Grande-Bretagne. La police britannique a perquisitionné lundi une mosquée du nord de Londres, dont l'imam radical Abou Hamza al-Masri est soupçonné de former des recrues pour Al-Qaïda. Sept personnes ont été arrêtées. C'est le dernier des spectaculaires coups de filet opérés par la police britannique depuis la découverte, le 5 janvier dernier, de traces de ricine dans un appartement de Londres. Il faut dire que la mosquée ciblée lundi est considérée comme l'une des plus radicales du Royaume-Uni. Elle est connue par les prêches jugés «virulents» de l'imam d'origine égyptienne Abou Hamza al-Masri, proche des salafistes. Dirigeant du groupe des «Partisans de la Charia», il a souvent fait l'éloge du réseau Al-Qaïda, depuis septembre 2001. Cela lui a valu les foudres de la commission gouvernementale contrôlant les associations caritatives, statut que possède le lieu de culte. Cette dernière a accusé l'imam d'abuser de sa position en prononçant des sermons «incendiaires et hautement politiques» et l'a menacé d'expulsion d'ici deux à trois semaines. «Je suis déjà en prison dans ce pays de toute façon», avait répondu Abou Hamza dimanche, ajoutant qu'il ne quittait sa «maison que pour aller prêcher et c'est comme ça depuis huit ans». L'imam âgé de 45 ans a enfin estimé qu'il avait le droit de s'exprimer librement sur la guerre contre le terrorisme «puisque l'archevêque de Canterbury, chef spirituel de l'Eglise anglicane, était autorisé à s'exprimer sur la crise en Irak»... Reste que sa mosquée, située au nord de Londres et appelée «Finsbury Park», aurait accueilli quelques terroristes notoires comme le «shoe bomber» Richard Reid, prochainement jugé aux Etats-Unis pour avoir tenté de faire exploser le vol Paris-Miami en décembre 2001. L'Algérien Djamel Beghal, chef présumé d'une cellule qui préparait un attentat contre des intérêts américains en France, l'aurait aussi fréquentée. Tout comme le Français d'origine marocaine Zacarias Moussaoui, bientôt jugé aux Etats-Unis pour ses liens avec les kamikazes du 11 septembre 2001. Pourquoi avoir attendu ce lundi pour s'intéresser à cette mosquée considérée depuis longtemps comme un repaire pour Al-Qaïda et compères ? Le principal intéressé, l'imam Abou Hamza – qui ne fait pas partie des sept personnes interpellées – a aussitôt qualifié cette opération de «guerre» menée par le Premier ministre Tony Blair contre les Musulmans britanniques. Quelque 150 policiers en tenue anti-émeutes ont investi lundi à 02H00 du matin (même heure GMT) le quartier et la mosquée située dans une maison de briques rouges à trois étages. Deux hélicoptères ont parallèlement survolé la zone. Deux maisons situées à proximité du lieu de culte ont aussi été fouillées et sept personnes arrêtées. Dans un communiqué, la police a dit estimer que les locaux perquisitionnés «ont joué un rôle dans le recrutement de terroristes présumés et dans le soutien à leurs activités ici et à l'étranger». Scotland Yard a aussi confirmé que l'opération, «planifiée sur la base d'informations des services de renseignement», était «liée aux arrestations menées (les 5 et 7 janvier) dans le nord et l'est de Londres», après la découverte du poison mortel ricine. Les sept personnes alors interpellées -quasiment toutes algériennes- fréquentaient-elles, elles aussi, Finsbury Park ? Au moins l'une d'entre elles semblait être un bénévole de cette mosquée. Selon la presse britannique, les enquêteurs anti-terroristes seraient d'ailleurs sur la trace d'une filière algérienne liée au réseau Al-Qaïda. Le Daily Telegraph rapportait aussi, lundi, que le ministre britannique de l'Intérieur, David Blunkett, avait ordonné un vaste coup de filet dans les milieux terroristes présumés «d'origine étrangère» qui utiliseraient la Grande-Bretagne comme base arrière. La police et les services de renseignement intérieur (MI5) ont été autorisés à prendre «toutes les mesures nécessaires» pour traquer les étrangers soupçonnés de représenter une menace potentielle pour la sécurité du pays, selon le même journal. Les services sécuritaires peuvent déjà avoir recours à la nouvelle législation antiterroriste votée fin 2001, et qui permet la détention illimitée, sans inculpation ni jugement, d'un étranger soupçonné d'être lié à une organisation terroriste internationale.