. Ça veut dire qu'il s'agit d'une voie sans issue, un piège. Les artistes et ceux qui les encouragent à faire de la calligraphie perdent beaucoup de temps.
Oui, mais que pouvez-vous dire du signe indépendamment de la calligraphie…
C'est vrai que j'ai utilisé des signes du tifinargh (caractères de l'écriture des Touaregs, ndlr), mais dans un but très précis, en ce sens où je faisais appel à la mémoire. J'ai voulu tenir compte de ce patrimoine graphique. Ce que j'en ai fait est strictement esthétique, et ne peut pas se limiter à des significations identitaires. D'ailleurs, Le tifinargh n'est pas propre au Maroc. Il s'étend sur une zone qui comprend de nombreux pays et va jusqu'en Egypte. Le signe dans mon travail participe d'un dépouillement qui a partie liée avec ma démarche. De même qu'un objet peut être épuré jusqu'à son expression essentielle : une ligne, un corps peut être décomposé jusqu'à son apparence dépouillée : le signe. Le corps éclaté, disloqué prend souvent la forme d'un signe dans mon travail. Pareil pour le paysage. Et dans ce sens le signe est moins cette chose, telle qu'on l'appréhende généralement, que l'expression de la nature telle que je la perçois.
Vous êtes préoccupé par le corps et vous peignez sur la peau. Remplacer une toile par une peau, ce n'est pas rien…
Bien sûr que ce n'est pas rien ! Mais ce n'est pas à moi d'en expliquer la signification. Cela est du ressort des critiques et des observateurs. Tout ce que je peux vous dire, c'est comment j'en suis arrivé à la peau. C'était à une époque où je travaillais le cuivre. Un soir j'écoute à la radio tout un speech sur la crise mondiale que nous allions vivre, et que le métal du cuivre se raréfiait de plus en plus. J'en ai éprouvé une grande angoisse, de crainte de n'avoir plus de matériau sur lequel travailler. Il fallait trouver autre chose. J'ai alors pensé à la peau que j'ai travaillée pendant 4 ans sans jamais la montrer, parce qu'il fallait que je fasse connaissance avec ce nouveau matériau. Voir quelle est sa résistance, comment il se développe. La peau devient aujourd'hui rare, parce qu'elle est très utilisée par la mode. Sa qualité se dégrade aussi. Je pense que je vais aller vers un autre matériau, en l'occurrence le papier avec lequel j'ai gardé une grande familiarité grâce au dessin. Il est curieux de constater qu'il n'existe plus de moulin à papier dans des villes comme Fès, alors que tous les moulins du Sud de la France portent un fronton qui dit que le papier a été introduit par les Arabes. Le travail sur ce support-mémoire m'intéresse beaucoup.
La mémoire vous intéresserait alors plus que l'identité…
Oui, la mémoire m'intéresse, mais pas plus qu'un autre préoccupé de son histoire personnelle et de l'Histoire. Ceci pour vous dire que ne je vis pas dans le passé ! Les peintres qui considèrent que je suis un artiste passéiste, traditionaliste, archaïque, employant du “henné”, comme le dit l'un d'eux avec un certain mépris, je vais tâcher de rester poli et répondre à ces personnes : moi, je ne suis pas un plagiaire ! Et d'ailleurs, je n'ai aucune prétention. Je n'ai créé ni école, ni fondé de mouvement artistique. J'essaie tout simplement de sauver ma peau ! Si des personnes se reconnaissent dans mon travail, si elles peuvent trouver des solutions à des problèmes auxquels elles sont confrontées dans leur art, je serais alors l'homme le plus heureux sur terre !
À propos du henné, il participe à l'identité marocaine de votre peinture…
Le henné est un patrimoine mondial. Le henné est utilisé depuis plus de 5000 ans par les pharaons, par les Indiens. Je ne cherche pas en intégrant le henné à ce que ma peinture soit désignée comme marocaine. D'ailleurs, je ne comprends pas ce que veut dire une peinture marocaine. Est-ce que cela signifie qu'elle a été réalisée par un individu situé géographiquement dans un pays qui s'appelle le Maroc ? Alors pourquoi pas ! Mais qu'une œuvre porte en elle les marques d'une marocanité, je doute fort que cela soit suffisant pour être œuvre. Je n'ai pas d'angoisse identitaire. Même si j'étais en Sibérie, je continuerais à faire ce travail à condition que les moyens me soient disponibles.
Cela fait longtemps que l'on ne vous a pas vu dans une galerie nationale. Pourquoi ?
Mes rapports avec le ministère de la culture, qui est propriétaire de ces galeries, n'ont jamais été très bons. Personnellement, je n'ai aucune considération pour le ministère de la culture. Je le dis ouvertement et très franchement sans même pas avoir envie de polémiquer là-dessus. Je me contenterai de préciser : ce ministère n'est même pas capable de donner mon adresse ou mon téléphone à des personnes qui l'appellent pour cela, et je ne dois pas être le seul peintre dans cette situation !
Même en dehors des galeries nationales, l'on vous voit peu. Vous n'êtes pas un peintre prodigue ?
Je travaille beaucoup pour peu de résultats au bout du compte. Ce qui reste, ce qui est montré, ce que le public voit est infime par rapport à la masse de travail que je réalise. Des fois, je me dis que c'est normal pour que le travail ne soit pas verbeux ou bavard, pour qu'il n'y ait pas beaucoup de déchets. C'est ainsi que je manifeste mon respect pour l'art que j'exerce, mon sens de l'exigence. J'essaie de concentrer au maximum, d'atteindre l'essence de ce que je veux exprimer. En même temps je ne peux pas m'empêcher de me dire : combien d'efforts, combien d'heures de travail pour si peu de résultats !


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.